Lectures Solennité du Corps et du Sang de Notre-Seigneur A
Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 6, 51-58)
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51i Après avoir nourri la foule avec cinq pains et deux poissons, Jésus disait : « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. »
52 Les Juifs discutaient entre eux : « Comment cet homme-là peut-il nous donner sa chair à manger ? »
53 Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l'homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n'aurez pas la vie en vous.
54 Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour.
55 En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson.
56 Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi je demeure en lui.
57 De même que le Père, qui est vivant, m'a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même aussi celui qui me mangera vivra par moi.
58 Tel est le pain qui descend du ciel : il n'est pas comme celui que vos pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »
Bologne parle: la tradition est aussi faite de 'ruptures'
L'historien Enrico Morini, disciple bolonais du père Dossetti, intervient dans la discussion. Par une analyse surprenante, qui plaira peut-être davantage aux traditionalistes qu'aux novateurs. Dans un POST-SCRIPTUM les réponses de Arzillo e Cavalcoli.
ROME, le 21 juin 2011 – Dans la grande discussion qui a repris à propos de la manière d’interpréter les changements du
magistère de l’Église au cours de l’histoire, en portant une attention particulière au tournant du concile Vatican II, les partisans enthousiastes de la "rupture" ne s’étaient pas exprimés
jusqu’à présent.
La thèse qu’ils soutiennent est que le concile, dans sa volonté de revenir aux "origines", a rompu avec des éléments importants de la tradition de l’Église du deuxième millénaire et en
particulier avec le modèle occidental d’Église et de papauté produit par le concile de Trente et, avant cela, par la réforme grégorienne du XIe siècle.
L'intervention publiée ci-dessous met fin à leur silence et entre en plein dans cette relecture de l’histoire.
Son auteur est le professeur Enrico Morini, un historien qui enseigne à l'université de Bologne, ville qui a donné son nom à l’"école" qui représente la pointe la plus avancée, du point de vue
progressiste, de l'interprétation du concile Vatican II comme "rupture" par rapport à une partie de la tradition.
Morini est un disciple du moine Giuseppe Dossetti (1913-1996), fondateur de cette "école" connue dans le monde entier principalement à cause de sa monumentale histoire de Vatican II traduite en
plusieurs langues, mais également acteur influent de ce même concile.
Toutefois il n’en reprend pas toutes les thèses à l’identique. Au contraire, son interprétation du tournant du concile Vatican II mécontentera parfois les "bolonais" et les progressistes en
général. Par exemple là où il montre qu’il apprécie la reprise de la messe selon l’ancien rite romain voulue par Benoît XVI.
Mais en même temps Morini mécontentera également un grand nombre de traditionalistes. Par exemple lorsqu’il écrit et explique que le nouveau missel adhère beaucoup plus que l’ancien à la grande
tradition liturgique de l’Église.
Il faut lire son intervention en entier, pour l'originalité et la finesse de ses analyses, pour l'attention particulière qui est accordée aux relations entre l’occident et l’orient, ainsi que
pour la clarté de l’écriture.
Le professeur Morini, 64 ans, est un spécialiste du christianisme oriental. Il enseigne l’histoire de l’Église orthodoxe à l'université d’état de Bologne et à la faculté de théologie
d'Émilie-Romagne. Il est diacre et préside la commission du diocèse de Bologne pour l'œcuménisme.
L’un de ses livres, publié aux éditions Il Mulino en 2002, avait alors fait l’objet d’un compte-rendu de www.chiesa :
> L'oriente dell'occidente. Un libro d'oro
sull'ortodossia
Photo en haut de page : Paul VI et le patriarche œcuménique de Constantinople, Athénagoras, s’embrassent à Jérusalem, en 1964.
Sandro Magister
CONTINUITÉ ET RUPTURE : LES DEUX VISAGES DU CONCILE VATICAN II
par Enrico Morini
Cher Sandro Magister,
Je me permets d’intervenir dans le débat serré à propos de l’herméneutique du concile Vatican II. J’y ai notamment été encouragé par le fait que ce débat a pris récemment une connotation liée à
ma ville et à mon Église, dans la mesure où y sont impliqués indirectement l’“école de Bologne” – représentée par Giuseppe Alberigo, aujourd’hui décédé, et Alberto Melloni, représentants majeurs
de la thèse dite de la “rupture” – et directement le père dominicain Giovanni Cavalcoli, lui aussi bolonais, dont la défense de la thèse de la “continuité” semble s’éloigner d’une position
médiane – que Mgr Agostino Marchetto a récemment reprise, à Bologne justement – en souhaitant un lien avec les "adversaires traditionalistes continuistes" (comme Roberto de Mattei) pour s’opposer
au "néo-modernisme des anticontinuistes".
Je n’ai pas de titres particuliers pour entrer dans ce débat très vif : je ne suis pas un théologien et je n’ai pas de velléités d’en jouer le rôle. Par vocation je suis plutôt un historien. Je
dois également dire en préambule que, bien qu’étant bolonais – par ma naissance, ma formation, ma résidence, mes fonctions d’enseignant – et malgré ma fervente “foi dossettienne” – don Giuseppe
Dossetti a été mon père spirituel et mon point de référence religieux – je n’ai aucun lien, ni scientifique ni académique, avec l’“école de Bologne” d’Alberigo.
Cela dit, je vous fais part ici de mes réflexions en matière d’herméneutique du concile. Rupture, donc, ou continuité ? Par rapport à quoi, peut-être à la tradition catholique ? Je me demande si
la tradition, y compris à l’intérieur de l’Église elle-même, est un fait univoque ou s’il n’y a pas plutôt une pluralité de traditions dans sa diachronie plus que millénaire. Mais je voudrais
dire que, selon une herméneutique de Vatican II qui m’est personnelle mais à laquelle je crois fermement, le concile a été à un moment donné, intentionnellement, à la fois continuité et
rupture.
Avant tout, selon moi, il a été placé, de par la volonté de son bienheureux promoteur Jean XXIII et des Pères qui constituaient ce que l’on a appelé la majorité conciliaire, dans la perspective
de la continuité la plus absolue avec la tradition du premier millénaire, selon une périodisation qui n’est pas purement mathématique mais qui est essentielle, puisqu’il s’agit du premier
millénaire de l’histoire de l’Église, celui de l’Église des sept conciles, qui n’était pas encore divisée. L’aggiornamento souhaité avait précisément pour objectif cette reprise, ce retour à une
époque certes difficile, mais heureuse, parce qu’elle était nourrie de la communion réciproque entre les Églises. Non pas, prenons-y bien garde, un retour – comme l’ont compris beaucoup de gens –
à une "ecclesiae primitivae forma", ce qui est une pure abstraction, un mythe historiographique à la configuration extrêmement nébuleuse et donc inadaptée pour fonder ou refonder une pratique
ecclésiale et, peut-être justement pour cette raison, devenue un modèle inconsistant pour de nombreuses hérésies et, encore aujourd’hui, pour diverses hétérodoxies ecclésiologiques.
Au contraire la théorie et la pratique ecclésiale du premier millénaire sont tout autre chose qu’une abstraction et un mythe, prouvées comme elles le sont par les écrits des Pères et par les
délibérations des premiers conciles. Il est très significatif que l’annonce de Vatican II ait été perçue initialement, dans certains milieux – dans lesquels on trouve même le grand Athénagoras,
victime lui aussi de ce que l’on a appelé une "équivoque œcuménique" – comme étant expressément destinée à la reconstitution de l’unité entre les chrétiens : en somme un concile d’union. Ce qui
est encore plus significatif – au-delà même de la valeur hautement symbolique de ce geste – c’est que le concile ait conclu ses travaux, le 7 décembre 1965, en éliminant "de la mémoire et du
milieu de l’Église", ce qui fit date, les excommunications réciproques de 1054 entre le patriarche de Constantinople et les légats romains (l’extraordinaire valeur ecclésiologique de cet
événement a été magistralement présentée par le cardinal Joseph Ratzinger dans un article paru dans la revue “Istina” en 1975).
Cette reprise de la tradition du premier millénaire par l’Église catholique a comporté de fait une rupture implicite – pardon pour la schématisation excessive – avec la tradition catholique du
deuxième millénaire. Selon moi, il n’est pas vrai qu’il n’y ait pas de ruptures dans la tradition de l’Église. Il y avait déjà eu un hiatus, précisément lors du passage du premier au deuxième
millénaire, avec le changement créé par les réformateurs “alsaciens-lorrains” (ce qu’étaient le pape Léon IX et deux des trois légats envoyés à Constantinople en la fatidique année 1054, le
cardinal Humbert et Étienne de Lorraine, futur pape), par ce que l’on appelle la réforme “grégorienne”, par une approche éminemment philosophique des vérités théologiques et par l’intérêt
débordant pour la canonistique (déjà déplorée par Dante Alighieri), au détriment de la Sainte Écriture et des Pères, propres à la pleine période médiévale. Sans parler, à une époque plus tardive,
de la Réforme tridentine, avec sa dogmatisation rigide – allant même au-delà des présupposés de l’Église médiévale – ni de la “confiscation” de la Sainte Écriture aux simples fidèles, jusqu’à
l’apothéose de la “monarchie” pontificale avec Vatican I, reléguant encore plus à l’arrière-plan l’image de l’Église non divisée du premier millénaire. Il ne faut pas s’en étonner : c’est
justement parce que l’Église est un organisme vivant que sa tradition est sujette à une évolution, mais aussi à des régressions.
Que ce retour ait vraiment été l’intention la plus profonde de Vatican II, on peut s’en rendre compte à travers deux exemples. Le plus immédiat se situe dans le domaine ecclésiologique, domaine
dans lequel l’enseignement du concile en matière de collégialité épiscopale est sans équivoque. Or la collégialité des évêques est précisément un trait caractéristique de l’ecclésiologie du
premier millénaire, y compris en Occident, où elle était parfaitement associée à la primauté romaine. Un fait est révélateur : au cours du premier millénaire, toutes les déclarations dogmatiques
romaines que les légats pontificaux portaient en Orient aux conciles œcuméniques – relatives aux questions débattues à ces conciles – étaient précédées d’une déclaration synodale de tous les
évêques relevant de la juridiction supra-épiscopale de Rome. S’il est vrai que le plus grand ennemi du concile a été l’après-concile – avec la fuite en avant de certains pasteurs d’âmes et de
certains groupes de fidèles qui, au nom de “l’esprit du concile”, ont introduit des pratiques subversives précisément en ce qui concerne la tradition de l’Église avant ses divisions ou qui tout
du moins en demandent l’introduction avec insistance – je crois pouvoir affirmer que c’est précisément le contraire qui s’est produit en matière d’ecclésiologie : les règles d’application ont été
gravement réductrices par rapport aux délibérations conciliaires, dans la mesure où le caractère purement consultatif attribué au synode des évêques ne tire pas de l’enseignement de Vatican II
toutes les conséquences qu’il devrait en matière de collégialité épiscopale. Et puis – toujours pour rester dans le domaine de la structure de l’Église – le rétablissement du diaconat comme degré
permanent du sacrement de l’ordre n’a-t-il pas été, lui aussi, un retour à la tradition du premier millénaire ?
Unsecond domaine dans lequel la continuité entre la réforme conciliaire et le premier millénaire est encore plus évidente – dans la mesure où elle est perceptible par tous – est celui de la
liturgie, même si, paradoxalement, il s’agit d’un exemple que ceux qui critiquent Vatican II privilégient pour accuser le concile de rupture avec la tradition. Le critère herméneutique que j’ai
adopté me permet d’affirmer exactement le contraire, toujours sur la base du postulat d’une pluralité diachronique de traditions. Dans ce cas aussi, il y a eu une rupture évidente avec la
liturgie préconciliaire – qui était notoirement une création tridentine, avec des interventions ultérieures – mais précisément dans le but de retrouver la grande tradition du premier millénaire,
celui de l’Église d’avant les divisions. Peut-être ne sommes-nous pas conscients que le nouveau missel qui fait l’objet de critiques contient une fantastique reprise d’oraisons tirées des
sacramentaires les plus anciens – remontant justement au premier millénaire – le léonien, le gélasien et le grégorien, ainsi que, pour l’Avent, du patrimoine eucologique de l’antique
Rouleau de Ravenne, trésors qui sont restés en grande partie en dehors du missel tridentin. On peut en dire autant à propos de la reprise, dans le cadre d’une opportune pluralité de prières
eucharistiques, de l’antique anaphore d’Hippolyte et d’autres tirées de la tradition hispanique. En ce sens, le missel “conciliaire” est bien plus “traditionnel” que le précédent.
J’écris cela en posant comme corollaire deux observations que ne partageront peut-être pas les “progressistes”. La première est que, si l’on examine l’état actuel du rite “ordinaire” de l’Église
romaine, on constate que cette continuité avec la tradition du premier millénaire, implicite dans la réforme conciliaire, a justement été estompée en partie par bien d’autres développements
intervenus au cours de l’après-concile : d’une part, au niveau de base, il s’est produit un malentendu, le concile ayant provoqué un spontanéisme liturgique désordonné et d’autre part l’autorité
compétente a procédé à la promulgation de textes créés pour l’occasion – concernant de nouvelles anaphores et de nouvelles collectes – visiblement étrangers, par leur langage aventureusement
contemporain et existentiel de façon moderne, au style eucologique du premier millénaire, profondément inspiré par la pensée et par la terminologie des Pères.
Ma seconde observation est que le motu proprio "Summorum Pontificum" – comme on le sait, il autorise l’utilisation du missel tridentin en tant que rite “extraordinaire” – document qui est
considéré par beaucoup de gens comme une régression par rapport au concile, a au contraire pour moi l’indiscutable mérite de rétablir dans l’Église latine ce pluralisme liturgique qui
caractérise, je le répète, le premier millénaire. Même s’il s’agit d’une pluralité rituelle marquée par la variable du temps et non pas par celle de l’espace géographique, elle a le mérite
d’introduire aussi dans l’Église catholique – de manière pacifique et indolore – cette présence “vieux-ritualiste”, qui est un patrimoine de la tradition orthodoxe, même s’il a été acquis de
manière violente et traumatisante.
En revanche j’ai la sensation d’avoir en commun avec l’“école de Bologne” la possibilité, ou plutôt l’opportunité, d’une lecture "augmentative" du concile, cohérente avec les principes qui l’ont
inspiré (l’expression est d’Alberto Melloni), qui permet, ou plutôt qui suggère, au magistère suprême de prendre aujourd’hui des décisions que Vatican II, dans le climat historique de l’époque,
n’avait pas pu prendre en considération. Ce principe inspirateur – dans ce que je considère comme l’herméneutique correcte du concile – c’est précisément la reprise de la tradition du premier
millénaire, comme l’a souligné implicitement le cardinal Ratzinger lorsqu’il a écrit – dans un texte qui n’a jamais été explicitement contredit par le pape actuel – qu’il ne faut rien imposer de
plus aux orthodoxes, dans la physionomie d’une Église finalement réunifiée, que ce à quoi ils croyaient pendant le premier millénaire de communion.
C’est pourquoi il n’est absolument pas dans “l’esprit du concile” d’introduire dans l’Église des innovations inconsidérées, en matière de doctrine et de pratique théologique, comme le seraient le
sacerdoce des femmes ou encore des développements aberrants dans les domaines de l’éthique et de la bioéthique. En revanche, il serait parfaitement dans “l’esprit du concile” – je dis encore cela
à titre d’exemple – d’éliminer du "Credo" l’adjonction unilatérale, injustifiée et offensante du "Filioque" (sans que cela implique une négation de la doctrine traditionnelle des Pères latins –
eux aussi du premier millénaire – relative au fait que le Saint-Esprit procède aussi du Fils, comme d’un unique principe avec le Père). Cette malencontreuse adjonction représente le résultat le
plus évident, à très forte charge symbolique, de ce processus de franco-germanisation théologique et culturelle de l’Église romaine – mis en route par les papes francophiles de la fin du premier
millénaire et les papes allemands du début du deuxième – qui a été dénoncé, en termes certes extrêmement vifs mais pas complètement infondés, par un théologien grec conservateur, Ioannis
Romanidis, aujourd’hui disparu. Et pourtant non seulement cette adjonction subsiste, mais elle a même été reprise dans des textes de composition “postconciliaire” et, par dessus le marché – à ce
que je sais – elle est encore aujourd’hui imposée, ce qui est une honte, à une belle et florissante Église orientale unie à Rome, c’est-à-dire à l’Église gréco-catholique ukrainienne.
En somme, pour conclure en une formule synthétique ces considérations qui me sont personnelles : en lançant la rénovation de l’Église, le concile n’a pas eu l’intention d’introduire quelque chose
de nouveau – comme le désirent ou le craignent respectivement les progressistes et les conservateurs – mais de revenir à ce qui s’était perdu.
En vous remerciant de l’attention que vous porterez à ces lignes.
Enrico Morini
Bologne, le 13 juin 2011
Les chapitres précédents de la discussion à propos des changements du magistère de l’Église au cours de l’histoire, et en particulier à propos de l'interprétation du concile Vatican II.
Dans l'ordre, sur www.chiesa :
> Les grands déçus du pape
Benoît (8.4.2011)
> Les déçus ont parlé. Le Vatican
répond (18.4.2011)
> Qui trahit la tradition ? Le grand
débat (28.4.2011)
> L'Église est infaillible mais Vatican II ne l'est
pas (5.5.2011)
> Benoît XVI "réformiste". La parole est à la
défense (11.5.2011)
> Liberté religieuse. L'Église avait-elle raison même quand elle la condamnait?(26.5.2011)
> Un "grand déçu" rompt le silence. Par un appel au
pape (16..6.2011)
Et aussi, sur le blog SETTIMO CIELO qui est associé à www.chiesa :
> Francesco Agnoli: il funesto ottimismo del Vaticano
II (8.4.2011)
> La Chiesa può cambiare la sua dottrina? La parola a Ceccanti e a Kasper(29.5.2011)
> Ancora su Stato e Chiesa. Dom Valuet risponde a
Ceccanti (30.5.2011)
> Padre Cavalcoli scrive da Bologna. E chiama in causa i
"bolognesi"(31.5.2011)
> Può la Chiesa cambiare dottrina? Il professor "Zagloba"
risponde (6.6.2011)
> Tra le novità del Concilio ce n'è qualcuna infallibile? San Domenico dice di sì(8.6.2011)
POST-SCRIPTUM 1 / LA RÉPONSE DE FRANCESCO ARZILLO
Il contributo del professor Morini alla discussione in corso sull’ermeneutica della continuità è stimolante e utile perché pone in rilievo ulteriori variabili del complesso tessuto storico e
teologico che ci precede.
In effetti, è vero che il "topos" progressista del ritorno alla forma pura del cristianesimo precostantiniano non è una matrice né esclusiva né univoca del rinnovamento teologico e
spirituale del XX secolo: basti pensare solamente al fatto che il "ressourcement" patristico e liturgico, in quanto tale, copre fonti e periodi successivi anche di qualche secolo alla mitizzata
"età dell’oro" ecclesiale.
Ma si può dire che l’intenzionalità riformatrice del Concilio, in quanto tale, abbia avuto di mira essenzialmente il "primo millennio"?
Per una volta vorrei provocatoriamente richiamare proprio il grande discorso giovanneo di apertura del Concilio, il quale richiama come modello metodologico – ma diremmo anche, e
indissolubilmente, contenutistico – proprio quella "maniera accurata di pensare e di formulare le parole che risalta soprattutto negli atti dei Concili di Trento e Vaticano I".
La lezione di uno dei grandi maestri del continuismo dottrinale, il cardinale Newman, risiede proprio in questo: far vedere, ad esempio, come la dottrina dell’Immacolata, che nell’Ottocento
giunse alla sua maturazione teologica e alla definizione dogmatica, abbia le sue remote radici proprio nell’epoca patristica. Nei formidabili scritti mariani (ma non solo) del grande
oratoriano è proprio questo che è in gioco: mostrare come il primo e il secondo millennio siano uniti da un filo profondo, apparentemente nascosto ma innegabile.
Il che dovrebbe consentire un fecondo dialogo con quella sensibilità, diffusa nel mondo ortodosso, che comporta il rischio di assimilare – in un certo senso – il vero all’antico, come se il vero
non possa conoscere un sano sviluppo. Posizione, questa, che a ben vedere non è neppure una rappresentazione corretta della stessa realtà dell’ortodossia, come dimostra, ad esempio,
tutta la questione del palamismo: dottrina inequivocabilmente propria del secondo millennio, anche se giustificata dai teologi neo-greci mediante il ricorso a un’ermeneutica retrospettiva dei
Padri sulla quale autorevoli studiosi hanno sollevato serie perplessità.
Senza dimenticare, poi, la più grande figura del secondo millennio, che è Francesco di Assisi: moderno e antico, occidentale e orientale. Grande gioia, infatti, si ricava dalla celebrazione di
Francesco con i ritmi e gli stilemi dell’innodia bizantina: "Sorgendo da Occidente, o astro, e muovendoti intorno, raggiungi i confini del cosmo, scacciando demòni, innalzando templi venerabili e
allontanandoti dall’Occidente, o sapiente, ti sei guadagnato l’Oriente per mezzo dei tuoi miracoli e con gesta stupefacenti" (testo tratto dalla "Akolouthìa" in onore di San Francesco
d’Assisi nel Codice Galatonese IV, del sec. XV, che si legge in F. Danieli, "Il rito greco a Galatone. S. Francesco d’Assisi in un codice bizantino del sec. XV", Galatina, Mario Congedo Editore,
2005).
Gioia diacronica e sincronica, si potrebbe dire, la quale invita alla cautela nel ricorso alle sia pur utili periodizzazioni storiografiche nel contesto del dibattito ecclesiologico e
teologico.
Francesco Arzillo
Roma, 21 giugno 2011
POST-SCRIPTUM 2 / LA RÉPONSE DE GIOVANNI CAVALCOLI
Caro Professor Morini,
sono contento che nel dibattito sia intervenuto un sostenitore della "rottura" non per lamentarsene, ma per approvarla: il Concilio ha fatto bene a "rompere" con una tradizione del secondo
millennio che aveva fatto dimenticare alla Chiesa cattolica certi aspetti della tradizione del primo millennio precedente lo scisma di Costantinopoli.
Sono d’accordo con lei nel riconoscere quindi al Concilio, tra i suoi meriti, quello di aver recuperato tesori di questo periodo in chiave di ecumenismo con i fratelli orientali. Penso in modo
particolare alla dottrina dei Santi Padri d’Oriente e d’Occidente che sono un sacro ed immortale patrimonio della Chiesa universale.
Io sono molto sensibile a queste cose, perché, prima di essere bolognese, sono ravennate – e lei sa cosa vuol dire questo per i millenari rapporti della Chiesa ravennate ha avuto ed ha con
l’ortodossia orientale – ed ho il ricordo dell’arcivescovo Baldassarri per la sua competenza circa le Chiese dissidenti dell’oriente. Anch’io sono un ammiratore di don Dossetti da questo punto di
vista ed ebbi modo di conoscerlo personalmente a suo tempo, quando stava a Monteveglio.
Quanto al mio rapporto con mons. Marchetto, illustre storico della Chiesa, non trovo in me quella discrepanza da lui della quale lei parla; al contrario lo ammiro molto, lo trovo molto
equilibrato, mi sento in piena sintonia con lui in particolare nel suo impegno di accorciare le distanze tra lefevriani e modernisti per contribuire a creare nella Chiesa quella pace e quella
concordia che si può raggiungere solo se tutti sanno apprezzare nel suo vero valore il motto del papa "continuità nella riforma".
Per quanto riguarda la questione della tradizione nella Chiesa, bisogna distinguere la tradizione divina dalla tradizione umana. O, per usare il titolo di un famoso libro del Padre Yves Congar,
bisogna distinguere "La Tradition et les traditions". La prima, detta "Tradizione apostolica" o "Sacra Tradizione" è, insieme con la Scrittura, una fonte della divina Rivelazione e pertanto
contiene verità soprannaturali, immortali, immutabili, universali, incorruttibili, non superabili: sono quelle "Parole che non passano", delle quali parla Cristo, che egli ha consegnato agli
Apostoli ed ai loro successori da custodire, interpretare, trasmettere e spiegare a tutto il mondo con sempre maggior chiarezza nel corso della storia sino alla fine dei secoli. Qui la Chiesa è
infallibile nel custodire e spiegare questa Tradizione. E questa Tradizione è una sola, così come la verità è una sola, così come Dio è uno solo, così come il Salvatore è uno solo. "Una sola
fides".
Ma siccome la Chiesa è anche evidentemente una comunità umana immersa nello spazio e nel tempo, soggetta come ogni altra comunità umana ai mutamenti ed alle vicende della storia, la Chiesa
possiede anche tradizioni semplicemente umane, benchè appoggiate alla divina Tradizione. Ma in quanto umane, con l’evolversi dei tempi e il mutare delle necessità, possono venire meno e in certi
casi debbono venire meno quando, avendo esaurito la loro funzione storica, il loro permanere sarebbe di intralcio al progredire della Chiesa verso il Regno di Dio.
Qui in certi casi possiamo ed anzi dobbiamo avere rottura, si trattasse anche di tradizioni secolari ed un tempo utili e provvidenziali. Qui abbiamo una pluralità di tradizioni, e diversamente
non potrebbe essere, così come tra gli uomini variano le mentalità, le preferenze, le qualità, le capacità.
Ma la Chiesa, quando, nel suo cammino storico di approfondimento della Parola di Dio, si accorge che certe abitudini o certe tradizioni sono divenute di intralcio e non sono veramente conformi al
Vangelo, essa le abbandona e sbaglierebbe se non lo facesse. Ma peraltro in questo campo la Chiesa non è infallibile. È il campo della pastorale, del diritto, della disciplina, degli usi sociali
e liturgici.
Le verità contenute nella Tradizione apostolica sono sempre le stesse. Il Magistero della Chiesa, nel prosieguo dei secoli, col suo insegnamento dogmatico che si esprime soprattutto nei Concili,
non aggiunge nulla, non toglie nulla, non cambia nulla, non pratica nessuna rottura, perché operazioni di tal genere vorrebbero dire automaticamente smentita o falsificazione del deposito
rivelato, cosa che non può avvenire perché Cristo ha promesso alla Chiesa di assisterla sempre insieme col suo Spirito nella fedeltà alla Verità. Il deposito rivelato, dunque, non può mutare.
Muta invece, nel senso di progredire, la conoscenza che la Chiesa ne acquisisce nel corso dei secoli sulla base della ricerca teologica e dell’esperienza stessa del Popolo di Dio.
Credere, come fanno i modernisti o gli storicisti, che in campo dogmatico la Chiesa abbia cambiato o soppresso qualcosa è quella eresia che già san Pio X condannò in quanto fondata sull’idea che
non esista una verità immutabile neppure nel campo della fede, ma che ogni verità per sua natura muti col mutare stesso dell’uomo: "veritas filia temporis".
Noi cattolici siamo d’accordo con i fratelli ortodossi d’Oriente sull’esistenza di questa divina Tradizione, sulla sua immutabilità ed intangibilità e sul fatto che lo Spirito Santo assiste la
Chiesa nella conservazione del deposito rivelato. Ringraziamo con loro il Signore Gesù Cristo per avere in comune con loro i primi sette Concili, dove è stato irrevocabilmente definito il mistero
del Verbo Incarnato, una Persona in due Nature.
Ci addolora il fatto che essi non abbiano più ascoltato la voce del Vicario di Cristo, dopo la sciagurata divisione del 1054, dove non sono mancate le colpe da ambo le parti, ed è certo di grande
consolazione e speranza la soppressione reciproca delle scomuniche avvenuta ai tempi di Paolo VI. Ma resta ancora del cammino da fare e cioè il fatto che i nostri Fratelli orientali devono
comprendere nella fede che i Concili successivi alla separazione non hanno tradito la Tradizione o non hanno stabilito dottrine estranee alla stessa, ma non hanno fatto altro che svilupparne,
chiarirne ed esplicitarne la conoscenza, in perfetta continuità ed omogeneità con la Tradizione dei precedenti Concili e dei Santi Padri. "Continuità nel progresso".
In tal modo gli Orientali si trovano in una situazione che curiosamente assomiglia a quella dei lefevriani: la stessa mentalità, lo stesso errore: credere che un Concilio Ecumenico possa rompere
con la tradizione dogmatica precedente, pensare che le nuove dottrine di un Concilio Ecumenico siano in contraddizione con quelle precedenti e quindi siano false.
C’è tuttavia una differenza tra lefevriani ed orientali, che mentre questi hanno apprezzato lo sforzo ecumenico del Vaticano II, il quale, come lei nota opportunamente, ha recuperato antichissime
tradizioni liturgiche antecedenti la riforma di san Pio V, i lefevriani, forse per mancanza di conoscenza della storia della liturgia, non si rendono conto che il Vaticano II, al di là delle
modifiche che intendono avvicinare i fratelli protestanti, col recupero delle suddette tradizioni, ha mostrato un tradizionalismo ancor più radicale che è atto ad avvicinare i fratelli
ortodossi.
Inoltre è evidente un’altra differenza tra lefevriani ed orientali, che mentre i primi riconoscono il progresso dogmatico attuato da Roma nel Medioevo sino ad oggi, benchè escludano il Vaticano
II, i fratelli orientali dissidenti si mostrano incapaci di apprezzare l’utilizzazione che nel Medioevo è avvenuta del pensiero di Aristotele da parte di san Tommaso d’Aquino, utilizzazione che
ha consentito alla Chiesa cattolica di servirsi a sua volta del pensiero dell’Aquinate per formulare nuove dottrine dogmatiche, come per esempio quella dell’anima "forma corporis" (Concilio di
Vienne del 1312) o della Persona divina come Relazione sussistente, giusta il dettato del Concilio di Firenze ("In Deo omnia sunt unum, ubi non obviat relationis oppositio") o dell’immortalità
dell’anima (Concilio Lateranense V del 1513) o della transustanziazione (Concilio di Trento) o del concetto di teologia o di fede o di Dio come "una singularis substantia spiritualis"
(Concilio Vaticano I).
Ma sarebbe interessante il fatto che nel sec. XIV nel mondo bizantino ortodosso si è avuto anche lì un influsso cosciente e coltivato del pensiero di S.Tommaso, come per esempio nei fratelli
Demetrio e Procoro Cidone, dei quali ha pubblicato un dotto studio in tedesco il domenicano servo di Dio padre Tomas Tyn. In ciò era molto esperto anche lo storico domenicano tedesco Ambrogio
Eszer, già officiale della Santa Sede, morto qualche anno fa.
Infine vorrei osservare, a proposito del "Filioque", che gli orientali fanno male ad opporvisi, anche se bisogna riconoscere che il modo in cui è storicamente fu introdotta questa formula nel
Credo non fu un atto ecumenico. Tuttavia questa espressione è pur sempre di fede, è esplicitazione della Tradizione e della Scrittura.
Ciò tuttavia non impedisce a Roma di consentire ai fratelli dissidenti di astenersi dal pronunciarla nella loro liturgia, una volta che essi, guidati dallo Spirto Santo, saranno tornati nella
piena comunione con Roma.
Fr. Giovanni Cavalcoli, OP
Bologna, 21 giugno 2011
Traduction française par Charles de Pechpeyrou.
Congrégation pour le Clergé, Homélie pour la Trinité 2011 Année A
L'existence historique de Jésus-Christ, et particulièrement, comme nous l’avons vu les mois passés, le temps de sa Passion, de sa Mort et de sa Résurrection, a été vécue par lui au sein d'un dialogue d'Amour constant avec le Père. Sa mission, pourrions-nous dire, a été d'introduire ses amis, les disciples de toute époque, à la connaissance de celui qui l'avait envoyé, au moyen de l’action constante du Consolateur (Cfr Collecte).
Si nous ne partons pas de ce fait, tellement évident dans l'Écriture Sainte que beaucoup ne s’y arrêtent pas, nous ne pouvons pas comprendre qui est la Très Sainte Trinité ; pourtant, avant même d’être un Dogme de foi, elle est certainement un mystère dans lequel il faut être introduit.
Comment pourrait-on en effet connaître ce qui est impossible à définir ? Saint Augustin en a fait lui-même l’expérience lorsque, plongé dans la profondeur de ses méditations, sur les rivages de la mer Tyrrhénienne, il rencontra un enfant qui tentait avec ténacité de verser toute l'eau de la grande mer Méditerranée à l'intérieur d'un petit trou creusé dans le sable. Devant la stupeur du grand saint, l'enfant lui dit avec un sourire : « Et toi, comme peux-tu penser comprendre Dieu qui est infini, avec ton esprit tellement limité? ».
Mais ce qui pourrait sembler une défaite pour l'intelligence de l'homme, est en réalité le début d'un nouveau type de connaissance qui, comme la fleur la plus belle, peut croître sur la base solide de la raison humaine, en l'exaltant et en la portant à son achèvement : il s'agit de la foi !
Pour pouvoir connaître l'océan infini, en effet, la meilleure chose est de se laisser pousser sur la solide barque de Pierre, l'Église, par l'action de l'Esprit Saint : ce vent impétueux connaît la route à suivre.
La Très Sainte Trinité ne peut pas être comprise, mais on peut la voir en action et surtout on peut vivre en elle, depuis que Jésus nous a ouvert la porte du Royaume des cieux. Il faut donc entrer « dans ce nuage » à travers lequel Dieu se révèle à l'homme, en faisant de lui son héritage (Cfr Ex 34,5.9).
C’est l'incorporation au Christ qui rend possible en nous cette action de l'Esprit : nous ne saurions même pas que dire, si nous n'avions pas reçu en nos « coeurs l'Esprit du Fils, qui crie Abba, Père » (Cfr. Antienne à la Communion).
La Vérité de Dieu, nous le comprenons en ce dimanche, n'est donc pas tant une abstraction philosophique à posséder, qu’une réalité d'Amour infini en laquelle il faut se laisser plonger et dont il faut faire l’expérience, comme des fils régénérés dans le Fils, constamment tournés vers le Père céleste qui veut nous offrir « le salut » et « la vie éternelle » (Cfr Jn 3,16-17).
Laissons-nous donc transformer par le Pain eucharistique que nous recevrons d’ici peu, en un « sacrifice éternel », agréable au Seigneur (Cfr Prière sur les offrandes), pour que notre vie soit conformée à celle du Christ, et commençons par cultiver en nous « ses propres sentiments » (Cfr. 2Cor 13.11).
Homélie pour la Solennité de la Trinité A
Homélie Trinité A 2008 : L'amour n'est pas aimé (Jn 3, 16-18)
Le Père Jean-Côme About commente l'Évangile du dimanche 19 juin, fête de la Sainte Trinité. Évangile selon saint Jean, chapitre 3, versets 16 à 18.
« Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle ».
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La fête de la Sainte Trinité que nous célébrons aujourd’hui nous plonge dans le cœur de la révélation chrétienne. En effet, les personnes qui la constituent n’ont jamais été explicitement unies
dans l’ancien Testament et la communion que Jésus nous révèle va nous inviter à vivre de cette révélation.
La première lecture nous rappelle le nom que Dieu se donne à lui-même en passant devant Moïse sur le Sinaï : « Yahvé, la Seigneur, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour
et de fidélité ». Sa révélation concerne la découverte de ses commandements, de son pardon et de sa fidélité. L’alliance unit l’homme et Dieu par une implication mutuelle.
L’Esprit, lui, est mentionné dès la Genèse lors de la création comme l’ordonnateur des éléments, faisant passer du chaos à l’ordre voulu par Dieu et où la vie peut prendre corps. Il agira dans le
même ordre, en inspirant tant de prophètes, pour rediriger le chemin du peuple, égaré dans le chaos de cultes voisins sacrilèges, vers la bonté et la fidélité du Dieu unique.
La venue d’un envoyé, du « oint de Dieu », d’un enfant né d’une vierge apparait dans le même temps prophétique et donne l’espérance d’un nouveau Messie, d’un nouveau Moïse.
Mais le récit biblique semble indiquer ces pistes en des figures non encore pleinement reliées entre elles.
La venue du Christ va offrir aux hommes la pleine révélation de la communion intra trinitaire.
L’évangile nous y introduit : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. Car Dieu a envoyé
son Fils dans la monde, non pas pour juger le monde, mais pour que par lui, le monde soit sauvé ».
Ces quelques mots nous invitent à comprendre que Dieu est unité, fondé par Dieu le Père, dans le Fils par l’Esprit. Chacun agit en lui-même en une manifestation particulière qui se tient
constamment au service de la plénitude de l’unité.
Ainsi le Fils est devenu homme non de sa propre initiative, mais porté par le Saint-Esprit dans le sein de la Vierge ; Il est par avance aussi bien un homme véritable issu de Marie que celui qui
porte l’Esprit dans tout son agir, jusqu’à la croix.
Là, où il a accompli dans l’obéissance au Père, toute sa mission, il exhale dans la mort, son Esprit. Et cet Esprit, il reçoit pouvoir d’en disposer en communion avec le Père en tant que
ressuscité par la volonté du Père.
Il insuffle alors à l’Église l’Esprit de son unité avec le Père d’abord dans le silence de la cène jusqu’aux apparitions, puis, dans l’éclatement du feu et de la tempête, audibles et visibles
pour tous, à partir de la Pentecôte.
L’Esprit, présence du Père et du Fils dans notre monde, nous offre l’unité dans notre propre vie. Dans le silence et la manifestation, il agit dans son Église. Il agit en nous, ses
membres.
Cette révélation est unique, et Dieu a choisi de passer par nous pour l’annoncer : que nos cœurs ne cessent pas de vivre et de proclamer le salut qu’accomplit la Sainte Trinité.
Lectures Solennité de la Très Sainte Trinité A
Evangile de Jésus-Christ selon saint Jean (Jn 3, 16-18)
3
16i Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle.
17 Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé.
18 Celui qui croit en lui échappe au Jugement, celui qui ne veut pas croire est déjà jugé, parce qu'il n'a pas cru au nom du Fils unique de Dieu.
Lien vers les autres lectures
Un "grand déçu" rompt le silence. Par un appel au pape
Les maux de l'Église et la "voie surnaturelle" pour les guérir, présentés dans un manifeste choc écrit par Enrico M. Radaelli, philosophe de l'esthétique et défenseur de la Tradition. Douzième chapitre d'une discussion qui est loin d'être terminée
ROME, le 16 juin 2011 – Parmi les "grands déçus" du pape Benoît XVI cités dans un article que www.chiesa a publié il y a
deux mois, il en est un qui ne s’était pas encore exprimé jusqu’à maintenant.
En effet cet article a été le point de départ d’une discussion savante et passionnée à propos du magistère de l’Église, de la question de savoir s’il peut ou non changer son enseignement et
comment, avec une référence particulière aux tournants du concile Vatican II. Discussion dans laquelle sont intervenus des chercheurs de diverses tendances.
Mais pas, jusqu’à maintenant, le professeur Enrico Maria Radaelli, philosophe de l'esthétique, disciple de celui qui a été l’un des plus grands penseurs traditionalistes du XXe siècle, le Suisse
Romano Amerio (1905-1997).
Radaelli, à en juger principalement par son dernier livre, "La beauté qui nous sauve", est certainement l’un des plus "déçus" par le magistère des papes du concile et de l’après-concile, y
compris le pape actuel.
Radaelli reproche à ces papes et à la hiérarchie catholique dans son ensemble d’avoir abdiqué le plein exercice du magistère, fait de définitions et de condamnations claires, au nom d’une vague
"pastorale" qui aurait laissé libre cours à la confusion et aux erreurs.
Cependant cette déception n’empêche pas Radaelli de continuer à espérer un retour de l’Église à la plénitude de son "munus docendi", en premier lieu grâce au pape Joseph Ratzinger.
Dans le texte reproduit ci-dessous – par lequel il met fin à son silence dans le présent débat – Radaelli condense à la fois son diagnostic des maux de l’Église d'aujourd’hui et la "voie
surnaturelle" qui peut les guérir, avec une proposition qu’il fait au "Trône le plus élevé", c’est-à-dire au pape.
C’est une proposition dont Radaelli dit qu’elle est à la fois "de Tradition et d’audace" et qu’il intègre désormais dans son livre "La beauté qui nous sauve", comme sa contribution
essentielle.
Le site www.chiesa a consacré à ce livre l’article suivant :
> Seule la beauté nous
sauvera (6.6.2011)
Mais avant de laisser la parole à Radaelli, il est utile de récapituler tous les précédents chapitres de la discussion, dans laquelle sont intervenus à plusieurs reprises Francesco Arzillo, Inos
Biffi, Agostino Marchetto, Martin Rhonheimer, Roberto de Mattei, David Werling, Giovanni Cavalcoli, Massimo Introvigne, Basile Valuet, Stefano Ceccanti, Alessandro Martinetti, Giovanni Onofrio
Zagloba.
Dans l’ordre, sur www.chiesa :
> Les grands déçus du pape
Benoît (8.4.2011)
> Les déçus ont parlé. Le Vatican
répond (18.4.2011)
> Qui trahit la tradition ? Le grand
débat (28.4.2011)
> L'Église est infaillible mais Vatican II ne l'est
pas (5.5.2011)
> Benoît XVI "réformiste". La parole est à la
défense (11.5.2011)
> Liberté religieuse. L'Église avait-elle raison même quand elle la condamnait?(26.5.2011)
S’y ajoutent, sur le blog SETTIMO CIELO qui accompagne www.chiesa :
> La Chiesa può cambiare la sua dottrina? La parola a Ceccanti e a Kasper(29.5.2011)
> Ancora su Stato e Chiesa. Dom Valuet risponde a
Ceccanti (30.5.2011)
> Padre Cavalcoli scrive da Bologna. E chiama in causa i
"bolognesi"(31.5.2011)
> Può la Chiesa cambiare dottrina? Il professor "Zagloba"
risponde (6.6.2011)
> Tra le novità del Concilio ce n'è qualcuna infallibile? San Domenico dice di sì(8.6.2011)
Après calcul, cet article est le douzième chapitre d’une discussion qui est loin d’être terminée.
Sandro Magister
Une proposition pour les cinquante ans de Vatican II
LA VOIE SURNATURELLE POUR RAMENER LA PAIX ENTRE L’AVANT ET L’APRÈS CONCILE
par Enrico Maria Radaelli
Une discussion entre écoles de pensée différentes et opposées est actuellement en cours sur le site internet de Sandro Magister, pour savoir si le concile œcuménique Vatican II est en continuité
ou en discontinuité avec la Tradition. Or non seulement cette discussion me met directement en cause depuis ses débuts, mais elle touche de près certaines pages préliminaires de mon récent livre
"La beauté qui nous sauve".
Le point de loin le plus significatif de cet essai est l’identification prouvée des “origines de la beauté” avec les quatre qualités substantielles – vrai, un, bon, beau – dont saint Thomas
d'Aquin dit que ce sont les noms du Fils unique de Dieu : identification qui devrait mettre en évidence une fois pour toutes le lien fondamental et incontournable qui existe entre un concept et
son expression, autrement dit entre le langage et la doctrine qui l’utilise.
Je crois devoir intervenir et apporter ainsi quelques éclaircissements à ceux qui veulent reconstruire cette "Cité de la beauté" qu’est l’Église et reprendre ainsi l’unique voie (c’est la thèse
de mon essai) qui puisse nous conduire au bonheur éternel, c’est-à-dire qui puisse nous sauver.
Je complèterai mon intervention en indiquant qu’il vaudrait la peine de demander au Saint-Père que, puisque 2015 marquera, je le rappelle avec Mgr Brunero Gherardini, le cinquantième
anniversaire du concile (cf. "Divinitas", 2011, 2, p. 188), l’Église tout entière profite de cet événement extraordinaire pour restaurer la plénitude de ce "munus docendi", de ce magistère, qui a
été suspendu il y a cinquante ans.
En ce qui concerne le sujet de la discussion en cours, la question a été bien résumée par le théologien dominicain Giovanni Cavalcoli : "Le nœud du débat est ici. En effet nous sommes tous
d’accord pour estimer que les doctrines déjà définies [par le magistère dogmatique de l’Église d’avant le Concile] qui sont présentes dans les textes conciliaires sont infaillibles. Ce qui est en
discussion, c’est le point de savoir si les développements doctrinaux, les nouveautés du concile, sont également infaillibles".
Le dominicain constate en effet qu’il est nécessaire de "répondre affirmativement à cette question, parce que, sinon, qu’en serait-il de la continuité, tout au moins telle que l’entend le pape
?". Et parce qu’il ne peut pas affirmer, comme il est évident, ce qu’il voudrait pourtant affirmer, le père Cavalcoli transforme ces affirmations en questions opposées, auxquelles je donnerai ici
la réponse qu’elles recevraient si l’on suivait la logique "aléthique", fondée sur la vérité, qui nous est enseignée par la philosophie.
Première question : Est-il admissible que le développement d’une doctrine de foi ou proche de la foi déjà définie soit faux ?
Cher père Cavalcoli, en vérité vous auriez bien voulu dire : "Il n’est pas admissible que le développement d’une doctrine de foi ou proche de la foi déjà définie soit faux". Et pourtant la
réponse est : oui, ce développement peut être faux, parce qu’une prémisse vraie ne conduit pas nécessairement à une conclusion vraie ; elle peut également conduire à une ou plusieurs
conclusions fausses. C’est ainsi que tous les conciles du monde – y compris les conciles dogmatiques – ont donné lieu, justement en raison de cette possibilité, à la confrontation des opinions
les plus contradictoires. Pour obtenir le développement en continuité des vérités révélées par grâce que l’on espère, il ne suffit pas d’être théologien, évêque, cardinal ou pape. Il faut
demander l’aide spéciale, divine, que le Saint-Esprit ne donne qu’aux conciles qui, leur caractère dogmatique ayant été proclamé solennellement et indiscutablement dès leur ouverture, se sont
formellement assuré cette aide divine. Dans ces cas surnaturels, le développement donné à la doctrine surnaturelle sera garanti comme véridique autant que ses prémisses ont déjà été divinement
garanties comme véridiques.
Cela n’a pas été le cas au dernier concile, dont le caractère strictement pastoral a été formellement affirmé à trois reprises au moins : à son ouverture, qui est ce qui compte, puis à
l’ouverture de sa seconde session et enfin à sa clôture. Voilà pourquoi, dans cette assemblée, on a parfois pu, à partir de prémisses vraies, aboutir aussi à des conclusions au moins discutables
(à des conclusions qui, canoniquement parlant, rentrent dans le IIIe degré de contrainte magistérielle, celui qui, traitant des questions à caractère moral, pastoral ou juridique, demande
uniquement le "respect religieux") quand elles n’étaient pas "carrément erronées", comme le père Cavalcoli lui-même le reconnaît, en contradiction avec sa thèse principale, "et en tout cas pas
infaillibles", et qui, par conséquent, "peuvent également être modifiées", de sorte que, même si, malheureusement, elles ne lient pas formellement mais "seulement" moralement le pasteur qui les
enseigne, même dans les cas de création incertaine, providentiellement elles n’impliquent pas obligatoirement l’obéissance des fidèles.
Par ailleurs, si à des degrés différents de magistère on ne fait pas correspondre des degrés différents d’assentiment des fidèles, on ne comprend pas à quoi servent les différents degrés de
magistère. Les différents degrés de magistère sont dus aux différents degrés de proximité de connaissance qu’ils ont avec la réalité première, avec la réalité divine révélée à laquelle ils se
réfèrent, et il est évident que les doctrines révélées directement par Dieu requièrent un respect totalement contraignant (Ier degré), ainsi que les doctrines connexes à celles-ci si elles sont
présentées à travers des définitions dogmatiques ou des actes définitifs (IIe degré). Aussi bien les premières que les secondes se distinguent des autres doctrines qui, ne pouvant appartenir au
premier groupe, pourront être incluses dans le second seulement lorsque l’on aura déterminé par des arguments nombreux, prudents, clairs et irréfutables leur connexion intime, directe et évidente
avec celui-ci dans le respect le plus total du principe énoncé par Vincent de Lérins ("quod semper, quod ubique, quod ab omnibus creditum est"), garantissant ainsi au fidèle qu’elles se trouvent
elles aussi en présence de la connaissance la plus proche de Dieu. Tout cela, comme on peut le comprendre, ne peut être obtenu que dans l’exercice le plus conscient, le plus voulu et le plus
demandé par et sur l’Église du "munus", du magistère dogmatique.
La différence entre les doctrines de Ier et IIe degré et celles de IIIe degré est indiquée par le caractère certainement surnaturel des premières, caractère qui au contraire n’est pas garanti
dans le troisième groupe : peut-être existe-t-il, mais peut-être aussi n’existe-t-il pas. Ce qui doit être retenu, c’est que le "munus" dogmatique est : 1) un don divin, donc 2) un don qui doit
être demandé expressément et 3) un don qui, s’il n’est pas demandé, n’offre aucune garantie de vérité absolue, ce manque de garantie dégageant le magistère de toute obligation d’exactitude et les
fidèles de toute obligation d’obéissance, tout en leur demandant le respect religieux. Dans le IIIe degré il pourrait y avoir des indications et des conjectures de souche naturaliste, et l’examen
permettant de vérifier si, une fois épurées d’éventuelles contaminations microbiennes, elles peuvent être élevées au degré surnaturel, ne peut être réalisé qu’en les soumettant au feu dogmatique
: la paille brûlera, mais le fer divin, s’il y en a, resplendira certainement de tout son éclat.
C’est ce qui est arrivé aux doctrines de l’Immaculée Conception et de l’Assomption, qui sont aujourd’hui des dogmes, c’est-à-dire des articles de foi appartenant de droit au deuxième groupe.
Jusqu’à 1854 et 1950 respectivement, elles ont appartenu au troisième groupe, celui des doctrines discutables, auxquelles on ne devait rien d’autre que le "respect religieux", au même titre que
ces doctrines nouvelles, mentionnées ici en un inventaire bref et sommaire que l’on trouvera plus loin, qui se sont entassées dans l’enseignement le plus récent de l’Église à partir de 1962. Mais
en 1854 et en 1950 le feu du dogme les a entourées de sa marque divine et particulière, il les a enflammées, il les a examinées, il les a imprimées et enfin il les scellées pour l’éternité telles
qu’elles étaient déjà "ab initio" dans leur réalité la plus intime : des vérités tout à fait certaines et universellement démontrées, appartenant donc de droit à la souche surnaturelle (la
seconde) même si, jusqu’alors, elles n’avaient pas été formellement reconnues sous cette forme splendide. Heureuse reconnaissance, et on veut souligner ici justement que ce fut une reconnaissance
de ceux qui étaient là, en premier lieu le pape, et pas du tout une transformation du sujet : comme lorsque les critiques d’art, après l’avoir étudiée à tous les points de vue et en utilisant
tous les indices permettant de la confirmer ou de la démentir – certificats de provenance, de changement de propriétaire, tests de pigmentation, de patine, de repentirs, radiographies et
réflectographies – reconnaissent l’indiscutable et éclatante authenticité d’un tableau de maître.
Ces deux doctrines se sont révélées l’une comme l’autre de création divine, et de la plus précieuse. Si donc l’une de ces doctrines plus récentes provient de la même main très haute, on le
constatera paisiblement par le plus splendide des moyens.
Deuxième question : Le nouveau domaine dogmatique peut-il être en contradiction avec l’ancien ?
Évidemment non, il ne le peut en aucune manière. En effet, après Vatican II, nous n’avons aucun "nouveau domaine dogmatique", selon l’expression du père Cavalcoli, même si beaucoup de gens
voudraient faire passer pour tel les nouveautés conciliaires et postconciliaires, alors que Vatican II est un "domaine pastoral" simple tout en étant solennel et extraordinaire. Aucun des
documents évoqués par dom Basile Valuet dans sa note 5 n’attribue au concile une autorité plus grande que celle dont il a été investi dès le début : rien d’autre qu’une assemblée “pastorale”
solennelle et universelle, c’est-à-dire œcuménique, qui s’était donné comme objectif d’apporter au monde quelques indications uniquement pastorales, se refusant clairement et ostensiblement
à donner des définitions dogmatiques ou à lancer des anathèmes.
Tous les leaders néo-modernistes ou simplement novateurs que l’on pourrait citer qui furent (comme le remarque le professeur Roberto de Mattei dans son livre "Le concile Vatican II. Une histoire
jamais écrite") actifs dans l’Église dès le temps de Pie XII – théologiens, évêques et cardinaux de la "théologie nouvelle" comme Bea, Câmara, Carlo Colombo, Congar, de Lubac, Döpfner, Frings et
son expert, Ratzinger ; König et le sien, Küng ; Garrone et le sien, Daniélou ; Lercaro, Maximos IV, Montini, Suenens, et, formant presque un groupe, les trois leaders de ce que l’on appelle
l’école de Bologne : Dossetti, Alberigo et aujourd’hui Melloni – ont enjambé grâce à toutes sortes d’expédients, pendant et après Vatican II, la rupture avec les doctrines antérieures détestées
en partant du même présupposé, c’est-à-dire en équivoquant sur l'indiscutable solennité de la réunion extraordinaire ; c’est pourquoi tous ces gens ont réalisé de fait une rupture et une
discontinuité tout en parlant de permanence et de continuité. Qu’il y ait eu de leur part et aujourd’hui de manière généralisée un désir de rupture avec la Tradition, cela apparaît au moins : 1)
dans la plus terrible destruction jamais perpétrée sur les splendeurs des autels anciens ; 2) dans le refus actuel de tous les évêques du monde, à l’exception d’un tout petit nombre, d’accorder
la moindre place au rite tridentin ou grégorien de la messe, ce qui est une désobéissance bornée et affichée aux directives du motu proprio "Summorum Pontificum". "Lex orandi, lex credendi" : si
tout cela n’est pas un rejet de la Tradition, alors qu’est-ce que c’est ?
Malgré ces faits et leur gravité, on ne peut encore parler en aucune manière de rupture : l’Église est "tous les jours" sous la divine garantie donnée par le Christ dans les promesses qui
figurent en Matthieu 16, 18 ("Portæ inferi non prævalebunt") et Matthieu 28, 20 ("Ego vobiscum sum omnibus diebus"), ce qui la met métaphysiquement à l’abri de toute crainte à cet égard, même si
le danger est toujours à nos portes et s’il y a souvent des tentatives en cours. Mais ceux qui affirment qu’une rupture a eu lieu – ce que font certains des leaders précédemment cités, mais
également les sédévacantistes – tombe dans le naturalisme.
Toutefois on ne peut pas non plus parler de permanence, c’est-à-dire de continuité avec la Tradition, parce que tout le monde peut constater que les doctrines les plus diverses qui sont nées du
concile et après lui – ecclésiologie ; panœcuménisme ; rapports avec les autres religions ; similitude du Dieu adoré par les chrétiens, par les juifs et par les musulmans ; correction de la
“doctrine du remplacement” de la Synagogue par l’Église en “doctrine des deux saluts parallèles” ; unicité des sources de la Révélation ; liberté religieuse ; anthropologie anthropocentrique et
non pas théocentrique ; iconoclasme ; ou celle dont est issu le "Novus Ordo Missæ" au lieu du rite grégorien (aujourd’hui remis à côté du premier, mais dans une position subordonnée) – sont
toutes des doctrines qui, prises une par une, ne soutiendraient pas l’épreuve du feu du dogme, si l’on avait le courage d’essayer de les présenter comme dogmes : feu qui consiste à leur donner
une substance théologique par une demande précise d’aide du Saint-Esprit, comme ce fut le cas en son temps pour le "corpus theologicum" sur lequel reposent l’Immaculée Conception ou l’Assomption
de la Vierge Marie.
Ces doctrines fragiles sont vivantes uniquement parce qu’aucune barrière dogmatique n’est dressée pour empêcher leur conception et leur utilisation. Mais ensuite on leur attribue une fausse
continuité avec le dogme pour essayer d’obtenir en leur faveur l’assentiment de foi nécessaire à l’unité et à la continuité (cf. les pages 70 et suivantes, 205 et 284 de mon livre cité ci-dessus
"La beauté qui nous sauve") et, de ce fait, elles restent toutes sur une dangereuse et "fragile frontière entre continuité et discontinuité" (p. 49), mais toujours en deçà de la limite dogmatique
qui déterminerait en effet leur fin si on l’appliquait. Même l’affirmation selon laquelle il y a continuité entre ces doctrines et la Tradition pèche, à mon avis, par naturalisme.
Troisième question : si nous nions l’infaillibilité des développements doctrinaux du concile qui partent de doctrines de foi précédentes ou proches de la foi, est-ce que nous
n’affaiblissons pas la thèse de la continuité ?
Bien sûr que vous l’affaiblissez, cher père Cavalcoli, ou plutôt vous l’anéantissez. Et vous donnez de la force à la thèse inverse, comme de juste, à savoir qu’il n’y a pas de continuité.
Pas de rupture, mais pas non plus de continuité. Alors quoi ? Une porte de sortie est suggérée par Romano Amerio (1905-1997) avec ce que l’auteur de "Iota unum" appelle "la loi de la conservation
historique de l’Église", reprise à la p. 41 de mon essai, selon laquelle "l’Église ne se perd pas si elle n’'équilibre' pas la vérité, mais si elle 'perd' la vérité". Et quand l’Église
n’équilibre-t-elle pas la vérité ? Quand ses enseignements l’oublient, ou l’embarrassent, la troublent, la mélangent, comme cela s’est produit (ce n’est ni la première ni la dernière fois) depuis
le concile jusqu’à aujourd’hui. Et quand perdrait-elle la vérité ? (Au conditionnel : on a vu qu’elle ne peut en aucune manière la perdre). Seulement si elle la frappait d’anathème, ou si
inversement elle faisait un dogme d’une doctrine fausse, ce que pourrait faire le pape et lui seul, si (dans l’hypothèse métaphysiquement impossible selon laquelle) ses lèvres formulant des
dogmes et des anathèmes n’étaient pas surnaturellement scellées par les deux promesses de Notre Seigneur citées précédemment. Je voudrais insister sur ce point, qui me paraît décisif.
Ici on avance des hypothèses mais – comme je le dis dans mon livre (p. 55) – "en confiant à la compétence des pasteurs toutes les vérifications du fait et toutes les conséquences ultérieures, par
exemple pour savoir si quelqu’un, et éventuellement qui et dans quelle mesure, s’est engagé ou s’engage actuellement" dans les actes qui ont eu lieu. Dans les toutes premières pages de mon livre
j’explique notamment comment on ne peut pas élever les bords du fleuve d’une beauté salvatrice sans débarrasser l’esprit de toute équivoque, de toute erreur ou de tout malentendu : la beauté est
accompagnée uniquement par la vérité (p. 23) et on ne peut pas recommencer à produire du beau dans l’art, tout au moins dans l’art sacré, sans travailler dans le vrai de l’enseignement et de
l’acte liturgique.
Ce qui est perpétré dans l’Église depuis cinquante ans, selon moi, c’est un amalgame recherché entre continuité et rupture. C’est le gouvernement étudié des idées et des intentions fausses en
lequel l’Église s’est changée sans la changer, sous le couvert (ce que Mgr Gherardini a clairement montré dans ses derniers livres) d’un magistère volontairement suspendu – à partir du discours
d’ouverture du concile "Gaudet mater ecclesia" – sous une forme pas du tout naturelle et complètement inventée, qualifiée, avec une imprécision théologique recherchée, de “pastorale”. L’Église
s’est vidée des doctrines peu ou pas adaptées à l’œcuménisme et pour cette raison mal vues par les leaders d’opinion cités plus haut et elle s’est remplie de leurs idées œcuméniques. Cela s’est
fait sans toucher en aucune manière à leur forme métaphysique, qui est dogmatique par nature (cf. p. 62), c’est-à-dire surnaturelle par nature, mais en travaillant uniquement sur ce domaine de
son magistère qui agit uniquement sur sa "conservation historique".
Autrement dit, il n’y a pas de rupture formelle et d’ailleurs pas non plus de continuité formelle, uniquement parce que les papes des cinquante dernières années se refusent à ratifier sous la
forme dogmatique de IIe degré les doctrines de IIIe degré qui, sous leur pontificat, dévastent et vident l’Église (cf. p. 285). Cela veut dire que, de cette façon, l’Église n’équilibre plus la
vérité, mais qu’elle ne la perd pas non plus, parce que les papes, même à l’occasion d’un concile, se sont formellement refusé aussi bien à élever au rang de dogmes les nouvelles doctrines qu’à
frapper d’anathème les doctrines antérieures, même si celles-ci étaient déconsidérées (ou corrigées ou manipulées).
Comme on le voit, on pourrait également considérer que cette situation très fâcheuse constitue un péché du magistère, un péché grave, à la fois contre la foi et contre la charité (p. 54) : en
effet il ne semble pas que l’on puisse désobéir au commandement du Seigneur d’enseigner les nations (cf. Matthieu 28, 19-20) avec toute la plénitude du don de connaissance qui nous a été accordé,
sans par ce fait "dévier de la rectitude que l’acte – c’est-à-dire 'l'‘enseignement éducatif de la juste doctrine – doit avoir" (Summa Theologiae I, 25, 3, ad 2). Péché contre la foi parce que
celle-ci est mise en danger, et en effet l’Église, au cours des cinquante dernières années, s’étant vidée de doctrines vraies, s’est vidée de ses fidèles, de ses religieux et de ses prêtres,
devenant l’ombre d’elle-même (p. 76). Péché contre la charité parce que l’on enlève aux fidèles la beauté de l’enseignement magistériel et visuel dont seule la vérité resplendit, comme je le
montre dans tout le second chapitre de mon livre. Ce serait un péché par omission : le péché d’"omission du caractère dogmatique propre à l’Église" (pp. 60 et suivantes), par lequel l’Église,
volontairement, ne scellerait pas surnaturellement et donc ne garantirait pas les indications qu’elle nous donne à propos de la vie.
Cet état de péché dans lequel tomberait la sainte Église (on entend toujours par là : quelques hommes de la sainte Église, ou bien l’Église dans sa composante historique), s’il était constaté,
devrait cesser et être lavé au plus tôt par la pénitence puisque, comme le cardinal José Rosalio Castillo Lara l’écrivait au cardinal Joseph Ratzinger en 1988, son actuel maintien obstiné et
coupable "favoriserait la tendance blâmable […] à un gouvernement équivoque dit 'pastoral' qui, au fond, n’est pas pastoral parce qu’il conduit à négliger le nécessaire exercice de l’autorité au
détriment du bien commun des fidèles" (pp. 67 et suivantes).
Pour rendre à l’Église l’égalité avec la vérité, comme elle lui a été rendue à chaque fois qu’elle s’est trouvée dans de telles difficultés dramatiques, il n’y a pas d’autre moyen que de revenir
à la plénitude de son "munus docendi", en faisant passer au crible du dogme à 360 degrés toutes les fausses doctrines dont elle est aujourd’hui imprégnée, et de reprendre comme "habitus" de son
enseignement le plus ordinaire et le plus pastoral (au sens strict du terme : "transmission de la Parole divine dans les diocèses et les paroisses du monde entier") l’attitude dogmatique qui l’a
conduite de manière surnaturelle au cours des siècles jusqu’à maintenant.
En restaurant la plénitude magistérielle qui a été suspendue, on rendrait à l’Église historique l’essence métaphysique qui lui a été virtuellement retirée et ainsi on ferait revenir sur terre sa
beauté divine dans toute sa fragrance la plus reconnue et la plus savourée.
Pour conclure, une proposition
Il faut de l’audace. Et il faut la Tradition. En vue de l’échéance de 2015, cinquantième anniversaire du concile de la discorde, il faudrait pouvoir adresser une forte et large demande au Trône
le plus élevé de l’Église pour que, dans sa bonté, ne négligeant pas l’occasion vraiment spéciale que constitue cet anniversaire exceptionnel, il considère qu’il y a un seul acte qui pourrait
réconcilier l’enseignement et la doctrine donnés par l’Église avant et après la fatale assemblée. Cet acte unique, héroïque, très humble, est d’approcher du feu surnaturel du dogme les doctrines
évoquées ci-dessus et qui sont mal vues par les fidèles de tendance traditionaliste, et celles qui en sont l’opposé : ce qui doit brûler brûlera, ce qui doit resplendir resplendira. D’ici à 2015,
nous avons plus de trois ans devant nous. Il faut les utiliser au mieux. Les prières et les intelligences doivent être portées à la pression maximale et chauffées à blanc. Sans tension, on
n’obtient rien, comme à Laodicée.
Cet acte que l’on propose d’accomplir, le seul qui pourrait réunir à nouveau en un corps unique, comme cela doit être, ces deux âmes puissantes qui palpitent dans la sainte Église et dans le même
être, reconnaissables l’une dans les hommes "fidèles spécialement à ce qu’est l’Église", l’autre dans les hommes dont l’esprit est davantage tourné vers son avenir, est l’acte qui, mettant fin
par une belle décision à cinquante ans d’une situation plutôt contraire à la charité et également dénuée de sincérité, résume en un gouvernement surnaturel les saints concepts de Tradition et
d’audace. Pour reconstruire l’Église et produire à nouveau de la beauté, le concile œcuménique Vatican II doit être lu selon la grille de la Tradition avec l’audace enflammée du dogme.
Il faut donc que tous les traditionalistes de l’Église, à quelque ordre et degré et à quelque tendance idéologique qu’ils appartiennent, sachent se réunir autour d’une seule demande, d’un seul
projet : arriver à 2015 avec l’invitation la plus vaste, la mieux guidée et définie afin que cet anniversaire soit pour le Trône le plus élevé la meilleure occasion pour restaurer le divin "munus
docendi" dans sa plénitude.
Le livre d’Enrico Maria Radaelli "La bellezza che ci salva [La beauté qui nous sauve]" (préface d’Antonio Livi, 2011, 336 pages, 35,00 euros) peut être commandé directement à l'auteur
(enricomaria.radaelli@tin.it) ou à la Librairie Hoepli de Milan (www.hoepli.it).
Traduction française par Charles de Pechpeyrou.
Messe de la Pentecôte 2011 : Homélie de Benoît XVI
Chers frères et sœurs !
Nous célébrons aujourd’hui la grande solennité de la Pentecôte. Si, en un certain sens, toutes les solennités liturgiques de l’Eglise sont grandes, celle de la Pentecôte l’est d’une manière particulière, parce qu’elle marque, au bout de cinquante jours, l’accomplissement de l’événement de la Pâque, de la mort et de la résurrection du Seigneur Jésus, à travers le don de l’Esprit du Ressuscité. L’Eglise nous a préparés à la Pentecôte dans les jours précédents, à travers sa prière, avec l’invocation répétée et intense à Dieu pour obtenir une effusion renouvelée de l’Esprit Saint sur nous. L’Eglise a revécu ainsi ce qui est advenu à ses origines, lorsque les Apôtres, réunis au Cénacle de Jérusalem, « étaient assidus à la prière avec quelques femmes, dont Marie mère de Jésus, et avec ses frères » (Ac 1, 14). Ils étaient réunis dans l’attente humble et confiante que s’accomplisse la promesse du Père qui leur avait été communiquée par Jésus : « C’est dans l’Esprit Saint que vous serez baptisés sous peu de jours... vous allez recevoir une force, celle de l’Esprit Saint qui descendra sur vous » (Ac 1, 5.8).
Dans la liturgie de la Pentecôte, au récit des Actes des Apôtres sur la naissance de l’Eglise (cf. Ac 2, 1-11), correspond le Psaume 103 que nous avons écouté, une louange de toute la création, qui exalte l’Esprit Créateur qui a fait toute chose avec sagesse : « Que tes œuvres sont nombreuses, Seigneur ! toutes avec sagesse tu les fis, la terre est remplie de ta richesse... A jamais soit la gloire du Seigneur, que le Seigneur se réjouisse en ses œuvres ! » (Ps 103, 24.31). Ce que veut nous dire l’Eglise est ceci : l’Esprit créateur de toutes les choses, et l’Esprit Saint que le Christ a fait descendre du Père sur la communauté des disciples, sont un et identique : création et rédemption s’appartiennent réciproquement et constituent, en profondeur, un unique mystère d’amour et de salut. L’Esprit Saint est avant tout Esprit Créateur et donc la Pentecôte est aussi fête de la création. Pour nous chrétiens, le monde est le fruit d’un acte d’amour de Dieu, qui a fait toute chose et duquel Il se réjouit parce que « cela est bon », « cela est très bon », comme le dit le récit de la création (cf. Gn 1, 1-31). Dieu n’est pas le totalement Autre, innommable et obscur. Dieu se révèle, il a un visage, Dieu est raison, Dieu est volonté, Dieu est amour, Dieu est beauté. La foi dans l’Esprit Créateur et la foi dans l’Esprit que le Christ Ressuscité a donné aux Apôtres et donne à chacun de nous, sont alors inséparablement liées.
La deuxième lecture et l’Evangile d’aujourd’hui nous montrent ce lien. L’Esprit Saint est Celui qui nous fait reconnaître en Christ le Seigneur, et nous fait prononcer la profession de foi de l’Eglise : « Jésus est Seigneur » (cf. 1 Co 12, 3b). Seigneur est le titre attribué à Dieu dans l’Ancien Testament, titre qui dans la lecture de la Bible prenait la place de son nom imprononçable. Le Credo de l’Eglise n’est rien d’autre que le développement de ce qui est dit à travers cette simple affirmation : « Jésus est Seigneur ». De cette profession de foi, saint Paul nous dit qu’il s’agit précisément de la parole et de l’œuvre de l’Esprit. Si nous voulons être dans l’Esprit Saint, nous devons adhérer à ce Credo. En le faisant nôtre, en l’acceptant comme notre parole, nous accédons à l’œuvre de l’Esprit Saint. L’expression « Jésus est Seigneur » peut se lire dans les deux sens. Elle signifie : Jésus est Dieu, et dans le même temps : Dieu est Jésus. L’Esprit Saint éclaire cette réciprocité : Jésus a une dignité divine et Dieu a le visage humain de Jésus. Dieu se montre en Jésus et il nous donne ainsi la vérité sur nous-mêmes. Se laisser éclairer en profondeur par cette parole, tel est l’événement de la Pentecôte. En récitant le Credo nous entrons dans le mystère de la première Pentecôte : après le désordre de Babel, de ces voix qui crient l’une contre l’autre, a lieu une transformation radicale : la multiplicité se fait unité multiforme, à travers le pouvoir unificateur de la Vérité grandit la compréhension. Dans le Credo qui nous unit de tous les coins de la Terre, qui, à travers l’Esprit Saint, fait en sorte que l’on se comprenne même dans la diversité des langues, à travers la foi, l’espérance et l’amour, se forme la nouvelle communauté de l’Eglise de Dieu.
Le passage évangélique nous offre ensuite une merveilleuse image pour éclairer le lien entre Jésus, l’Esprit Saint et le Père : l’Esprit Saint est représenté comme le souffle de Jésus Christ ressuscité (cf. Jn 20, 22). L’évangéliste Jean reprend ici une image du récit de la création, là où il est dit que Dieu souffla dans les narines de l’homme une haleine de vie (cf Gn 2, 7). Le souffle de Dieu est vie. Aujourd'hui, le Seigneur souffle dans notre âme la nouvelle haleine de vie, l’Esprit Saint, son essence la plus intime, et il l’accueille de cette manière dans la famille de Dieu. A travers le baptême et la confirmation nous est fait ce don de manière spécifique, et à travers les sacrements de l’Eucharistie et de la pénitence, il se répète continuellement : le Seigneur souffle dans notre âme une haleine de vie. Tous les sacrements, chacun à leur manière, communiquent à l’homme la vie divine, grâce à l’Esprit Saint qui œuvre en eux.
Dans la liturgie d’aujourd’hui nous saisissons encore un lien supplémentaire. L’Esprit Saint est Créateur, il est en même temps Esprit de Jésus Christ, mais de façon à ce que le Père, le Fils et l’Esprit Saint soient un seul et unique Dieu. Et à la lumière de la première Lecture nous pouvons ajouter : l’Esprit Saint anime l’Eglise. Elle ne dérive pas de la volonté humaine, de la réflexion, de l’habileté de l’homme ou de sa grande capacité d’organisation, car s’il en était ainsi, elle se serait déjà éteinte depuis longtemps, comme toute chose humaine passe. L’Eglise en revanche est le Corps du Christ, animé par l’Esprit Saint. Les images du vent et du feu, utilisées par saint Luc pour représenter la venue de l’Esprit saint (cf. Ac 2, 2-3), rappellent le Sinaï, où Dieu s’est révélé au peuple d’Israël et lui avait concédé son alliance ; « la montagne du Sinaï était toute fumante – lit-on dans le Livre de l’Exode –, parce que le Seigneur y était descendu dans le feu » (19, 18). En effet, Israël fêta le cinquantième jour après Pâques, après la commémoration de la fuite d’Egypte, comme la fête du Sinaï, la fête du Pacte. Quand saint Luc parle de langues de feu pour représenter l'Esprit Saint, on rappelle l'antique Pacte, établi sur la base de la Loi reçue par Israël sur le Sinaï. Ainsi, l’événement de la Pentecôte est représenté comme un nouveau Sinaï, comme le don d’un nouveau Pacte où l’alliance avec Israël est étendue à tous les peuples de la Terre, où tombent toutes les barrières de l’ancienne Loi et apparaît son cœur le plus saint et immuable, c’est-à-dire l’amour, que l’Esprit Saint justement communique et diffuse, l’amour qui embrasse toute chose. Dans le même temps, la Loi s’élargit, s’ouvre, tout en devenant plus simple : c’est le Nouveau Pacte, que l’Esprit « écrit » dans les cœurs de ceux qui croient dans le Christ. L’extension du Pacte à tous les peuples de la Terre est représentée par saint Luc à travers une énumération de populations considérables pour l’époque (cf. Ac 2, 9-11). A travers une chose très importante nous est ainsi communiquée que l’Eglise est catholique dès le premier moment, que son universalité n’est pas le fruit de l’agrégation successive de différentes communautés. Dès le premier instant, en effet, l’Esprit Saint l’a créée comme l’Eglise de tous les peuples ; elle embrasse le monde entier, dépasse toutes les frontières de race, de classe, de nation : elle abat toutes les barrières et unit les hommes dans la profession du Dieu un et trine. Dès le début, l’Eglise est une, catholique et apostolique : c’est sa vraie nature et elle doit être reconnue comme telle. Elle est sainte non pas grâce à la capacité de ses membres, mais parce que Dieu lui-même, avec son Esprit, la crée, la purifie et la sanctifie toujours.
Enfin l’Evangile d’aujourd’hui nous offre cette très belle expression : « Les disciples furent remplis de joie à la vue du Seigneur » (Jn 20, 20). Ces paroles sont profondément humaines. L’Ami perdu est à nouveau présent, et qui était jusque là bouleversé se réjouit. Mais celle-ci nous dit bien davantage. Parce que l’Ami perdu ne vient pas d’un lieu quelconque, mais de la nuit de la mort : et Il l’a traversée ! Il n’est plus un parmi d’autres, mais il est l’Ami et en même temps Celui qui est la Vérité qui fait vivre les hommes ; et ce qu’il donne n’est pas une joie quelconque, mais c’est la joie même, don de l’Esprit saint. Oui, il est bon de vivre parce que je suis aimé, et c’est la Vérité qui m’aime. Les disciples furent remplis de joie, en voyant le Seigneur. Aujourd’hui, à la Pentecôte, cette expression nous est destinée aussi, parce que dans la foi nous pouvons Le voir ; dans la foi Il vient parmi nous et à nous aussi Il nous montre ses mains et son côté, et nous en sommes remplis de joie. C’est pourquoi nous voulons prier : Seigneur, montre-toi ! Fais-nous le don de ta présence, et nous aurons le don le plus beau : ta joie. Amen !
© Copyright du texte original plurilingue : Libreria Editrice Vaticana
Traduction : Zenit
Congrégation pour le clergé, Homélie pour la solennité de la Pentecôte Année A
Le cinquantième jour après Pâques, les Apôtres se retrouvèrent « tous ensemble » dans le Cénacle (Cfr. Ac 2.1) pour la fête juive de la Pentecôte, lors de laquelle on faisait mémoire du don, fait à Moïse sur la montagne du Sinaï, de la Torah, la Loi de Dieu. Aucun d'entre eux ne pouvait prévoir que, précisément ce jour, le Seigneur aurait accompli la promesse faite si souvent par Jésus lui-même concernant le Paraclet, c'est-à-dire l'Esprit Saint (Cfr. Jn 14.16).
À cette lumière, ce qui attire notre attention, outre les signes prodigieux qui se produisirent dans cette pièce, c’est donc le fait que des « Juifs fervents, de toutes les nations qui sont sous le ciel » purent les entendre dire dans leurs propres langues « les merveilles de Dieu » (Ac 2,5.11).
L'Esprit Saint est, au fond, un nouveau grand don, une nouvelle Loi, que Dieu fit d'abord à ceux qui avaient persévéré jusqu'à la fin : un don de grâce, non plus destiné à un groupe ethnique mais qui, comme l'air, doit nécessairement être communiqué à toutes les créatures qui sont dans le monde, parce que si « on leur enlève le souffle : ils meurent » (Cfr. Ps 103.29).
Après ce cinquantième jour, se clarifie la signification de l’invitation pressante que le Seigneur n'a jamais cessé d’adresser à chacun de nous : « La paix soit avec vous ! Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jn 20.21). Mais on comprend encore davantage comment, pour réaliser ce mandat, il est nécessaire « de recevoir l'Esprit Saint » (Cfr. Jn 20.22) qui, selon une autre comparaison, est comme l'eau : tout en restant la même, elle rend fertile la vie des disciples de Jésus, elle augmente la puissance de la spécificité de cette vie à travers une « manifestation particulière de l'Esprit en vue du bien commun » (1Cor 12.7).
Ainsi, l'adjectif « particulier » nous ramène encore au début de notre réflexion d'aujourd'hui : que signifie, pour nous aujourd'hui, « parler dans les différentes langues » et en quoi consiste la Loi nouvelle que Dieu a livrée à l'Église naissante ?
C’est encore la liturgie, le grand canal éducatif, le trésor de grâces dans les mains de l’Église elle-même, qui va éclairer ces questions.
La Loi nouvelle qui nous est remise en ce dimanche est la vie même de Dieu, qui est Amour : un amour qui n'a pas de barrières, même pas la mort, après que celle-ci ait été vaincue par le Crucifié : « Il leur montra ses mains et ses pieds » (Jn 20.20). Elle est un don qui nous porte directement dans le coeur de Dieu, et seul ce don peut nous peut donner la force nécessaire pour que « notre coeur s'allume du feu de son amour » (Cfr. Acclamation à l'Évangile).
Nous sommes donc appelés à désirer et à accueillir le don de l'Esprit Saint, parce que notre vie, avant même nos paroles, devienne un témoignage compréhensible, et donc crédible, aux yeux de nos si nombreux frères qui n'ont pas encore expérimenté la joie d'être chrétiens, afin que dans la Pentecôte renouvelée, eux aussi « stupéfaits et émerveillés » puissent en arriver à dire : « Nous les entendons proclamer les merveilles de Dieu » (Ac 2,7.11).
Les ordinations épiscopales illicites constituent un acte grave
Au cours des dernières décennies, des évêques ont été ordonnés dans certains pays sans mandat pontifical, c’est-à-dire de manière illicite. Le Saint-Siège publie à ce sujet une déclaration du Conseil pontifical pour les Textes législatifs, rappelant les normes prévues par le Code de droit canon.
Le document, qui répond à des demandes d’éclaircissements, rappelle les peines encourues par l’évêque ou les évêques qui ordonnent sans autorisation comme par celui qui reçoit cette ordination
illicite, à savoir l’excommunication automatique ; il rappelle que les fidèles du diocèse concerné sont autorisés à ne pas obéir à un évêque « illégal » ; mais il souligne aussi que des
circonstances atténuantes sont prévues, en particulier quand ceux qui commettent un tel délit agissent sous le coup d’une crainte grave, d’une nécessité ou d’un fort désagrément, comme la
violence physique. Ces circonstances atténuantes doivent toujours être vérifiées au cas par cas. Quoiqu’il en soit, étant donné le scandale, la division et le trouble que de telles situations
engendrent parmi les fidèles, les évêques concernés ont le devoir rétablir leur autorité grâce à des signes de communion et de pénitence appréciés de tous, faute de quoi leur gouvernement pourra
difficilement être perçu par le Peuple de Dieu comme la manifestation de la présence active du Christ dans son Église.
En clair, le texte invite à saisir la gravité d’une ordination épiscopale sans mandat pontifical qui blesse profondément la communion dans l’Église catholique et qui doit donc être sanctionnée.
Il reconnaît que certaines situations personnelles peuvent constituer des circonstances atténuantes qui doivent être vérifiées, et que de toute manière, les conséquences d’un tel geste exigent
des actes significatifs de reconstruction de la communion ecclésiale et de pénitence. Les personnes excommuniées et qui en sont conscientes, ne peuvent pas participer à l’Eucharistie, administrer
les sacrements et accomplir des actes de gouvernement. Enfin, si la situation l’exige, afin de réparer le scandale et de rétablir la communion, le Saint-Siège peut infliger des censures ou des
sanctions. De telles mesures ont toujours comme objectif de favoriser le repentir et la réconciliation. L’excommunication est levée dans les cas de repentir sincère. Pour les ordinations
épiscopales, l’absolution ne peut être donnée que par le Saint-Siège.
Éclairage Olivier Tosseri (Radio Vatican) : >>
Commentaire de l'Évangile du dimanche de la Pentecôte Année A
Mon homélie pour la Pentecôte Année A 2008 - À quand le Saint Esprit n° 1 à la SOFRES ?
Le Père Jean-Côme About commente l'Évangile du dimanche 12 juin, dimanche de la Pentecôte. Évangile selon saint Jean, chapitre 20, versets 19 à 23.
C'était après la mort de Jésus, le soir du premier jour de la semaine. Les disciples avaient verrouillé les portes du lieu où ils étaient, car ils avaient peur des Juifs. Jésus vint, et il
était là au milieu d'eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! »
Écoutez Radio Vatican : >>
Lire le commentaire :
Nous voici cinquante jours après Pâques et la Résurrection de Jésus a insufflé dans nos cœurs la joie de Dieu. Les Apôtres sont préparés à son départ et il leur promet la venue de l’Esprit Saint.
La première lecture de ce jour nous en fait le récit, montrant les multiples effets de cette présence et le courage dont ils sont désormais dotés.
L’évangile en saint Jean se situe juste après le lavement des pieds et dans son long discours d’adieu, Jésus parle de sa mort et du don du Paraclet. La dramatique est là : il doit passer vers le
Père et donc quitter ses disciples mais il ne les laisse pas vulnérables et seuls puis que le Paraclet sera donné à ceux qui l’aiment. L’Esprit Saint est caractérisé de deux
manières.
D’une part, il est paraclet, littéralement « Celui qui est appelé à l’aide », le Défenseur qui permettra aux chrétiens persécutés d’être inspirés d’un témoignage crédible. Mais il ne leur
épargnera pas la possibilité de la souffrance comme le Christ.
D’autre part, il est «L’esprit de vérité » qui enseignera la communauté chrétienne et lui permettra de se souvenir de Jésus lui-même, resté fidèle à sa mission jusqu’à la croix. De cette manière,
il donnera aux chrétiens menacés, du courage et leur fera trouver les mots justes face à ceux qui les jugent.
Ainsi nous est donné tout le sens de l’amour du Christ au travers de l’Esprit : Jésus a décidé d’aimer les siens quoiqu’il en coûte. Et c’est vraiment la question, l’enjeu qui nous est posé en ce
jour : Aimerai-je le Christ quoiqu’il en coûte ?
Si nous acceptons alors le Christ ne nous quittera plus ; mieux encore le Père se rendra présent : « Si quelqu’un m’aime, il restera fidèle à ma parole ; mon Père l’aimera, nous viendrons chez
lui, nous irons demeurer auprès de lui ».
En ce jour de Pentecôte, laissons la fidélité d’amour au Christ nous envahir par son Esprit.
Laissons nos cœurs ouverts aux dons du Défenseur :
Accueillons la SAGESSE, cette lumière intérieure de Dieu qui nous donne de regarder et de mesurer les choses de la création avec le regard aimant de Dieu.
Ouvrons-nous à l’INTELLIGENCE divine qui lit les choses de l’intérieur et petit à petit révèle le dessein de Dieu en éclairant toute activité humaine de la finalité limpide de son
amour.
Cultivons la SCIENCE de Dieu qui établit le rapport vrai entre le Créateur et ses créatures : nos limites sont bien là mais elles deviennent le lieu où prend corps l’infini de son
amour.
Embrassons son CONSEIL qui accroche sa vie en notre âme en l’illuminant sur ce qu’il faut faire, ce qui est vrai sous le regard de Dieu.
Laissons-nous toucher par sa FORCE, non la puissance vaniteuse, mais la vigueur de l’âme, illuminée par Dieu, qui n’accepte aucun compromis dans l’accomplissement de son devoir et qui mène à son
achèvement notre vocation de fils de Dieu.
Soyons remplis de sa PIETE, cette tendresse de Dieu qui nous montre ce que nous sommes et nous donne d’aimer les autres tels qu’ils sont. Elle suscite le désir de la grâce, du pardon et de la
joie d’aimer et d’être aimer.
Libérons-nous dans la CRAINTE DE DIEU, non pas la peur qui paralyse, mais cette réalité filiale qui nous donne un Père et dont l’horizon d’amour est infini. Qui y répond devient libre car son
amour est sans limite si ce n’est Dieu lui-même.
Merci, Esprit Saint, Alléluia
Mon homélie pour la Pentecôte Année A 2008