Écrit par Andrea Cionci (14/06/2022) - Traduction française autorisée: père Walter Covens
Révérendissime Excellence,
J'ai écouté vos réflexions ICI sur la question de la validité du pontificat de François. En tant qu'auteur d'une enquête de deux ans sur la question des deux papes, menée avec plus de 200 articles dans des journaux nationaux et qui vient d'être publiée dans un volume de 340 pages, j'espère que vous ne me jugerez pas présomptueux si je prends la liberté de vous adresser cette lettre publique, confiant dans votre ouverture d'esprit et votre volonté courageuse et avérée de défendre la vérité.
Vous affirmez que la théorie selon laquelle Benoît XVI n'a pas abdiqué "défie la tradition de l'Église".
Pourtant, nous avons eu une quarantaine d'antipapes dans l'histoire de l'Église. Il n'est donc pas nouveau que des personnes liées à des puissances mondiales aient tenté de s'emparer de la papauté par la force : cela fait définitivement partie de la "tradition". Ce qui est absolument nouveau - sur ce point, vous avez raison - c'est la réponse ingénieuse que le pape légitime a fournie pour se défendre contre cette agression contre la papauté, qui est d'ailleurs annoncée depuis l'époque du prophète Daniel.
J'ai écrit sur ce système dans le livre "Codice Ratzinger" (éd. ByoBlu), dont un exemplaire est en route vers votre domicile.
Encore une fois, selon vous, la perspective d'un seul pape légitime Benoît serait impossible parce que, et je cite vos mots : "La loi humaine régissant l'accession à la fonction papale ou la destitution de celle-ci doit être subordonnée au bien supérieur de toute l'Église, qui est dans ce cas l'existence réelle du chef visible de l'Église et la certitude de cette existence pour tout le corps de l'Église, clergé et fidèles".
Si j'ai bien compris, en simplifiant, cela serait impossible car un pape actif doit toujours être là pour le bien de l'Eglise.
Pardonnez-moi, mais vous avez vous-même courageusement déclaré il y a quelque temps que le pape François "doit se convertir" ICI . Vous avez raison, mais en reconnaissant François comme pape légitime, vous présupposez en fait l'existence d'un pape non-catholique, et comment cela pourrait-il être un plus grand bien pour l'Église ? Le fait que Bergoglio soit non-catholique, du point de vue de la foi, lui est possible précisément en n'étant pas pape, en n'ayant pas le munus, l'investiture divine (conservée par Benoît XVI) qui garantit l'infaillibilité ex cathedra et l'assistance ordinaire du Saint-Esprit (Art. 892 CEC).
Si le chef légitime de l'Église "doit se convertir" au catholicisme, ce qui est en contradiction avec le rôle même du pape, c'est un malheur atroce et donc tous les actes et nominations de ce pape non-catholique invisible ne correspondent pas du tout au bien suprême de l'Église, mais sont au contraire néfastes et mortels pour elle. Par conséquent, le bien suprême de l'Église est que ces derniers soient exactement annulés, ce qui est précisément le cas grâce au Siège empêché du pape Benoît. Il suffit de jeter un coup d'œil aux nominations des "cardinaux" bergogliens : un patchwork d'ultra-modernistes partis en bloc vers une autre religion mondialiste et inversionniste qui n'a pas grand-chose à voir avec le catholicisme.
Vous prétendez encore que notre discours préfigurerait une sorte de sédévacantisme, mais ici nous ne parlons pas d'une sede vacante, car le pape est là, et c'est Benoît XVI. Nous parlons plutôt d'un Siège empêché, un état parfaitement envisagé par le droit canonique qui produit, en fait, un "pontificat d'exception" qui, reprenant le concept de Carl Schmitt, entraîne une suspension juridique générale providentielle de la vie de l'Église.
Bien sûr, il est choquant que depuis neuf ans, toute activité pratique de l'Église visible soit annulée, mais c'est un bien suprême, étant donné que l'"administrateur" actuel n'est pas catholique. Tout ceci a été permis par le Saint Père Benoît dans un but précis : la purification finale de l'Eglise en réponse à une agression moderniste-hérétique-maçonnique contre la papauté. Nous parlons donc d'une phase eschatologique d'une importance énorme, millénaire, et le pape Benoît, comme l'a souligné le professeur Giorgio Agamben, a ainsi "renforcé la papauté" en séparant le bon grain de l'ivraie et en accordant à ses ennemis une parenthèse d'anarchie avant d'être "jetés en enfer".
En effet, je doute fort que la sanatio in radice envisagée par l'Acceptation pacifique universelle, que vous avez citée, puisse jamais, à notre époque, avec les règles canoniques actuelles, sanctionner un coup d'État qui a eu lieu avec un conclave convoqué avec un pape précédent qui n'est pas mort, qui n'a pas abdiqué, qui est empêché et pas du tout disposé à quitter le trône pétrinien. Cela reviendrait à légitimer la loi de la jungle au sein de l'Église.
Même la doctrine de Supplet Ecclesia, que vous avez citée, fait référence aux sacrements, et non au système juridique. C'est pourquoi le pape Benoît a protégé les âmes des gens simples qui continuent de bonne foi, sans le savoir, à s'approcher des sacrements en communion avec celui qu'ils croient être le pape légitime, mais aussi, Benoît a défendu l'Église contre l'usurpation forcée en utilisant précisément le droit canonique, qui n'est pas "accessoire" à la vie de l'Église, mais réglemente la légitimité de chaque mesure.
L'idée que Benoît ait testé ses ennemis, qui voulaient qu'il abdique, et les ait provoqué à devenir schismatiques, n'est donc pas un cul de sac, comme vous l'écrivez, pardonnez-moi, mais une stratégie ingénieuse pour purifier l'Église une fois pour toutes. Un cul de sac serait plutôt de croire qu'un pape légitime non catholique pourrait s'asseoir sur le trône de Pierre : cela reviendrait à dire que le Christ a abandonné son Église. Un autre cul de sac (NDT/ en français dans le texte) - le pire absolu - serait d'approuver un prochain conclave invalide qui, avec quelque 90 non-cardinaux bergogliens, donnerait certainement à l'Église un autre antipape, un Zuppi, un Tagle ou un Maradiaga, peut-être avec le nom semi-antipapal de Jean XXIV. Un véritable suicide auquel contribueront de nombreux cardinaux de nomination bergoglienne, qui s'illusionneront en pensant qu'ils conserveront la pourpre en faisant des compromis similaires et qui, au contraire, perdront non seulement le cardinalat mais, peut-être, du point de vue de la foi, quelque chose d'infiniment plus important.
Vous citez ensuite dans votre discours les déclarations de Mgr Gänswein qui ont donné de l'espace à la théorie de "l'erreur substantielle" selon laquelle le pape Benoît voulait créer une papauté émérite, mais s'est trompé et a fait une erreur de concept en essayant de diviser la papauté en deux pontifes, un contemplatif et un actif.
Il s'agit d'une position partagée par une partie importante du monde traditionaliste, mais la Declaratio ne porte pas seulement l'inversion munus/ministerium, (ce qui pourrait, tout au plus, suggérer une erreur conceptuelle) mais constitue une sorte de cocktail de mécanismes canoniques implosifs qui, en plus de rendre totalement inacceptable toute hypothèse d'abdication, mettent en évidence, au contraire, une extraordinaire et parfaite conscience du vrai pape dans la rédaction d'une proclamation cohérente pour un auto-exil in sede impedita (canon 412). En effet, une renonciation à la papauté doit être simultanée et ne pourrait jamais être reportée de 17 jours ; le ministerium ne peut être légalement séparé du munus. Cela ne peut se produire que de facto et non de iure dans le cas d'un Siège empêché, lorsque l'évêque ne peut exercer son pouvoir parce qu'il est empêché en cas de force majeure.
En fait, si Benoît avait voulu séparer juridiquement le munus et le ministerium sur la base d'une erreur substantielle, après 20 heures le 28 février 2013, même s'il s'était trompé, il aurait certainement confirmé par écrit ou verbalement sa renonciation juridique - quoique impossible - au ministerium. Ce qui n'est jamais arrivé, comme le souligne le livre de Carlo Maria Pace. Donc, comme vous le voyez, le pape Ratzinger était parfaitement conscient de ce qu'il faisait.
De plus, Benoît XVI recommande - ce n'est pas une coïncidence - dans la Declaratio que le prochain pape soit élu "par ceux à qui il appartient de le faire", c'est-à-dire précisément par les cardinaux de nomination antérieure à 2013 et non par les faux cardinaux de nomination anti-papale. Le verbe vacet, traduit arbitrairement dans les langues vernaculaires par "sede vacante", doit être traduit littéralement par "siège vide", car les expressions "siège de Rome" et "siège de Saint-Pierre" n'ont aucune personnalité juridique pour être laissées vacantes, comme l'a souligné Arthur Lambauer.
Si Benoît avait cru à une scission de la fonction papale en deux pontifes légitimes, il aurait insisté depuis 2013 pour essayer de nous convaincre que c'était possible, en défendant son approche erronée, au moins en disant quelque chose comme : "Il y a deux papes, tous deux valides, mais le plus important est François". Rien de tout cela ne s'est produit, en fait, il répète depuis neuf ans qu'"il n'y a qu'un seul pape" sans jamais expliquer qui. S'il n'y a qu'un seul pape, il ne peut y avoir deux papes tous deux légitimes, mais un légitime-contemplatif (Benoît empêché) et un actif-illégitime (Bergoglio régnant abusivement) comme l'a explicité Mgr Gänswein dans son célèbre discours de 2016 ICI .
De plus, s'il n'y a qu'un seul pape, et si c'était François, pourquoi Benoît écrit-il que le pape émérite est le pontife suprême ICI et donne-t-il sa bénédiction apostolique ICI ?
En résumé, le pape Ratzinger a simplement déclaré qu'étant donné qu'il n'était pas en mesure de gouverner, en raison de la mutinerie qu'il avait subie, il a renoncé complètement au pouvoir, laissant effectivement le siège vide. Avec une douceur auto-sacrificielle, il accepta son empêchement avec une résignation chrétienne, permit à d'autres d'usurper le pouvoir, le croyant un pape abdicateur, et de devenir schismatiques, ruinés par leur propre infidélité et leur soif de pouvoir. Un plan parfait, même d'un point de vue théologique, dont on ne voit pas très bien pour quelles raisons il est combattu et non compris par de nombreux catholiques conservateurs qui s'opposent obstinément à Bergoglio (à moins que ce ne soit pour des avantages matériels).
Rien qu'à partir de ces brèves notes, vous comprenez que le discours est très complexe à reconstituer, mais que dans son essence, il est très simple. Toutefois, il est nécessaire de lire l'enquête de manière approfondie pour en avoir une vue d'ensemble et, surtout, pour expliquer divers épisodes qui ne semblent que la réfuter (le discours pour le 65ème anniversaire sacerdotal, le prétendu serment d'allégeance, etc.) ICI ).
Mon enquête, pour la première fois, au lieu de s'engager dans des spéculations philosophiques qui ne tiennent aucun compte des documents réels, a "écouté" ce que le pape Benoît XVI avait à dire sur la question, et je n'ai pas été contredit même par le Saint-Père lui-même (le vrai) lorsqu'il m'a honoré d'une de ses lettres, dans laquelle, en effet, il m'a fourni la seule réponse qu'il aurait pu me donner d'un Siège empêché, l'accompagnant même de ses armoiries de pape régnant ICI .
C'est pourquoi je vous dis : attention Votre Excellence, l'affaire est incroyablement plus grave que vous ne le pensez. Je vous prie de lire très attentivement le livre "Codice Ratzinger". J'ai exploré et illustré le subtil système de communication utilisé par le pape Benoît depuis le Siège empêché, utilisé pour faire comprendre "ceux qui ont des oreilles pour entendre" et pour "séparer les croyants des non-croyants", comme il l'a lui-même déclaré dans le Herder Korrespondenz l'été dernier (NDT: ICI). Il n'y a là rien de transcendantal ou de "gnostique" comme certains ont osé le prétendre ; au contraire, ce style de communication, qui reproduit en bloc celui utilisé par Jésus avec ses accusateurs ICI, est à la portée de tous et a été compris et certifié par les spécialistes qui ont eu l'occasion de l'approcher et de l'examiner avec grand soin :
"Les ambiguïtés objectives et étranges du langage de Benoît XVI identifiées comme le 'Ratzinger Code', également repérées par d'autres journalistes, voire des lecteurs, ne sont pas accidentelles, et ne sont pas dues à l'âge de l'auteur ou, encore moins, à son impréparation. Ce sont des messages subtils mais indubitables qui ramènent à la situation canonique décrite dans l'enquête. Le pape Benoît communique de manière subtile parce qu'il se trouve dans une situation d'empêchement et ne peut donc pas s'exprimer librement. Le "Ratzinger Code" est sa propre forme de communication logique et indirecte qui utilise des incohérences apparentes qui n'échappent pas à l'œil de la personne avertie. Ces phrases, "décodées" avec la minutie nécessaire dans les références que le pape fait à l'histoire, à l'actualité et au droit canonique, cachent un sous-entendu logique parfaitement identifiable, avec des significations précises et sans ambiguïté. A d'autres moments, Benoît XVI opte pour des phrases "amphiboles" - non sans humour - qui peuvent être interprétées de deux manières différentes. Ces techniques de communication lui permettent de faire comprendre, "à ceux qui ont des oreilles pour entendre", qu'il est toujours le pape et qu'il est en situation d'empêchement. Par conséquent, quiconque prétend que les messages de Ratzinger sont des interprétations fantaisistes, soit n'a pas compris, soit nie les preuves".
Rocco Quaglia, professeur de psychologie dynamique à l'université de Turin.
Prof. Antonio Sànchez Sàez, professeur de droit à l'université de Séville
Prof. Gian Matteo Corrias, professeur de matières littéraires et essayiste historico-religieux
Alessandro Scali, professeur de littérature classique, écrivain et essayiste.
Gianluca Arca, professeur de latin et de grec, philologue, chercheur et essayiste.
Dr Giuseppe Magnarapa, psychiatre, essayiste et écrivain.
(ICI)
Un exemple ? Dans les Dernières Conversations, ICI Benoît XVI répond au journaliste Seewald qui lui demande :
"Y a-t-il eu un conflit intérieur pour la décision de démissionner ?".
Réponse du pape Ratzinger :
"Ce n'est pas si simple, bien sûr. Aucun pape n'a démissionné depuis mille ans et même au premier millénaire, c'était une exception".
Il s'agit d'une erreur historique flagrante (avec six papes qui ont abdiqué au cours du premier millénaire et quatre au cours du second), à moins que l'on ne considère sa démission comme provenant du seul ministerium et que l'on identifie ainsi parfaitement ces deux papes (Benoît VIII et Grégoire V) qui, au cours du premier millénaire, avant la Réforme grégorienne, furent temporairement évincés par des antipapes et perdirent précisément l'exercice pratique du pouvoir, leur ministerium, mais sont restés papes. Comme par hasard deux cas de sede impedita ante litteram.
Comme vous pouvez le constater, rien de gnostique, mais des messages compréhensibles par tous, même par moi, l'auteur de la découverte, qui ne suis certainement pas un spécialiste en Histoire de l'Église.
Il existe des dizaines et des dizaines d'exemples de ce type, allant du plus simple et du plus direct au plus complexe et au plus savant. Ce style logique est maintenant devenu la découverte même des lecteurs ordinaires, qui ont ajouté d'autres exemples de messages brillants contenus dans les écrits du pape.
Je le répète : il s'agit d'une réalité OBJECTIVE à laquelle personne n'a été capable jusqu'à présent de proposer une réfutation qui ne consiste pas en des réponses snobinardes et fuyantes du type "conspirations", "fantasmes", "complots fictifs".
Les détracteurs de l'auteur, en plus de l'insulter gratuitement ICI, refusent systématiquement d'analyser/réfuter ce corpus de déclarations avec une attitude coupable de superficialité et potentiellement exécrable envers l'Église visible.
On a peur de l'évidence, de la vérité, on a peur de "regarder avec un télescope", on a peur de lire les cent messages du Ratzinger Code parce que, dans ce cas, il faudrait s'exposer, prendre position, renoncer aux avantages matériels, revenir sur ses convictions passées, et beaucoup n'ont pas le courage de le faire, même si le salut de l'Église et - du point de vue de la foi - de sa propre âme en dépend. La "voie large" consiste à penser que, finalement, une fois que Bergoglio aura quitté la scène, tout pourra facilement s'arranger.
Et au lieu de cela, non : comme vous l'avez vous-même identifié, un prochain conclave composé d'une foule de non-cardinaux nommés par Bergoglio élira un autre antipape et l'Église canonique, visible, sera terminée et, peut-être, devra ressusciter des catacombes "en quittant la synagogue".
Attention : avec son langage subtil et christologique, le pape Benoît, vicaire légitime de Jésus-Christ, sélectionne "son" armée. Il est facile pour tant de gens de DÉSERTER en confondant les cartes sur le plan canonique et en ignorant ses messages en les qualifiant de "conspirationnistes".
Mais le temps de la révélation finale et du schisme purificateur viendra. L'important sera de se trouver du bon côté.
Croyez-moi : je n'ai pas investi 800 heures de mon temps gratuitement pour mettre en péril ma réputation professionnelle, ou pour une misérable spéculation commerciale.
Lisez le livre que je vous envoie, examinez-le très attentivement, et vous pourrez reconnaître la "mosaïque" complète, rassemblée, autant que possible, pièce par pièce.
Avec des salutations respectueuses et cordiales,
Andrea Cionci