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Publié par dominicanus

Traduction française autorisée : père Walter Covens

Traduction française autorisée : père Walter Covens

 

***

 

Jusqu'à présent, nous vous avons parlé du contexte d'empêchement de gouverner qui a conduit Benoît XVI à préparer une Declaratio dans laquelle il annonçait qu'il se retirerait en ermitage, abandonnant effectivement l'exercice pratique du pouvoir, mais SANS ABDIQUER. ICI ET ICI.

 

De cette façon, il a amené ses adversaires à confondre cet acte avec une renonciation au trône, à s'emparer abusivement du pouvoir, à créer une anti-papauté et à produire ainsi un schisme purificateur pour l'Église, séparant le "blé" des vrais catholiques de l'"ivraie" des modernistes. (Il l'a également répété dans sa dernière interview avec le Herder Korrespondenz : "Séparer les croyants des non-croyants", mais bien sûr, presque personne n'a cité cette phrase inquiétante).

 

Le pape Ratzinger savait que ses ennemis, moins bien préparés que lui et dominés par la soif de pouvoir, s'empareraient voracement de tout document qui parlerait de "démission", sans trop faire dans la subtilité. Lui, en revanche, a fait de la subtilité et de la culture son propre code privilégié de communication "spéciale".

 

En fait, malgré son "siège empêché", il a réussi, au cours des huit dernières années, à filtrer les concepts clés EXPLIQUANT SON EMPÊCHEMENT, dans des dizaines de livres, d'interviews et de déclarations. En substance, le Pape APPELLE À L'AIDE, mais personne, tragiquement, ne l'écoute.  

 

Pour communiquer, en surmontant les formes de censure auxquelles il est manifestement soumis, Benoît XVI utilise une méthode LOGIQUE (le catholicisme est, après tout, la religion du "Logos"), qui fait appel à des stratagèmes appropriés et précis : 1) ERREURS intentionnelles ou apparentes, 2) AMBIGUÏTÉS "spéculaires" et 3) INCOHÉRENCES superficielles.

 

Ces bizarreries sont produites pour attirer l'œil de ceux qui savent lire attentivement et qui, en y réfléchissant bien, en expliquent le sens réel grâce à de savantes références historiques, à une traduction correcte et philologique du latin, à des références à d'autres documents et déclarations, à la citation des mêmes mots des interlocuteurs, à un usage intelligent de la langue et des temps, voire à des allusions humoristiques.

 

L'auteur a pu "décrypter" complètement deux chapitres entiers consacrés à la prétendue renonciation dans le livre d'entretiens de Peter Seewald avec Ratzinger "Dernières Conversations" (2016) qui, avec son jumeau "Ein Leben" (2020), est une véritable MINE de messages. Bientôt nous vous proposerons - en exclusivité absolue pour ByoBlu - la lecture authentique et inédite d'UNE LETTRE ENVOYÉE PAR LE PAPE RATZINGER À UN PRÉLAT.

 

Une fois la méthode, le "Ratzinger code", compris, d'autres collègues journalistes, comme le talentueux Mirko Ciminiello de RomaIT, ou même de simples lecteurs, nous ont fait remarquer des messages qui, au départ, nous avaient échappé, ou qui révélaient d'autres significations.

 

Pour vous initier à ce langage "subtil", nous allons commencer par vous proposer les exemples les plus évidents.

 

Notre enquête a commencé, en 2020, précisément à partir des ERREURS de latin dans la Declaratio, déjà détectées par les philologues Luciano Canfora et Wilfried Stroh que, des années plus tard, le latiniste Frà Alexis Bugnolo ICI , a interprété pour la première fois comme des signaux pour attirer l'attention sur un document qui n'était PAS une renonciation.

 

Quant aux AMBIGUÏTÉS du langage post-Declaratio de Benoît XVI, la plus notoire et la plus criante concerne le fait qu'il répète depuis huit ans, inlassablement, qu'"il n'y a qu'un seul pape", SANS JAMAIS DIRE, pas même accidentellement ou par inadvertance, "ET C'EST FRANÇOIS". Ceci est confirmé par son propre secrétaire, Mgr Gänswein, qui, répondant publiquement au Père Bernasconi, le prêtre excommunié pour n'avoir été fidèle qu'à Ratzinger, a déclaré : "Benoît XVI a toujours dit qu'il n'y a qu'un seul pape, ET IL EST CLAIR QU'IL S'AGIT DE FRANÇOIS".

 

Si "c'est clair", il ne l'a donc jamais dit explicitement. Vous pouvez lire la suite ICI

 

Il convient plutôt de signaler une opération de véritable manipulation médiatique réalisée par Vatican News ICI.

 

L'agence de presse du Vatican, titrait en 2019 ICI : "Benoît XVI : le pape est un, François" citant l'interview de quelques jours plus tôt par Massimo Franco du Corriere, avec le pape. Eh bien, nous sommes allés vérifier ICI dans le journal : cette citation était une pensée personnelle de Massimo Franco, en aucun cas imputable à Benoît XVI. De plus, l'ensemble de l'interview du Pape Ratzinger pourrait être interprété de manière complètement inverse, comme vous pourrez le lire ICI . On ne sait pas ce que les médias généralistes donneraient pour avoir ces trois mots fatidiques de Benoît XVI : "... et c'est François"... Mais il ne les a JAMAIS prononcés, évidemment parce qu'il est le pape lui-même et qu'il ne peut pas le dire, puisque son est Siège empêché.  

 

Mais maintenant, en ce qui concerne les INCOHÉRENCES apparentes, nous en arrivons à l'un des messages les plus clairs et les plus explicites que nous ayons identifiés.

 

À la page 26 de "Ultime conversazioni" (Garzanti 2016; traduction française: Dernières conversations, Fayard 2016), le journaliste Seewald interroge Benoît XVI : "Avec vous, pour la première fois dans l'histoire de l'Église, un pontife dans l'exercice plein et effectif de ses fonctions a démissionné de son "office". Y avait-il un conflit intérieur autour de cette décision ?".

 

Réponse du pape Ratzinger :

 

"Ce n'est pas si simple, bien sûr. Aucun pape n'a démissionné depuis mille ans, et même au premier millénaire, c'était une exception, donc une telle décision doit être longuement réfléchie. Pour moi, cependant, c'était tellement évident qu'il n'y avait pas de conflit interne douloureux."

 

Il s'agit là d'une AFFIRMATION ABSURDE, étant donné qu'au cours des mille dernières années (1016-2016), pas moins de quatre papes ont renoncé au trône (dont le célèbre Célestin V, en 1294) et, au cours du premier millénaire de la papauté (33-1033), il y en a eu six autres.

 

Peut-être Ratzinger ne connaît-il pas bien l'histoire de l'Église ?

 

Sa phrase a, au contraire, un sens parfaitement cohérent si l'on comprend que le sens du mot "démission" pour Ratzinger, n'est pas le même que celui que nous lui donnons : "ce n'est pas si simple", comme il le précise lui-même.

 

En effet, dans la fameuse Declaratio de 2013, il a déclaré qu'il renonçait au ministerium, à l'exercice pratique du pouvoir. Ainsi, pour lui, le mot "démission" ne signifie pas "abdication", mais seulement la renonciation à gouverner pratiquement, sans perdre le titre de Pape ICI .

 

En fait, dans sa réponse à Seewald, il ne nous parle pas de papes qui ont abdiqué, mais d'un pape qui, comme lui, au premier millénaire, a perdu temporairement le ministerium - pour cause de force majeure - et n'a JAMAIS ABDIQUÉ.

 

Tout colle : l'"exception" du premier millénaire dont parle Ratzinger est celle de BENOÎT VIII, THÉOPHYLACTE DEI CONTI DI TUSCOLO, qui fut évincé en 1012 (toujours au cours du premier millénaire, voir ci-dessus) par l'antipape Grégoire VI. En fuite, Benoît VIII dut renoncer au ministerium pendant quelques mois, mais il ne perdit pas son munus, le titre divin de pape, à tel point qu'il fut ensuite réintégré - en tant que tel - sur le trône par le saint empereur Henri II. En revanche, au cours du deuxième millénaire, aucun pape n'a jamais renoncé au seul ministerium, tandis que quatre pontifes ont abdiqué le munus tout court.

 

Consulté sur la question historique, le professeur Francesco Mores, professeur d'histoire de l'Église à l'université de Milan, confirme :

 

"Il y a bien cette différence entre le premier et le deuxième millénaire. La jonction décisive est la réforme "grégorienne" (de 1073). Bien qu'en conflit avec les pouvoirs séculiers, les papes du deuxième millénaire ont toujours maintenu un minimum d'exercice pratique de leur pouvoir (ils n'ont donc pas renoncé au ministerium, ndlr), à la différence de très rares cas dans le premier millénaire : Pontien, Sylvère, mais surtout Benoît VIII".

 

Benoît XVI nous dit donc clairement qu'il a dû renoncer au ministerium comme son ancien prédécesseur homonyme et qu'aucun d'eux n'a jamais abdiqué, c'est-à-dire renoncé au munus.

 

Si ce n'était pas le cas, comment Ratzinger pourrait-il dire qu'aucun pape n'a démissionné au cours du deuxième millénaire et qu'au cours du premier millénaire, c'était une exception ? IL N'Y A PAS D'ÉCHAPPATOIRE.

 

Si vous voulez approfondir la question, cliquez ICI.

 

Une autre confirmation vient de l'autre livre d'entretiens de Seewald, "Ein Leben", où, à la page 1204, Benoît XVI prend ses distances avec Célestin V, l'abdicateur par excellence, qui a légalement renoncé au trône au cours du deuxième millénaire (1294) :

 

"La situation de Célestin V - écrit Ratzinger - était extrêmement particulière et ne peut en aucun cas être invoquée comme (mon) précédent".

 

Toujours dans Ein Leben, le mot "abdication" apparaît huit fois - neuf dans l'édition allemande sous la forme "Abdankung" - et ne fait jamais référence à Ratzinger, mais uniquement aux papes qui ont abdiqué pour de bon, comme Célestin, ou qui ont voulu le faire sérieusement, comme Pie XII, pour échapper aux nazis. Pour Ratzinger, cependant, il n'est question que de démission ('Rücktritt').

 

Comme vous pouvez le constater, il ne s'agit pas ici d'interprétations "complotistes" ou captieuses : LES ÉCRITS RESTENT.  La déclaration de Benoît XVI est explicite et ne peut s'expliquer logiquement, historiquement QUE dans ce sens, et est pleinement cohérente avec la Declaratio. Bien sûr, pour comprendre le langage "codé" du pape Benoît, il faut avoir la patience d'aller en reconstituer les détails, mais si cela n'était pas indispensable, il ne s'agirait pas d'un message "codé", capable de filtrer à travers un "siège empêché", pour être compris par ceux qui n'ont pas peur de la pensée logique.

 

Toute l'opération de Ratzinger, en effet, tend à "sélectionner" et à mobiliser en conséquence uniquement les prélats, les clercs, les fidèles ou les gens ordinaires qui ont des "oreilles pour entendre" et des "yeux pour voir". Les autres se justifieront en disant qu'il s'agit de "élucubrations, de coïncidences, de sophismes inutiles" : ils ne comprendront pas ou, surtout, ils ne voudront pas comprendre.

 

Eh bien, maintenant que vous connaissez un peu la MÉTHODE, le "Ratzinger Code", nous allons poursuivre en expliquant de nombreux autres messages, encore plus raffinés et précis, de sorte que bientôt vous serez même en mesure de les trouver par vous-même, en apportant peut-être d'autres contributions à la première "enquête participative" de l'histoire du journalisme.

 

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