Cher lecteur, j'ai l'honneur et la joie de vous présenter ma traduction française d'un entretien qu'Estefanía Acosta à accordé à Patrick Coffin, bien connu au Canada et aux États-Unis, notamment pour ses "shows" avec des invités prestigieux tels que les cardinaux Burke, Pell, Arinze et des évêques du Canada, des États-Unis, d'Afrique et de France, sans parler des personnalités de la politique américaine, du cinéma, de la médecine, des sports professionnels et de la littérature.
Et pourtant, il affirme que "parmi les milliers d'entretiens que j'ai réalisés, celui-ci est peut-être le plus important", précisément parce qu'il concerne la "Magna Quæstio", qui a fait l'objet depuis deux ans de l'enquête d'Andrea Cionci, dont vous pouvez trouver la traduction française, en bas de page ICI, sur Praedicatho.
Le livre d'Estefanía Acosta sur la Déclaratio de Benoît XVI vous a été présenté ICI.
Ce que vous n'avez peut-être pas remarqué, c'est que suite à la visite surprise de journalistes de la télévision chez moi ICI, j'avais évoqué ce livre, ce qui m'a valu l'honneur de la visite et de commentaires de l'auteur ICI
Elle est aussi l'auteur de la Declaratio en plusieurs langues, que peuvent signer les évêques, prêtres, diacres et fidèles du monde entier qui reconnaissent publiquement que Benoît XVI est le seul et unique Pape de l'Église catholique jusqu'à aujourd'hui ICI
Ceux qui ont suivi cette enquête se souviendront qu'Andrea Cionci a fait état d'Estefanía Acosta à plusieurs reprises, notamment ICI.
Louis Lurton nous a aussi fait cadeau de sa traduction de l'entretien exclusif d'Estefanía Acosta pour Katejon ICI, ainsi que sa "Nouvelle vérification de la validité de la 'renonciation' de Benoît XVI" ICI.
De Patrick Coffin j'avais déjà publié ICI un show intitulé : Sept éléments de preuve que François est un antipape.
Précisons enfin que la lecture de l'article qui va suivre est exigeante et nécessitera toute votre attention et votre temps. Mais ce sera un des plus beaux efforts de carême que vous puissiez faire !
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Écrit par Patrick Coffin (04/03/2022) - Traduction française autorisée : père Walter Covens
Estefanía Acosta, de Medellin, en Colombie, est une avocate en exercice spécialisée en droit constitutionnel, et a été pendant des années fonctionnaire du pouvoir judiciaire de l'État et professeur d'université dans le domaine du droit commercial et civil. En 2020, le fruit d'une recherche diligente et d'une analyse juridique/canonique de la Declaratio lue par Benoît XVI le 13 février 2013, s'est matérialisé dans son livre-bombe, Benedict XVI: Pope “Emeritus”? The ‘Always Is Also ‘Forever.’”
Elle a estimé qu'il serait plus efficace de faire une interview imprimée puisque les détails - les canons pertinents, les doctrines et la ligne d'argumentation - sont plutôt détaillées et techniques. La conseillère Acosta écrit dans le style sobre et condensé que l'on attend d'une avocate expérimentée, et ses réponses comportent tellement de détails importants que j'ai décidé qu'il serait préférable de publier l'entretien en deux parties.
Le sujet même peut paraître franchement déstabilisant pour les catholiques. Dans un premier temps. Prenez votre temps en parcourant la première partie. Il se peut que vous vous surpreniez, comme je l'ai fait, à ralentir pour vous concentrer pendant votre lecture.
Parmi les milliers d'entretiens que j'ai réalisés, celui-ci est peut-être le plus important. Les enjeux pour l'Église catholique ne pourraient pas être plus élevés, les faits plus vérifiables et le sentiment d'espoir plus palpable, une fois que vous aurez permis à Estefanía Acosta d'exposer - sous un angle après l'autre - les arguments selon lesquels le seul Pontife romain en exercice reste Sa Sainteté Benoît XVI. En cours de route, elle dissipe les perceptions erronées de ce qui s'est passé le 11 février 2013, de ce que cela signifie et de ce que cela ne signifie pas.
Lisez la suite.
Tout d'abord, merci d'avoir accepté de me parler. Parlez-moi de votre parcours dans la Foi. Avez-vous toujours été catholique ?
Merci de votre aimable invitation. En fait, dans mon cas, il s'agit d'un retour au catholicisme. J'ai eu la chance de naître dans une famille catholique et de fréquenter une école catholique, ainsi que de recevoir les sacrements de l'initiation chrétienne dans mon enfance et mon adolescence. Cette formation catholique initiale était cependant assez superficielle et je n'ai pas réalisé, dans cette première période, la rencontre personnelle avec le Christ qui est ce qui transforme vraiment notre vie de manière décisive et nous pousse à tout quitter pour son amour.
Ainsi, avec de si mauvaises bases, j'ai commencé très tôt à m'éloigner progressivement du Seigneur, de l'Église, des sacrements et de la vie dans la grâce - et j'ai ensuite reçu le "coup mortel" d'une formation universitaire radicalement anti-chrétienne et anticléricale. Mais, après de nombreuses années d'errance, dans mon pire moment de ténèbres spirituelles, la Sainte Vierge Marie m'a secourue et ramenée à la maison, au Très Sacré Cœur de Jésus et à la Sainte Mère l'Église.
Les retours en arrière ne sont pas rares de nos jours ! Ok, combien de temps après le Conclave du 13 mars 2013 avez-vous commencé à avoir de sérieuses inquiétudes sur ce qui arrivait à l'Église catholique sous François ?
Il se trouve que le sauvetage que j'ai mentionné a eu lieu au début de 2017, et curieusement, il s'est développé en parallèle avec la connaissance et l'approfondissement des prophéties bibliques et privées sur la fin des temps. Ainsi, lorsque je suis revenue dans le giron de l'Église, j'ai constaté - presque immédiatement - qu'elle avait été usurpée à son sommet (la papauté), comme cela avait été prophétisé des siècles auparavant. Entre 2017 et 2019, j'ai suivi assidûment le fameux "Café con Galat", une émission de télévision colombienne bien connue dans le monde hispanophone. Le Dr José Galat et son équipe y dénonçaient non seulement les hérésies, les blasphèmes et les outrages commis quotidiennement par le "pape François", mais aussi les pressions et les irrégularités qui avaient entouré la "démission" de Sa Sainteté le pape Benoît XVI.
J'ai écouté ces plaintes avec une certaine crainte, mais je les ai considérées comme fondées et cohérentes. Ce n'est donc qu'en 2019, après avoir digéré et discerné toutes ces informations, que j'ai définitivement accepté dans mon esprit et mon cœur cette vérité sur l'usurpation pétrinienne malveillante perpétrée par Jorge Bergoglio dans le but évident de détruire l'Église du Christ.
Votre nouveau livre, Benedict XVI : Pope emeritus ? The "Always" Is Also a "Forever", est divisé en deux sections : la première se concentre sur l'étrange texte d'abdication du pape Benoît XVI, la seconde sur le conclave qui a supposément élu Jorge Cardinal Bergoglio le 13 mars 2013. Ces deux sections présentent de nombreuses facettes. J'aimerais commencer par l'abdication. Est-il possible de comprimer en une phrase les raisons pour lesquelles les preuves sont claires que le pape Benoît XVI n'a pas, en fait, démissionné de la fonction de la papauté et qu'il reste donc le véritable Souverain Pontife ?
Oui, c'est possible, mais avant de le faire, il est essentiel de comprendre le contexte plus large. Il est évident qu'autour de ces supposés actes juridiques se référant à la papauté - la "démission" du pape Benoît XVI et l'"élection" du cardinal Jorge Bergoglio - de nombreux faits irréguliers et confus sont apparus. En voici sept :
(i) La furieuse opposition soulevée par une partie du clergé lui-même contre le pontificat de Benoît XVI qui s'est manifestée, par exemple, par les "appels répétés à la désobéissance" du clergé autrichien qui a exigé des "réformes magistérielles" sur des points de morale sexuelle et d'ordination sacerdotale (l'approbation de l'ordination sacerdotale féminine, la suppression du célibat sacerdotal obligatoire, l'approbation des unions homosexuelles, etc.) En outre, à un niveau plus symbolique, dans l'acte scandaleux d'irrespect de ces évêques et cardinaux qui ont publiquement refusé la salutation formelle due au Pape Benoît lors de son voyage en Allemagne à la fin de 2011 ;
(ii) Les menaces notoires contre la vie de Sa Sainteté Benoît XVI, diffusées dans les médias italiens au début de 2012, et publiquement corroborées quelques années plus tard par le cardinal colombien Darío Castrillón Hoyos ;
(iii) Le blocage économique des comptes bancaires du Vatican, survenu en février 2013 et soudainement résolu le lendemain de l'annonce publique de la Declaratio de " démission " du Pape ;
(iv) Les plans de certains secteurs de la gauche dans la politique et la finance américaines, visant à "planter les graines de la révolution" dans l'Église catholique ;
(v) les machinations de la tristement célèbre mafia de Saint-Gall, dont les membres sont, curieusement, les plus farouches opposants de Joseph Ratzinger. Prenons l'exemple du cardinal Godfried Danneels (RIP), l'un des chefs avoués de ladite mafia, dont la vie a été caractérisée par sa désobéissance systématique aux enseignements transmis par le cardinal Ratzinger depuis sa position de préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, et dont le candidat triomphant au conclave de 2013, Jorge Bergoglio, a assumé, dès le premier moment de son investiture comme "pape", la bannière du libéralisme tant aimé par les mafiosi. Et par "libéralisme", j'entends vraiment ici les postulats maçonniques/sataniques ;
(vi) L'apparente dyarchie papale qui s'est constituée à la suite des "actes juridiques" en question et des comportements symboliquement significatifs du pape Benoît XVI et du "pape François".
(vii) À tout ce qui précède s'ajoutent, bien sûr, les révélations bibliques et privées sur la grande apostasie, qui serait "institutionnalisée" à partir de la plus haute "autorité" ecclésiale à la fin des temps (à laquelle le Catéchisme de l'Église catholique fait allusion au n° 675). N'oublions pas que l'infiltration maçonnique et communiste documentée dans l'Église a réalisé à la lettre les plans maçonniques également documentés pour la destruction de la foi catholique. Et enfin, nous avons les signes des temps, qui nous crient que l'Apocalypse est arrivée.
Or, tous ces éléments (qui sont souvent classés, à tort ou par malveillance, sous le cliché des "théories de la conspiration") ne constituent pas une preuve de la validité ou de l'invalidité canonique de la Declaratio et, par conséquent, n'offrent pas, au sens strict, la réponse à la question de savoir qui est ou n'est pas le pape de l'Église catholique. La seule façon de résoudre cette question est de confronter le texte de la Declaratio lui-même avec les normes canoniques qui régissent les actes juridiques en général et l'acte juridique de la démission papale. Et en faisant cette confrontation, il devient clair que Benoît XVI n'a pas démissionné de la papauté : sa démission n'a jamais eu pour objet la charge ou l'office (en latin munus) de Pontife Romain. Cela renvoie à la dimension ontologique, liée à la propriété de la position ecclésiastique en question.
Mais, littéralement, Sa Sainteté a démissionné du "ministère d'évêque de Rome" (en latin ministerio Episcopi Romae), c'est-à-dire de la dimension pratique, liée à l'exercice des ministères/services/fonctions/tâches/aides associés à la fonction. Évidemment, la coexistence de "deux Papes" est impensable : un qui l'est, et un autre qui agit comme tel. Celui qui agit en tant que Pape sans l'être sera simplement un usurpateur, et celui qui est le Pape continuera à l'être jusqu'à sa mort ou sa démission valide de la fonction ou de la charge elle-même, indépendamment du fait qu'il exerce effectivement cette fonction ou non - ou dirons-nous que Pierre a cessé d'être le Pape pendant qu'il était emprisonné sur ordre d'Hérode Agrippa ?
En résumé, la réponse à votre question est la suivante : la Declaratio est une preuve objective et vérifiable que Benoît XVI a conservé le munus pétrinien et qu'il est donc resté, et reste à ce jour, le véritable Souverain Pontife.
Quels sont les canons pertinents (ou les documents des conciles ou d'autres documents du magistère) qui soutiennent cette affirmation ?
Je comprends que les canons 10, 39, 124 § 1, 125, 126, 145 § 1, 187, 188 et 332 § 2 du Code de droit canonique sont décisifs.
Le canon 332 § 2 indique que "s'il arrive que le Pontife romain renonce à sa charge [en latin munus], il est requis pour la validité que la renonciation soit faite librement et qu'elle soit dûment manifestée, mais non pas qu'elle soit acceptée par qui que ce soit." En aucun cas, il ne faut comprendre que ce canon établit une "formule sacramentelle" dont le mot "munus" est une partie indispensable, comme cela se produit, par exemple, dans la formule "ceci est mon corps" pour la consécration de l'Eucharistie. (Ces mots sont indispensables sous peine d'invalidité du sacrement et, par conséquent, de non-existence de la transsubstantiation). Ce qui se passe, c'est que le munus pétrinien (ou ses synonymes : charge, office, papauté, pontificat, etc.) ne constitue rien de moins que l'objet sur lequel, par simple logique, toute démission papale doit tomber.
Le fait est que l'"objet" est un élément essentiel, structurel, déterminant, constitutif de tout acte juridique. Pourquoi ? Parce qu'un acte juridique est essentiellement une décision, et en tant que tel, il nécessite : (i) un sujet (ii) qui donne son consentement ; (iii) que ce consentement soit rendu reconnaissable extérieurement ou socialement à travers une forme ; et (iv) un objet clair, c'est-à-dire que le contenu spécifique de la décision adoptée, ainsi que la réalité objective sur laquelle tombe cette décision, doivent être précisément indiqués.
Ainsi, dans le débat qui nous occupe, ce contenu et cette réalité objective ne seraient autres que "démissionner" et la "papauté" (ou ses synonymes), respectivement. Toutes ces exigences structurelles de l'acte juridique sont prévues par le canon 124 § 1 : "Pour qu'un acte juridique soit valide, il est requis qu'il soit posé [forme] par une personne capable [sujet - consentement], qu'il réunisse les éléments constitutifs qui lui sont essentiels [objet], et que soient respectées les formalités et les exigences imposées par le droit pour sa validité."
Même si ces éléments n'étaient pas expressément indiqués par le droit canonique, leur nécessité serait évidente de par la nature même de l'acte juridique. Pensez-y. Pourrions-nous même imaginer un acte juridique sans sujet(s), sans auteur ? Ou sans objet ? Cette nécessité logique nous conduit à affirmer que pour que la Declaratio soit une véritable démission papale, elle doit avoir pour objet la papauté, le munus pétrinien (ou ses synonymes : charge, office, pontificat, etc.), de la même manière que la vente d'un bien doit utiliser précisément ce mot (ou ses synonymes : terre, domaine, terrain, etc.), de sorte que l'objet de l'acte est déterminé et que l'acte lui-même accède à l'existence juridique.
Si un pape démissionne de l'exercice de certaines de ses fonctions (ministerium) mais pas de la charge dont ces fonctions découlent (munus), un conclave ne peut être valablement convoqué pour l'élection d'un nouveau pape pour la simple raison qu'il ne peut y avoir, simultanément, plus d'un pape. Cela serait contraire à la loi divine, puisque, par institution directe de Jésus-Christ lui-même, la papauté est nécessairement une charge unipersonnelle (Mt 16, 18-19 et Jn 21, 15-17). De multiples documents magistériels de l'Église nous l'enseignent, par voie de dogme : Bulle Unam Sanctam (Boniface VIII), Encyclique Satis Cognitum - Sur l'unité de l'Église (Léon XIII), Constitution dogmatique Pastor Aeternus (Concile Vatican I), Encyclique Mystici Corporis Christi - Sur le corps mystique du Christ (Pie XII), Constitution dogmatique Lumen Gentium (Concile Vatican II), etc.
En ce qui concerne la question du langage, que répondez-vous aux critiques qui prétendent que cette thèse fait une distinction trop nette entre le munus (office, ou charge) et le ministerium (les fonctions exécutives) de la papauté ? En d'autres termes, même si Benoît XVI ne les a pas utilisés de manière interchangeable, ne s'agit-il pas essentiellement de synonymes ?
Les critiques ont deux défauts : d'abord, ils prennent comme autorité certains dictionnaires latin-français et certains ouvrages littéraires et philosophiques écrits à l'origine en latin, et laissent de côté ce qui devrait être la source première dans cette discussion linguistique, à savoir les normes canoniques (en particulier le CIC). En effet, puisqu'il s'agit de la validité ou de l'invalidité d'un acte juridique (la Declaratio), le sens des termes doit être recherché précisément dans le contexte canonique. Deuxièmement, les critiques oublient que la synonymie entre munus et ministerium n'est que partielle. Ce point est important, alors couvrons-le bien.
Dans notre livre, nous avons fait une recherche systématique de tous les canons qui utilisent les mots munus et ministerium, aussi bien dans le CIC que dans la Constitution Apostolique Universi Dominici Gregis (UDG) de 1996, en recherchant dans la compilation normative (numérique) suivante : "Código de Derecho Canónico. Edición bilingüe y anotada" (sexta edición, Pamplona : Universidad de Navarra, 2006), dans laquelle chaque canon se trouve à la fois en latin original et en espagnol. En analysant les mots en question dans le contexte normatif, nous avons pu montrer deux faits importants. Premièrement, le terme munus est utilisé dans deux sens : comme office (charge, titre, position, commission, situation) et comme fonction (tâche, travail, service, ministère, aide) ; et deuxièmement, le terme ministerium n'est JAMAIS utilisé comme office, mais TOUJOURS comme fonction (ou ensemble de fonctions). Le livre comprend d'abondantes citations de normes canoniques.
Ce qui précède nous amène à la conclusion indéniable que, pour démissionner validement du pontificat, le mot approprié est munus, et non pas ministerium, puisque celui qui démissionne du ministerium démissionne seulement de l'EXERCICE de la fonction de Pape, et non pas de l'ÊTRE.
A ce stade, nous devons clarifier quelque chose. Les critiques soutiennent que tant le munus que le ministerium ont parmi leurs significations celle de "fonction". Selon eux, un pape pourrait bien cesser de l'être en démissionnant du ministerium. Face à cette objection, nous devons garder à l'esprit que le mot "office" lui-même a deux dimensions : une dimension ontologique (l'"être" qui est lié à la charge, la position, la situation, etc.), et une dimension pratique (le "faire", lié aux tâches inhérentes à une certaine charge, position, situation, etc.)
En d'autres termes, le fait que le mot ministerium ait parmi ses significations celle d'office, ne signifie pas qu'il devienne synonyme de munus dans son sens de charge, position, situation, etc. Dans le contexte canonique, le mot ministerium n'est JAMAIS utilisé dans une dimension ontologique, mais TOUJOURS dans une dimension pratique.
Cette clarification faite, nous devons souligner que nos réflexions ne se réfèrent pas à l'intention que Benoît XVI avait en utilisant ces mots (munus et ministerium), mais au sens objectif qui leur est attribué dans le domaine juridique. Ceci est essentiel. Rappelez-vous que les actes juridiques - et la Declaratio en est un - sont nécessairement exprimés par des mots, et que les mots ont un sens socialement reconnaissable. Sans cela, toute communication, tout langage, tout ordre social et juridique, deviendrait impossible.
L'examen systématique de la Declaratio montre cependant comment Benoît XVI distingue clairement, presque comme un maître patient, le mot munus dans son sens de charge ou d'office et le mot ministerium. Ainsi, le Pape nous dit que le munus pétrinien est de nature spirituelle et doit être exercé en agissant, en parlant, en souffrant et en priant. Sa propre distinction entre le tout (munus) et la partie (ministerium) est donc claire : si le munus (charge, office) est le contenant, le ministerium (fonctions) qui lui est associé est le contenu.
Ainsi, non seulement les mots en question ont un sens objectivement différent chaque fois que le munus se réfère à la charge ou à l'office, mais la Declaratio elle-même reconnaît et explique une telle distinction objective tout en limitant la démission spécifiquement au ministerium (et non au munus).
Un fait frappant de la Declaratio (et non de la Renuntiatio !) est la présence d'erreurs grammaticales dans le texte latin officiel, écrit par un homme de Dieu réputé pour l'excellence et la précision de sa latinité. Pouvez-vous donner quelques exemples d'erreurs, et est-ce qu'elles invalident le document ?
En fait, je ne crois pas que, dans le contexte canonique et social actuel, les erreurs en latin invalident un document papal. Cela s'est produit dans le passé, oui, en ce qui concerne les rescrits papaux, les brefs et les bulles, en vertu de ce qui était apparemment une coutume (avec une force normative). Mais dans le présent, je crois que la force d'une telle coutume pourrait difficilement être admise face à l'(in)validité d'une démission papale.
Là encore, le traitement historique des erreurs de latinité par l'Église n'est pas immédiatement applicable. En premier lieu, les motifs de nullité doivent être expressément établis par la loi (cf. canon 10 du CEC), et il n'existe actuellement aucune loi qui sanctionne expressément par la nullité un acte juridique pontifical contenant des erreurs de latinité. Il n'est pas non plus évident que la Declaratio corresponde à ce que l'on entendait par "rescrit, bref, bulle papale" à l'époque où la coutume susmentionnée était en vigueur.
Troisièmement, et c'est la raison décisive, dont je me suis rendu compte après la rédaction de notre livre. Cette coutume avait une base factuelle qui n'existe pas aujourd'hui : les falsifications constantes des documents pontificaux étaient un vrai problème et n'étaient pas toujours facilement détectables. Précisément comme critère pour identifier une telle falsification, on prévoyait la présence d'erreurs latines, surtout celles "ridicules" ou "inexcusables", dont l'origine vaticane était considérée comme invraisemblable.
Notre livre propose que les erreurs latines présentes dans la Declaratio aient au moins une valeur indicative. Comme vous le dites à juste titre, le pape Benoît est un homme de haut niveau intellectuel, particulièrement compétent dans le maniement du latin. Ne fallait-il pas s'attendre à une totale netteté linguistique ? En fait, à la lumière de la coutume du passé évoquée ci-dessus, les erreurs de Benoît XVI dans sa Declaratio sont ironiques. Comme le reflète son biographe, Peter Seewald, dans sa biographie du pape Benoît, Ein Leben (p. 1158 de la version italienne) : "Il restait encore deux semaines pour annoncer sa démission, lorsque le pape s'est assis à son vieux bureau en noyer pour travailler à la rédaction du texte, qui ne devait être ni trop long ni trop compliqué. Il devait cependant être précis et faire attention aux détails, pour éviter les controverses sur le droit canonique. (...) Il ne formulait pas le texte en italien parce que 'une chose aussi importante se fait en latin', et il ne voulait pas non plus faire des erreurs dans une langue qui n'était pas la sienne."
Vous avez posé une question sur les erreurs. Le frère italo-américain Alexis Bugnolo, latiniste expert, en signale 40. Mais les erreurs que les médias ont mises en évidence quelques jours après l'annonce publique de la Declaratio sont précisément au nombre de trois : (i) l'expression "commissum renuntiare" a été incluse alors que la chose correcte était "commisso renuntiare" ; (ii) il a été noté que le Siège serait vacant le 28 février à "29" heures ; et (iii) dans le premier paragraphe, "Ecclesiae vitae" a été indiqué, alors que "Ecclesiae vita" correspondait.
Or, toutes ces erreurs ont déjà été corrigées sur le site officiel du Vatican, et dans la lecture publique de la Declaratio par Benoît XVI, on ne peut percevoir que la première (commissum). Quant aux deux autres, l'audio permet de percevoir que le Pape prononce correctement "vita" et "20". Nous ne savons donc pas avec certitude si les autres erreurs ont été commises par ceux qui ont tapé le texte pour sa version web, ou si elles se trouvaient réellement dans le manuscrit préparé par Benoît. En tout cas, l'erreur du "commissum", qui est clairement imputable au Saint-Père - ce qu'il souligne dans sa lecture publique - se trouve dans la formule même de la "démission", dans son "cœur", et non dans la partie "secondaire" comme les antécédents ou la justification de l'acte, ou dans les remerciements.
Je voulais vous interroger sur le comportement de Benoît XVI depuis son départ. Il ne s'agit pas à proprement parler d'une "preuve", mais il a, par ses déclarations, ses décisions et son comportement depuis qu'il est devenu le "pape émérite", laissé de nombreux indices indiquant qu'il est conscient de son identité de véritable vicaire du Christ. Votre livre aborde ce sujet en détail. Pouvez-vous en donner quelques exemples ?
Pratiquement tout en lui est caractéristique de quelqu'un qui est et se sait le Vicaire du Christ. Il n'est pas logique qu'il continue à se faire appeler Benoît XVI et à utiliser les initiales P.P. (Pastor Pastorum). Il maintient sa résidence dans le monastère Mater Ecclesiae au Vatican alors que, comme on le sait, Ratzinger rêvait depuis ses jours de préfet d'une retraite tranquille dans sa chère Bavière. Il continue à porter du blanc et a adopté le titre sans précédent et anti-canonique de "pape émérite". Tout cela est une source de confusion, à un niveau symbolique, concernant l'identification du Roc (au singulier) sur lequel l'Église est construite et son unité est garantie. Mais la situation devient plus intéressante.
Bien que lors de la cérémonie d'adieu aux cardinaux (28/02/2013), Sa Sainteté ait promis sa "révérence et son obéissance inconditionnelles" au "futur Pape", la vérité est que depuis le 13 mars 2013, il a assumé un rôle qui ne correspond à aucun des rangs des autorités ecclésiastiques, et n'a pas été directement subordonné aux ordres de "François", ni même à ses enseignements. Au contraire, les interventions occasionnelles de Benoît XVI n'ont fait que miner "François", en paroles et en actes. Les exemples sont nombreux, mais le plus significatif a sans doute été la fameuse analyse de 2019 de Benoît XVI sur la crise des abus sexuels dans l'Église. Ce document a suffi à balayer les atrocités doctrinales des six années précédentes du faux magistère de Bergoglio, notamment en matière de moralité sexuelle, au point que les journaux ont titré : "Les dubia ont été finalement résolus."
Restez à l'écoute pour la deuxième partie de cet entretien avec Estefanía Acosta.