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Publié par Walter Covens

Les quelques exemples qui terminent cet ouvrage trouvent un prolongement dans l'ouvrage intitulé La prière des saints, où l'auteur décrit un grand nombre d'attitudes de confession chez des saints connus ou moins connus, ainsi que chez certaines person­nalités dans l'Église. (Note de l'éditeur)

    La sainteté se trouve à la croix ; et proprement la sainteté suréminente dont le Fils de Dieu, en mourant, nous donne une preuve d'une parfaite clarté. Là, il est à la fois le Dieu qui a déposé sa gloire auprès du Père et l'homme que Dieu a sanctifié totalement. Toute sainteté vient de là, elle prend son origine à la croix. Même la sainteté des purs, des innocents, vient de la croix, eux qui n'ont pas eu à l'éprouver, pour autant qu'une telle chose soit possible. Toute sainteté vient de la croix et aboutit à la croix, non pas à la croix nue, mais auprès du Seigneur crucifié qui, à la croix, condense en lui-même toute sa vie terrestre, mais aussi tout ce qui fait la sainteté et la vie de foi de l'Église.

    La confession est le fruit de la croix. Et dès que le Seigneur peut disposer de ce fruit, il le transmet à d'autres. Quand il donne l'ordre de confesser, c'est comme s'il montrait du doigt qu'il possède ce fruit et celui-ci ne devient véritablement le sien, visible et saisissable, qu'au moment même où il le partage. Nous pouvons contempler ce fruit dans la confession, comme nous contemplons sa chair, lui-même, dans l'hostie consacrée. Avec cette différence que nous contemplons le fruit de la croix, la confession, non pas comme quelque chose qui subsiste, mais comme quelque chose qui est à faire. Visible au moment où il est communiqué, ce fruit ne nous est toutefois saisissable que dans son exécution. Et chaque saint se confessera en communion avec tous les fidèles pour avoir part à ce fruit ; mais le saint le fera peut-être moins pour être absous de ses propres péchés que pour parvenir à ce lieu où le fruit de la croix devient visible. Il se confesse afin de découvrir la forme de la grâce, pour prêter au fruit une plus grande évidence, afin de participer par sa propre confession à la croix et en porter sa part pour permettre par sa propre confession que la parole de grâce du Seigneur prenne chair une fois de plus dans le mystère de sainteté institué par lui. Sa confession est très proche de la communion, elle est à proprement parler eucharistique.

    Le saint donne à la confession une qualité déterminée qu'il est seul à pouvoir lui donner. Une qualité d'un tel prix qu'on pourrait croire que le Seigneur, en instituant la confession, n'avait en vue que celle-­ci. Et précisément le saint qui aurait le moins péché serait capable de l'aveu le plus parfait: l'aveu de son éloignement de Dieu. Un aveu aussi qui inclut tous les pécheurs. La confession des saints, plus que toutes les autres, a un caractère ecclésial et social. C'est la confession à laquelle participent tous les autres pécheurs. Elle est une fruit si pur qu'il ne doit pas être consommé par un seul.

    On peut distinguer trois catégories de saints. Ceux qui ont péché et savent par expérience ce qu'est le péché. Ceux qui n'ont pas péché et ne connaissent pas le péché par expérience directe. Enfin ceux qui n'ont pas péché et qui pourtant savent ce qu'est le péché. Voici trois représentants de ces catégories: François d'Assise, la Petite Thérèse, Saint Louis de Gonzague.

    François d'Assise a péché. Il ne voit plus ses péchés en détail, il les voit comme une somme d'offenses faites à Dieu. Il aime le Seigneur d'un amour brûlant, toujours plus brûlant. Cet amour le consume. Plus son amour pour le Seigneur devient vrai, profond, intense, plus vrai, profond et intense devient aussi son sens de l'offense faite à Dieu par le péché. Ceci vaut tout autant pour ses propres péchés d'autrefois que pour tous les péchés dont il a connaissance. Lorsqu'il apprend tel ou tel événement fâcheux, ou que d'autres commettent aujourd'hui des péchés semblables à ceux qu'il commettait jadis, dans le même mélange de connaissance et d'ignorance, lorsqu'il voit comme ils préfèrent le péché à l'amour, alors il se confesse, et sa confession se situe au point brûlant des offenses faites au Seigneur; et plus son amour grandit, plus ce point se fait brûlant, devient le point vif du point vif. Il se confesse en quelque sorte hors du temps. Plus son amour le consume, plus il sent combien il devrait le consumer davantage. Dans cette exaltation il voit aussi l'exaltation des offenses faites à Dieu. Et le péché se subdivise pour lui dans des domaines marqués par ses propres péchés. Il se confesse de ce décalage, et tous les saints de cette catégorie le font. Il n'a plus triché, mais il n'a pas assez aimé la vérité! Il n'a plus fait de tort à son prochain, mais il ne lui a pas fait tout le bien qu'il aurait pu, tout ce que le pur amour réclamait pour eux. Il s'accuse en quelque sorte comme du reflet de ses péchés. Parce qu'il constate mieux l'offense faite à Dieu, son péché de jadis lui indique combien sa vertu actuelle est incomplète. Il ne le voit pas de façon théorique, mais comme une simple et impérieuse réalité. Il est celui qui a remplacé son péché d'autrefois par la tiédeur d'aujourd'hui, qui en toute connaissance de cause ne répond pas aux exigences. Ainsi il al' air de confesser sans cesse ses péchés d'autrefois qui lui apparaissent constamment sous un jour nouveau, à mesure qu'il devient plus conscient de sa responsabilité. C'est précisément parce qu'il ne triche plus qu'il devrait avoir un amour dévorant de la vérité. Et chacune de ses confessions affine son discernement, accroît en lui le sentiment de son indignité, mais ne le pousse pas au désespoir parce qu'il sent la grâce. Il la sent d'autant plus qu'il se sent plus indigne: la miséricorde de Dieu s'occupe justement de ce pécheur misérable !

(À suivre)
La confession, Éd. Lethielleux, Collection Le Sycomore, 1981, p.231-233
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