La deuxième règle. Chez ceux qui se purifient intensément de leurs péchés et qui, dans le service de Dieu notre Seigneur, s'élèvent du bien vers le mieux, c'est la manière de faire inverse de celle de la première règle. Car, alors, le propre du mauvais esprit est de mordre, d'attrister et de mettre des obstacles, en inquiétant par de fausses raisons pour qu'on n'aille pas plus loin. et le propre du bon esprit est de donner courage et forces, consolations, larmes, inspirations et quiétude, en rendant les choses faciles et en écartant tous les obstacles, pour qu'on aille plus avant dans la pratique du bien.
La troisième règle. De la consolation spirituelle. J'appelle consolation quand se produit dans l'âme quelque motion intérieure par laquelle l'âme en vient à s'enflammer dans l'amour de son Créateur et Seigneur, et ensuite quand elle ne peut plus aimer aucune chose créée sur la face de la terre pour elle-même, mais seulement dans le Créateur de toutes ces choses.
De même, quand elle verse des larmes qui portent à l'amour de son Seigneur, soit à cause de la douleur ressentie pour ses péchés ou pour la Passion du Christ notre Seigneur, soit pour d'autres choses droitement ordonnées à son service et à sa louange.
Enfin, j'appelle consolation tout accroissement d'espérance, de foi et de charité, et toute allégresse intérieure qui appelle et attire aux choses célestes et au salut propre de l'âme, l'apaisant et la pacifiant en son Créateur et Seigneur.
La quatrième règle. De la désolation spirituelle. J'appelle désolation tout le contraire de la troisième règle, comme par exemple, obscurité de l'âme, trouble en elle, motions vers les choses basses et terrestres, absence de paix venant de diverses agitations et tentations qui poussent à un manque de confiance; sans espérance et sans amour, l'âme se trouvant toute paresseuse, tiède, triste et comme séparée de son Créateur et Seigneur.
Car de même que la consolation est contraire à la désolation, de même les pensées qui proviennent de la consolation sont contraires aux pensées qui proviennent de la désolation.
La cinquième règle. Au temps de la désolation ne jamais faire de changement, mais être ferme et constant dans les résolutions et dans la décision où l'on était lors de la consolation précédente. Car, de même que dans la consolation c'est davantage le bon esprit qui nous guide et nous conseille, de même dans la désolation c'est le mauvais: avec ses conseils, nous ne pouvons prendre le chemin pour réussir.
La sixième règle. Bien que dans la désolation nous ne devions pas changer nos résolutions premières, il est très profitable de se changer vigoureusement soi-même face à cette désolation; par exemple, en insistant davantage dans l'oraison et la méditation, en s'examinant avec soin et en donnant, d'une manière convenable, plus de place à la pénitence.
La septième règle. Celui qui se trouve dans la désolation considérera comment le Seigneur l'a laissé, dans l'épreuve, à ses facultés naturelles, afin qu'il résiste aux diverses agitations et tentations de l'ennemi; car il le peut avec le secours divin qui lui reste toujours, même s'il ne le sent pas clairement. En effet, si le Seigneur lui a retiré sa grande ferveur, son immense amour et sa grâce intense, il lui reste cependant la grâce suffisante pour le salut éternel. (à suivre)