D'abord la distance historique qui nous sépare de la première fête de Noël, de la naissance de Jésus. Cela fait près de deux mille ans, c'est beaucoup! Avec tous les événements qui se sont produits depuis lors, et surtout avec la sécularisation contemporaine, avec l'accélération de l'histoire ces dernières années, avec la société de consommation, la naissance de Jésus nous paraît relever de la préhistoire. Nous la commémorons comme un événement qui appartient au passé et dont la vérité originelle est difficile à récupérer.
Ensuite il y a la distance qui naît de ce que nous pourrions appeler l'extraordinaire concentration de l'histoire humaine en un seul événement, ce qui répugne à notre sens du rationnel et de l'universel. Est-il vraiment possible, nous demandons-nous, que voici près de deux mille ans, à cette époque, en ce lieu, à Bethléem, l'histoire de l'humanité ait connu son point tournant, son moment décisif et déterminant? Même si nous ne regardons pas seulement la naissance à Bethléem mais - comme l'Église nous l'enseigne - l'ensemble de la vie de Jésus (sa prédication, ses miracles, sa passion, sa mort et sa résurrection), il ne s'agit toujours que d'un milieu restreint, d'un épisode éloigné dans le temps, et d'une culture bien différente de la nôtre. Est-il vraiment possible que de ces temps éloignés et de la destinée d'une seule personne dépende toute l'histoire du monde, comme nous l'affirmons ce soir en adorant l'enfant Jésus, en rendant grâces à Dieu et en chantant "Gloire à Dieu au plus haut des cieux"?