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Praedicatho homélies à temps et à contretemps

Praedicatho homélies à temps et à contretemps

C'est par la folie de la prédication que Dieu a jugé bon de sauver ceux qui croient. Devant Dieu, et devant le Christ Jésus qui va juger les vivants et les morts, je t’en conjure, au nom de sa Manifestation et de son Règne : proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire. Crédit peintures: B. Lopez


Cardinal J. Ratzinger, Conséquences pour notre temps

Publié par Walter Covens sur 3 Novembre 2006, 19:56pm

Catégories : #la vache qui rumine (Années B - C)

    Au terme de ces réflexions, revenons à la question que nous nous posions plus haut: quelles relations entretiennent le bâtiment de pierre et le bâtiment de pierres vivantes? Est-il chrétien de célébrer la construction d'une cathédrale? Et, si oui, que célébrons-nous? Comment devons-nous célébrer pour célébrer vraiment, chrétiennement? Je poserai quatre jalons sur le chemin de la réponse.

    1. C'est l'Esprit qui édifie les pierres, non l'inverse. L'Esprit ne peut être remplacé par l'argent ou par l'histoire. Là où ce n'est pas l'Esprit qui construit, les pierres en deviennent muettes. Là où l'Esprit n'est pas vivant, où il n'agit et ne règne pas, les cathdrales deviennent des musées, des monuments commémoratifs du passé, d'une beauté triste parce que morte. Telle est pour ainsi dire la leçon de cette fête de la cathédrale. La grandeur de notre histoire et nos possbilités financières ne nous apportent pas le salut; elles peuvent devenir gravats sous lesquels nous étouffons. Si ce n'est pas l'Esprit qui construit, l'argent construit en vain. La foi seule peut garder vivantes les cathédrales et la cathédrale millénaire nous interpelle; avons-nous la force de la foi, qui seule peut lui donner présent et avenir? En fin de compte, ce n'est pas le service de protection des monuments – quelque important et précieux qu'il soit – qui pourra entretenir la cathédrale, mais bien l'Esprit qui l'a créée.

    2. C'est l'Esprit qui édifie les pierres, on l'inverse – mais cela signifie aussi, que cela nous plaise ou non, que toutes les églises sont fondamentalement interchangeables et d'égale dignité. Dès lors que les hommes se réunissent à l'appel du Seigneur, qu'il leur offre sa présence dans la parole et dans le sacrement, s'accomplit ce qui est dit de la maison de prière pour tous les peuples et s'accomplit la promesse de la « pièce du haut », de la salle de la Cène. Les différences de rang entre les différentes églises ne toruvent leur place qu'à un deuxième niveau. Elles ne sont pas sans signification pour autant. Abstraction faite de l'histoire de l'art, un édifice religieux peut se réclamer d'un rang particulier à deux titres. Ce rang peut lui venir de l'histoire de la foi et de la prière, qui s'est comme cristalisée en lui. Il n'est pas indifférent que nous priions dans ces mêmes églises où nos ancêtres ont porté devant Dieu, des siècles durant, leurs demandes et leurs espérances. Dans l'église Ludgeri de Münster, je me sens toujours profondément ému à la pensée qu'en ce lieu Édith Stein a lutté pour sa vocation. Et ce n'est là qu'une miette de l'histoire de la foi et de la prière, de l'histoire des pécheurs et des saints, que renferment nos grandes églises anciennes. De ce fait, elles sont aussi l'expressio de l'identité de la foi tout au long de l'histoire, l'expression de la fidélité de Dieu dont témoigne l'unité de l'Église. Ou alors ne devrions-nous pas nous émouvoir de savoir que dans sa cathédrale, il y a mille ans, l'évêque de Mayence a prononcé les mêmes paroles de consécration et utilisé pour l'essentiel le même missel que ses successeurs d'aujourd'hui? L'autre motif qui peut distinguer une église, c'est sa place dans l'oronnance de l'assemblée vivante qui est l'Église. C'est là ce qui vaut son rang particulier à l'église épiscopale, qui renvoie à l'évêque autour de qui se rassemble la communauté ecclésiale. La cathédrale est l'expression, matérialisée en une construction de pierre, de ce que l'Église n'est pas une masse amorphe de communautés, mais qu'elle tient sa vie d'un entrelacement qui relie toute communauté particulière, par-delà elle-même, à la totalité de l'Église, grâce à la cohésion de l'ordre épiscopal. Le Iie concile du Vatican, qui a rappelé si vigoureusement l'ordre épiscopal de l'Église, a aussi souligné avec insistance, en toute logique, le rang de l'église cathédrale. Les églises particulières renvoient à elle, sont pour ainsi dire construites autour d'elle et coopèrent, par cette cohésion et cet ordre, à l'assemblée et à l'unité de l'Église. Pour la même raison, l'église épiscopale de l'évêque de toute la chrétienté, l'église du Latran et Saint-Pierre de Rome, nous est aussi particulièrement chère: non pas parce que Dieu y est davantage présent qu'en n'mporte quelle église de village, mais parce qu'elle est l'expression de l'assemblée, de l'unicité de la maison de Dieu dans les innombrables maison de Dieu sur terre. Récuses ces liens, nier cette coordination des élgises entre elles renviedrait à nier précisément la promesse de la maison de Dieu pour tous les peuples. Elle se réalise précisément dans le fait que l'ordre apostolique de l'assemblée se reflète dans la coordination des lieux où se tiennent les assemblées, qui deviennent de ce fait une seule et même maison.

    3.Cela signifie que toutes les maisons de Deu doivent rester fondamentalement ouvertes à tous, qu'elles appartiennent à toute l'Église ou ne sont pas vraiment églises. Pour garder sa légitimité chrétienne, pour être « catholique » au sens originel de ce mot, l'église doit être le lieu où tout croyant, d'où qu'il soit, se sent chez lui. Il y a un certain nombre d'années paraissait un livre de photographies intitulé: « Tu es partout chez toi. » Ces mots sont en fait l'expression d'une mission de l'Église qui s'est mise en route en ayant pour devise d'être la maison de prière pour tous les peuples. Dans une de ses premières oeuvres, où il raconte son voyage à Prague, Albert Camus exprime de façon bouleversante son vécu en terre étrangère, son vécu d'isolement: dans une ville dont il ne comprend par la langue, il est comme un exilé; la magnificence des églises elle-même reste muette et ne console pas. Il ne evrait pas pouvoir en être ainsi pour le croyant; dès lors qu'il y a église, qu'il y a présence eucharistique du Diengeur, il se sent chez soi, il se sent dans sa patrie. Mais pour qu'il puisse en être ainsi il faut d'abord, à l'inverse, que la foi soit vécue comme réunion, comme unité. Il faut que les hommes qui entrent dans le pays de la foi laissent ce qui est seulement d'eux-mêmes, il faut qu'ils laissent se faire en eux la catholicité, la réunion au tout comme processus vivant. Il faut qu'ils prennent sur eux d'être étrangers à l'esprit du temps et aux innombrables formes de chauvinisme, prise de distance qui est nécessaire pour qu'en tous lieux l'église devienne la patrie pour le tout, pour que l'on se retrouve pour ainsi dire dans la même maison en tous lieux. Voici qui nous interpelle à nouveau: qu'en est-il réellement? Les travailleurs étrangers y trouveront-ils des hommes qui leur témoignent de la compréhension? À le bien comprendre, ce dépassement de soi qui est l'enjeu ici relève pleinement de la théologie de la passion, que nous avons rencontrée u début de notre itinéraire chrétien: celui-là seul qui s'est engagé sur le cheminde la libération à l'égard de son propre moi et qui y a fait au moins quelques pas peut rencontrer l'étranger et lui offrir un chez-soi. Les Pères évoquaient cette belle image: pour devenir constructionl, es pierres doivent être taillées pour s'ajuster les unes aux autres et ce travail n'est pas épargné aux hommes qui veulent devenir une construction.

    4. Revenons, une fois encore, à la question fondamentale de l'esprit et de la pierre, de la maison vivante et de la construction de pierre. Ce que visent les paroles du Christ et que prolonge ensuite l'Église primitive, nous sommes fondés à le qualifier de « spiritualisation ». Mais, s'il ne s'agissant que de cela, le christianisme ne s'élèverait pas au-dessus d'une tendance que nous retrouvons à l'époque de Jésus dans tout le bassin méditerranéen, dans le judaïsme comme dans le monde hellénistique. Ce qui fait la singularité du christianisme, c'est que la spiritualisation chrétienne est en même temps une incarnation. Paul l'a définie magnifiquement: Le Seigneur est l'Esprit (2 Co 3, 17). C'est ce qui distingue la spiritualisation chrétienne de toutes les spiritualisations philosophiques ou seulement mystiques. L'Esprit, en qui se convertit tout ce qui était jusque-là, est le corps du Christ. Un authentique déploiement du jaillisssment chrétien doit donc ce retourner contre toute plate propagande de spiritualisation qui voudrait un Esprit sans corps et détruirait du même coup l'Esprit. Nous devons aussi récuser, certes, l'erreur inverse qui pense trouver dans le mot vedette « incarnation » la justification de toute forme de sécularisation et de fication institutionnelle de la foi. À l'apogée de la théologie de l'incarnation, on disait volontiers qu'il fallait baptiser les choses terrestres. Bon, mais il ne faut pas oublier, dans ce cas, qu'être baptisé signifie passer par la transformation de la mort, ou y entrer pour se porter ainsi à la rencotre du Christ ressuscité. Spiritualiser signifie, pour le chrétien, incarner, mais incarner signifie spiritualiser, porter les choses du monde au Christ qui vient, les préparer à leur statut à venir et préparer ainsi l'avenir de Dieu dans le monde. Nous trouvons chez Irénée cette très belle idée que le sens de l'incarnation a été pour ainsi dire, en Jésus, l'Esprit – l'Espritsaint – à la chair. Renversant cette affirmation, on pourrait dire: le sens de l'incarnation qui se continue ne peut être, à l'inverse, que d'habituer la chair à l'Esprit, à Dieu, de la rendre capable de l'Esprit, préparant ainsi son avenir.

    Mais que signifie tout cela pour notre question? Je crois que cela nous ramène d'abord à ce qu'il y a de plus élémentaire, à ce qui est au coeur de toutes les affirmations du Nouveau Testament; en réalité, c'est Dieu lui-même qui construit d'abord sa maison, ou, en termes plus accessibles pour nous, de nous-mêmes, seuls, nous ne pouvons rien faire. Une telle affirmation se retourne autant contre ceux qui croient que c'en est fait avec quelques mètres cubes de maçonnerie que contre ceux qui veulent fabriquer une Église toute nouvelle, chimiquement pure, dans les cornues de leurs stratégies pastorales. C'est dieu qui bâtit sa maison, c'est-à-dire qu'elle ne s'édifie pas là où les hommes veulent tout planifeir eux-mêmes, tout faire et produire par eux-mêmes. Elle ne s'édifie pas là où ne compte que le succès et où toutes les « stratégies » se mesurent au succès. Elle ne s'édifie pas là où les hommes ne sont pas disposés à lui ouvrir espace et temps de leur vie; elle ne s'édifie pas là où les hommes ne construisent qu'eux-mêmes et pour eux-mêmes. Mais, là où des hommes se laissent accaparer pour Dieu, ils trouvent du temps pour lui et il se trouvera aussi place pour lui. Ils peuvent oser représenter dans l'aujourd'hui ce qui est à venir, l'habitation de Dieu avec nous et notre assemblée par lui, qui fait frères et soeur d'une même maison. Dès lors, nous acceptons la simplicité tout aussi naturellement que nous reconnaissons le droit à la beauté, au beau. Oui, c'est seulement dans une telle spiritualisation du mond en vue du Christ qui vient que le beau manifeste toute sa force transformante et consolante. Et nous assistons alors à ce miracle: la maison de Dieu est la vritable maison des hommes. Elle devient même d'autant plus la maison des hommes qu'elle cherche moins à l'être, qu'elle est simplement construite pour lui. Imaginons un instant ce que serait l'Europe sans ses églises. Elle serait un désert d'utilitarisme où le coeur n'aurait plus sa place. La terre devient inhabitble dès lors que les hommes veulent l'habiter seuls. Plus rien ne se construit là où les hommes ne veulent plus construire qu'eux-mêmes et pour eux-mêmes. Mais là où ils acceptent de ne pas occuper toute la place, de faire don de leur espace et de leur temps, là s'édifie la maison de la communauté, là devient présent quelque chose de l'utopie, de l'impossible sur terre. La beauté de la cathédrale n'est pas en contradiction avec la théologie de la croix, mais elle est son fruit: elle est née de la disposition à ne pas construire sa propre ville seul et pour soi seul. Le message pour nos visées propres n'en est pas exclu pour autant, bien sûr. Aucune église n'a promesse d'éternité, aucune n'est irremplaçable, toute église peut nous être ravie si s'évanouit la force vive qui la justifie.
    
    « Construire de pierres vivantes » - s'il n'y avait pas d'abord eu des pierres vivantes, ces pierres-ci ne seraient pas là. Mais maintenant elles nous parlent. Elles nous invitent à construire la cathédrale vivante, à être la cathédrale vivante, pour que la cathédrale de pierre demeure et annonce l'avenir.

Un chant nouveau pour le Seigneur, Desclée-Mame 1995, p. 122-127
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H
Bonjour mon père ,la question que je vais vous poser n'a aucun rapport avec l'homélie du jour.Dans le magazine du france -antilles d'aujourd'hui ,on parle de la Vierge noire .Quelle en est l'origine?
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W
Je n'ai pas le journal en question (pour ceux qui ne connaissent pas, c'est le journal local de la Martinique et de la Guadeloupe). Il y a non pas une Vierge  noire, mais plusieurs vierges noires, par exemple celle de Chartres, du Puy, de Rocamadour, de Czestochowa, de Guadalupe, de Montserrat... Comme je n'ai pas plus de précisions, je ne sais pas de laquelle il s'agit. Ce sont des représentations de Marie, Mère du Christ, généralement assise, et tenant l'Enfant Jésus, également assis. Ces statues étaient nombreuses dans le Massif Central (France), en Catalogne et en Provence. Elles tirent leur nom de la couleur noire du bois utilisé. L'origine est peut-être à chercher dans ce verset du Cantique des Cantiques (1, 5): "Je suis noire et pourtant belle".

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