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Publié par Walter Covens

    Le désir que Dieu a de nous faire observer ses commandements est extrême, ainsi que toute l'Ecriture témoigne: et comme le pouvait-il mieux exprimer que par les grandes récompenses qu'il propose aux observateurs de la loi, et les étranges supplices dont il menace les violateurs d'icelle? C'est pourquoi David exclame: Ö Seigneur, vous avez ordonné que vos commandements soient trop plus observés.

    Or, l'amour de complaisance, regardant ce désir divin, veut complaire à Dieu en l'observant; l'amour de bienveillance, qui veut tout soumettre à Dieu, soumet par conséquent nos désirs et nos volontés à celle-ci que dieu nous a signifiée: et de là provient non seulement l'observation, mais aussi l'amour des commandements, que David exalte d'un style extraordinaire au Psaume cent-dix-huitième, qu'il semble n'avoir fait que pour ce sujet:

Que j'aime votre loi d'un très ardent amour!
C'est tout mon entretien, j'en parle tout le jour.
Ö Seigneur, je chéris vos très saints témoignages
Plus qu' l'or et l'éclat du topaze doré.
Que doux à mon palais sont vos sacrés langages!
Pour moi, fade est le miel s'il leur est comparé.

    Mais pour exciter ce saint et salutaire amour des commandements, nous devons contempler leur beauté, laquelle est admirable; car, comme il y a des oeuvres qui sont mauvaises parce qu'elles sont défendues, et des autres qu sont défendues parce qu'elles sont mauvaises, aussi y en a-t-il qui sont bonnes parce qu'elles sont commandées, et des autres qui sont commandées parce qu'elles sont bonnes et très utiles: de sorte que toutes sont très bonnes et très aimables, parce que le commandement donne la bonté aux unes qui n'en auraient point autrement, et donne un surcroît de bonté aux autres qui, sans être commandées, ne laisseraient pas d'être bonnes. Nous ne recevons pas le bien en bonne part quand il nous est présenté par une main ennemie (...) : au contraire, le présent n'est jamais qu'agréable quand un ami le fait. Les plus doux commandements deviennent âpres si un coeur tyran et cruel les impose, et ils deviennent très aimables quand l'amour les ordonne (...). Ö que doux et désirable est le joug de la loi céleste qu'un Roi tant aimable a établie sur nous!

    Plusieurs observent les commandements comme on avale les médecines; plus crainte de mourir damnés, que pour le plaisir de vivre au gré du Sauveur. ains, comme il y a des personnes qui, pour agréable que soit un médicament, ont du contrecoeur à le prendre, seulement parce qu'il porte le nom de médicament, aussi y a-t-il des âmes qui ont en horreur les actions commandées, seulement parce qu'elles sont commandées; et s'est trouvé tel homme, ce dit-on, qui ayant doucement vécu dans la grande ville de Paris l'espace de quatre-vingts ans sans en sortir, soudain qu'on lui eu enjoint de par le Roi d'y demeurer encore le reste de ses jours, il alla dehors voir les champs, que de sa vie il n'avait désiré.
   
    Au contraire, le coeur amoureux aime les commandements, et plus ils sont de chose difficile plus il les trouve doux et agréables, parce qu'il complaît plus parfaitement au Bien-aimé et lui rend plus d'honneur; il lance et chante des hymndes d'allégresse quand Dieu lui enseigne ses commandements et justifications. Et comme le pèlerin qui va gaiement chantant en son voyage ajoute voirement la peine du chant à celle du marcher, et néanmoins, en effet, par ce surcroit de peine il se désennuie et allège du travail du chemin, aussi l'amant sacré trouve tant de suavité aux commandements, que rien ne lui donne tant d'haleine et de soulagement en cete vie mortelle que la gracieuse charge des préceptes de son Dieu; dont le saint Psalmiste s'écrie: Ö Seigneur, vos justifications ou commandements me sont des douces chansons en ce lieu de mon pèlerinage. "On n'a point de travail en ce qui est aimé, ou s'il y a du travail c'est un travail bien-aimé;" (Mt 5, 6) le travail mêlé du saint amour est un certain aigre-doux, plus agréables au goût du'un pure douceur.

    Le divin amour nous rend donc ainsi conformes à la volonté de Dieu, et nous fait soigneusement observer ses commandements en qualité de désir absolu de sa divine Majesté, à laquelle nous voulons plaire: si que cette expérience prévient, par sa douce et amiable violence, la nécessité d'obéir que la loi nous impose, convertissant cette nécessité en vertu de dilection et tout la difficulté en délectation.

Traité de l'Amour de Dieu, Livre VIII, chapitre V
Oeuvres, Ed.Gallimard, 1969
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