La première vague de désobéissance au sein du clergé date d'il y a un siècle. Rome avait réagi avec dureté et tout s'était terminé par un petit schisme. Le cardinal Brandmüller propose que l'on agisse de la même manière aujourd'hui aussi, contre les nouveaux rebelles
Un article qui, dès les premières lignes, évoque le mouvement anti-romain "Los von Rom", né en Autriche à la charnière entre le XIXe et le XXe siècle, qui "parvint, en un peu moins de dix ans, à inciter environ 100 000 catholiques autrichiens à s’éloigner de l’Église".
Ce mouvement – poursuit le cardinal, qui fait ainsi le lien avec l’actualité – "a été relancé au lendemain du concile Vatican II". Mais pas seulement. "Des tendances analogues semblent réapparaître de temps en temps, y compris à l’heure actuelle, dans certains appels à la désobéissance envers le pape et les évêques".
En écrivant cela, le cardinal fait évidemment référence à ce qui se passe actuellement à Vienne et aux environs avec la "Pfarrer Initiative" qui a été lancée en 2006 par Mgr Helmut Schüller – vicaire général du cardinal Christoph Schönborn dans la capitale autrichienne jusqu’en 1999 et ancien président de Caritas Autriche – et qui compte parmi ses objectifs caractéristiques l’abolition du célibat et le retour au ministère sacerdotal de prêtres “mariés” et vivant en concubinage.
Ce mouvement est soutenu par plus de 400 prêtres et diacres et il a lancé ouvertement contre Rome un “Appel à la désobéissance” qu’il cherche à étendre au-delà des frontières autrichiennes pour créer un réseau international. Certaines franges du clergé d’Allemagne, de France, de Slovaquie, des États-Unis, d’Australie y ont déjà adhéré. Schüller lui-même s’est rendu en Irlande, au mois d’octobre dernier, pour faire des prosélytes.
Au Vatican, cette initiative est suivie avec beaucoup d’inquiétude, à tel point qu’une réunion confidentielle à laquelle participaient une délégation des évêques autrichiens et les dirigeants des plus importants dicastères du Vatican a été consacrée à cette question le 23 janvier dernier. Étaient en effet présents à cette rencontre, qui s’est tenue au palais du Saint-Office : pour l'Autriche le cardinal Schönborn, l’archevêque de Salzbourg Alois Kothgasser, les évêques de Graz et de Sankt-Polten, Egon Kapellari et Klaus Küng ; pour le Vatican, entre autres, les cardinaux préfets des congrégations pour la doctrine de la foi, William J. Levada, pour les évêques, Marc Ouellet, et pour le clergé, Mauro Piacenza.
Le cardinal Schönborn, de même que les autres évêques, a pris fermement ses distances par rapport à la "Pfarrer Initiative" et il a critiqué aussi bien la forme que le contenu de l'appel, contre lequel il n’a toutefois lancé aucune action canonique jusqu’à maintenant.
Mais revenons-en à ce qu’a écrit le cardinal Brandmüller.
L’article analyse par ailleurs le schisme qui se produisit en Bohême après la première guerre mondiale autour du mouvement de protestation "Jednota". Celui-ci avait également comme cheval de bataille "l’abolition de l’obligation du célibat". Et son leader était Bohumil Zahradnik, "prêtre et romancier, qui vivait depuis 1908 une union matrimoniale illégitime".
Ce schisme conduisit à la proclamation d’une “Église tchécoslovaque”, le 8 janvier 1920. Mais ce qui intéresse le plus le cardinal, c’est d’analyser de quelle manière le Saint-Siège, dirigé par Benoît XV, réagit à cette rébellion du clergé de Bohême.
La cause principale du schisme fut trouvée dans la "formation insuffisante du clergé au cours des décennies précédentes, d’un point de vue à la fois théologique et spirituel", ce qui avait provoqué "une crise qui faisait vaciller la foi catholique sur ses bases".
Voilà pourquoi Rome refusa d’amadouer les prêtres rebelles par des concessions. Le Saint-Office les frappa "immédiatement" d’excommunication et obtint le soutien total des évêques. Et Benoît XV coupa court à toute illusion quant à un relâchement de la "sacro-sainte et extrêmement salutaire" loi du célibat.
Ainsi donc, en fin de compte, le schisme ne concerna qu’une petite fraction des catholiques de Bohême. Et l'auteur de l'article de conclure : "Ce comportement du Saint-Siège, déterminé non pas par des réflexions politiques et pragmatiques mais uniquement par la vérité de la foi", s’est révélé "le seul bon" à suivre.
C’est ainsi que s’achève la réflexion de Brandmüller, que "L'Osservatore Romano" qualifie simplement de "cardinal diacre du titre de Saint-Julien-des-Flamands", mais qui est bien plus que cela. Universitaire, il a été pendant près de 30 ans professeur d’histoire de l’Église médiévale et moderne à l’Université d’Augsbourg ; de 1998 à 2009 il a présidé la commission pontificale des sciences historiques, dont il a commencé à faire partie en 1981, lorsqu’il a été appelé à succéder à Hubert Jedin, le grand historien du concile de Trente, qui était mort l’année précédente.
Né en 1929, Brandmüller a toujours été très estimé de son collègue enseignant et compatriote bavarois Joseph Ratzinger. Celui-ci, devenu Benoît XVI, l’a maintenu jusqu’à son 80e anniversaire à la tête du comité et il a voulu l’honorer en le créant cardinal au consistoire du 20 novembre 2010.
Grand expert de l’histoire des conciles, Brandmüller ne dédaigne pas la polémique savante, comme lorsque, dans un article publié simultanément, le 13 juillet 2007, par "L'Osservatore Romano" et par le quotidien de la conférence épiscopale italienne "Avvenire", il avait critiqué à fond la composition de l’ouvrage “Conciliorum Oecumenicorum Generaliumque Decreta” publié sous la direction de l’école historique de Bologne.
Il ne dédaigne pas non plus de parler de l’actualité en montrant les analogies qu’elle présente avec le passé. C’est ce qu’il fait dans l’article qui a été publié le 11 mars 2012 par le quotidien du Vatican et qui est reproduit ci-dessous dans son intégralité.
Et si, dans ce cas-là, l’histoire peut vraiment devenir “magistra vitæ”, et si Benoît XVI veut agir – envers la "Pfarrer Initiative" et d’autres mouvements de prêtres rebelles – comme l’avait fait Benoît XV il y a presque un siècle de cela, c’est... une autre histoire.
COMMENT NAQUIT UN SCHISME
par Walter Brandmüller
"Sans Judée, sans Rome, nous construisons la Cathédrale allemande". C’est ce qu’affirmait le mouvement "Los von Rom" du chevalier Georg von Schönerer. Né en Autriche à la charnière entre le XIXe et le XXe siècle et tendant à la séparation d’avec l’Église de Rome, ce mouvement était fondé sur des idées pangermanistes, anticléricales et antisémites. Par la suite, les nationaux-socialistes vinrent eux aussi puiser à ce réservoir idéologique.
De fait, à l’époque, son intense propagande, appuyée par l’association protestante allemande "Gustaf Adolf Verein", parvint, en un peu moins de dix ans, à inciter environ 100 000 catholiques autrichiens à s’éloigner de l’Église.
Un demi-siècle plus tard, au lendemain du concile Vatican II, ce mouvement a été relancé. Et des tendances analogues semblent réapparaître de temps en temps, y compris à l’heure actuelle, dans certains appels à la désobéissance envers le pape et les évêques.
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[Plus au nord,] la désagrégation de la monarchie des Habsbourg et la création, le 28 octobre 1918, de la République Tchécoslovaque firent exploser, chez beaucoup de membres du clergé tchèque qui avaient des idées nationalistes, une tendance, déjà virulente depuis quelque temps, à s’émanciper de la domination, qu’ils avaient du mal à supporter, de l’état et de l’église autrichiens.
Rapidement un mouvement de protestation, Jednota, commença à élaborer son programme. Initialement, cette entité, qui existait déjà depuis 1890, était dirigée contre l’épiscopat fidèle aux Habsbourg. Puis elle en vint à vouloir constituer "une Église nationale démocratisée et nationalisée, indépendante de Rome" [pour reprendre l’expression employée par Emilia Hrabovec dans son ouvrage "Der Heilige Stuhl und die Slowakei 1918-1922 im Kontext internationaler Beziehungen", 2002]. À cela vint s’ajouter la demande d’une liturgie dans la langue nationale, d’une simplification de la prière du bréviaire et – avant tout – de l'abolition de l’obligation du célibat.
Comme il n’existait pas encore de représentation du Vatican à Prague, le nonce à Vienne, Teodoro Valfrè di Bonzo, décida, à la fin du mois de février 1919, de se rendre à Prague afin de se faire une idée personnelle de la situation. Par ailleurs, déjà avant cela, l’irréprochable archevêque de Prague, le comte Pavel Huyn, qui n’était pas un autochtone, avait reçu du cardinal secrétaire d’état, Pietro Gasparri, l’ordre de quitter son diocèse et de ne pas y retourner. Les motivations qui avaient conduit à ces décisions étaient nettement politiques.
Le nonce se rendit donc à Prague, où il rencontra également les dirigeants de Jednota. On lui présenta une liste de demandes, rédigée par Bohumil Zahradník, prêtre et romancier, qui vivait depuis 1908 une union matrimoniale illégitime et que le gouvernement avait appelé à la tête de la section du ministère de l’Instruction publique chargée de l’Église.
Ces demandes concernaient principalement l’abolition du droit de patronage dont disposait l’aristocratie, le choix des évêques par le clergé et par le peuple, la dotation économique du clergé, l’utilisation de la langue tchèque dans la liturgie, la démocratisation de la constitution ecclésiastique, mais, avant tout, la suppression du célibat et des vêtements cléricaux.
De fait, avec la fin de la monarchie, le droit de patronage de l’aristocratie était devenu obsolète, et la nomination d’évêques autochtones, tchèques ou slovaques, était certainement en ligne avec la pensée de Benoît XV.
La question de la langue utilisée dans la liturgie pouvait, elle aussi, être prise en considération. En revanche, la situation économique des prêtres ne relevait pas de la compétence de Rome.
Mais tout le reste était inconciliable avec la foi et avec le droit de l’Église. Le nonce n’avait là aucun espace de négociation. C’est pourquoi la délégation de Jednota qui se rendit à Rome vers le milieu du mois de juin 1919 pour être reçue par le pape, en accord avec le gouvernement et aux frais de celui-ci, n’eut aucun succès, elle non plus.
En tout état de cause, la nomination du très estimé professeur tchèque František Korda? comme archevêque de Prague, au mois de septembre 1919, fut la réponse à une attente justifiée. Mais c’est précisément à ce moment-là que se révéla le vrai visage des agitateurs, qui ne demandaient pas seulement qu’un Tchèque soit nommé à la tête du diocèse de Prague – une requête tout à fait licite et reconnue par Rome – mais voulaient également avoir un archevêque conforme à leurs désirs et à leurs idées.
En effet, aussitôt que la nomination de Korda? - un homme sincèrement attaché à l’idée nationale tchèque mais tout aussi sincèrement catholique et fidèle au pape - eut été annoncée publiquement, une vague de mécontentement se souleva contre lui chez les réformistes et ceux-ci pouvaient compter sur l’appui d’un gouvernement aux orientations laïques.
Les résultats obtenus par la délégation de Jednota qui avait été envoyée en mission à Rome furent jugés insatisfaisants par beaucoup de gens. Cela entraîna une division des esprits au sein du clergé. La faculté de théologie de l’université Charles IV, à Prague, prit ses distances vis-à-vis de son doyen, qui avait fait partie de la délégation.
D’une part il y eut une radicalisation, dont le noyau dur était constitué par un groupe appelé Ohnisko, c’est-à-dire point focal. Bien avant le voyage à Rome, ses membres étaient décidés à mettre en pratique les réformes qu’ils demandaient, même dans le cas d’un refus de la part du Saint-Siège.
C’est pourquoi, au mois d’août 1919, ils incitèrent les prêtres à contracter mariage publiquement. L’un des premiers à le faire fut Zaradník, déjà cité plus haut, dont le mariage civil ne fut que la légalisation d’un concubinage qui perdurait depuis plusieurs années déjà. Les prêtres qui suivirent son exemple furent, dans la plupart des cas, embauchés par des services de l’État et, au mois de septembre, 1 200 demandes de dispense de célibat émanant de prêtres furent adressées au nonce à Vienne.
Puis, sous l’influence d’un nouveau gouvernement anticlérical, on en arriva à une radicalisation encore plus aigüe de Jednota, dont les protagonistes se dirigèrent résolument vers le schisme. "Une fois de plus, il apparut que la question du célibat constituait l’un des ressorts les plus puissants du mouvement schismatique" (Hrabovec). Le 8 janvier 1920, l’“Église tchécoslovaque” fut proclamée et, peu de temps après, elle fut pourvue d’un "patriarche" en la personne du prêtre Karel Farský.
Comme le montre le recensement de 1921, 3,9 % des Tchèques adhérèrent à cette Église, tandis que 76,3 % d’entre eux restaient fidèles à l’Église catholique. Neuf ans plus tard, 5,4 % adhéraient au schisme et 73,5 % à l’Église catholique. Aujourd’hui, la communauté qui se définit comme Église tchèque-hussite doit compter environ 100 000 membres. Tels sont les faits historiques.
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Maintenant il convient de se demander comment le Saint-Siège réagit à cette évolution de la situation. Il est intéressant de constater que la première chose que fit le nonce Valfré di Bonzo fut de chercher quelles étaient les raisons qui avaient provoqué tout cela.
Le nonce ne se limita certainement pas à une analyse superficielle. Il est indiscutable qu’il comprit notamment dans quelle mesure le mouvement de protestation était dû au ressentiment qu’éprouvait une partie importante de la population tchèque envers les Habsbourg et envers Rome, ressentiment alimenté par la glorification de Jan Hus en tant que symbole du soulèvement national contre Rome, et de quelle manière ce ressentiment reflétait les tendances générales à la sécularisation de la société de l’après-guerre.
Mais il identifia, comme cause principale de l’éloignement de ces prêtres, la formation insuffisante du clergé au cours des décennies précédentes, d’un point de vue à la fois théologique et spirituel, ce qui avait par la suite entraîné chez beaucoup d’entre eux une incapacité à résister aux idées de progrès nationalistes et libérales dominantes.
Du point de vue actuel, il convient d’ajouter que les idées de ce que l’on a appelé le catholicisme réformiste allemand eurent également une certaine influence. Par ailleurs, le mouvement de réforme n’était pas l’affaire de professeurs ou d’intellectuels, mais celle du simple clergé de campagne. L’évolution que connut par la suite l’Église nationale tchèque témoigne aussi de la forte influence du modernisme. C’est ainsi que, par exemple, le catéchisme qu’avait rédigé Karel Farský affirmait que Jésus était fils de Dieu uniquement en ce sens que tous les hommes sont fils de Dieu. Jésus n’était pas Dieu, mais plutôt le plus grand des prophètes.
Il fut facile de comprendre que les racines du problème descendaient plus profondément qu’au niveau d’une quelconque réforme pratique, disciplinaire. Il est évident que de larges fractions du clergé étaient en train de traverser une crise qui faisait vaciller la foi catholique sur ses bases. Le catéchisme de Farský publié en 1922 confirma ce diagnostic.
En somme, Rome comprit pleinement la gravité de la situation. Il y avait un sérieux danger de "restructuration de l’Église catholique selon le modèle presbytéral-synodal, en une organisation ecclésiastique nationale construite à partir de la base, disposant d’une large autonomie par rapport à Rome et soumise, en fin de compte, à la souveraineté de l’État" (Hrabovec).
Face à une telle situation, le nonce Valfrè di Bonzo avait déjà conseillé au cardinal secrétaire d’état Gasparri, en vue de l’arrivée imminente de la délégation de Jednota à Rome, d’adopter une attitude sans équivoque et décidée face aux demandes tchèques. Il estimait que les dirigeants de Jednota ne pouvaient plus être reconquis, même si on leur faisait des concessions, tandis que ceux qui hésitaient encore deviendraient encore plus instables si l’on cédait. Un geste judicieux de bonne volonté à leur égard fut le rappel définitif de l’archevêque de Prague, le comte Pavel Huyn, et de ceux des évêques des diocèses slovaques qui étaient d’origine hongroise. Mais, de toute façon, à Rome, on avait déjà décidé d’agir de cette manière.
Le reste des demandes de Jednota, en particulier l’abolition de l’obligation du célibat, ne pouvait aboutir à autre chose qu’à un refus catégorique.
La recommandation de Valfré di Bonzo – qui, au fond, n’aurait même pas été nécessaire – fut intégrée dans le comportement de la curie et du pape. Le 3 janvier 1920, avant même que le schisme n’ait eu lieu, le pape avait invité le nouvel archevêque de Prague, Korda?, à convoquer immédiatement une conférence des évêques du pays qui devait être présidée par l’archevêque d’Olomouc, le cardinal Leo Skrbensky, si sa santé le lui permettait.
Tout en ayant conscience du fait que les agitateurs ne représentaient qu’une partie du clergé, on savait qu’ils avaient une grande influence sur les autres. Il fallait donc déterminer si le mouvement Jednota pouvait être remis dans le droit chemin ou s’il fallait le dissoudre. Le fait que, dans l’intervalle, les évêques aient déjà pris l’initiative et se soient réunis en conférence est révélateur de leur attitude.
Et lorsque – le 8 janvier 1920 – le schisme se produisit, la réaction du Saint-Office fut immédiate. Un décret du 15 janvier condamna sans délai la "schismatica coalitio" et la frappa d’excommunication.
Les prêtres qui adhéraient à cette Église schismatique, abstraction faite de leur situation et de leur dignité, devaient être considérés "ipso facto" comme excommuniés. Conformément au canon 2384 du "Codex iuris canonici", cette excommunication était réservée au Saint-Siège "speciali modo". Les évêques furent invités à faire connaître immédiatement ce décret aux fidèles et à les mettre en garde contre toute forme de soutien au schisme.
Peu de temps après, le pape lui-même adressa à l’archevêque Korda? une lettre datée du 29 janvier 1920, dans laquelle il indiquait qu’il avait très vivement apprécié l’initiative des évêques tchèques, leur attitude sans équivoque et leurs liens étroits avec le Saint-Siège. Il prenait acte avec satisfaction de la dissolution de Jednota par les évêques et de sa division en associations diocésaines placées chacune sous l’autorité et le contrôle de l’évêque local.
Benoît XV soulignait de manière très vigoureuse que jamais un assouplissement de la loi relative au célibat, "qua ecclesia latina tamquam insigni ornamento laetatur", ne serait approuvé. Le pape indiquait ensuite combien il tenait en grande estime les évêques, qui s’étaient montrés à la hauteur du défi que constituait cette situation difficile.
Vers la fin de cette année si dramatique et si funeste, Benoît XV revint une nouvelle fois sur le sujet, plus précisément dans une allocution qu’il prononça lors du consistoire du 16 décembre. Dans ce discours, le pape fit remarquer que, jusqu’à ce moment, ceux qui avaient tourné le dos à l’Église n’avaient pas été très nombreux et que des personnes en bien plus grand nombre étaient restées fidèles, même si elles avaient été tentées par le mauvais exemple.
Il rappela encore une fois les subtilités de l’argumentation des schismatiques, qui avaient parlé de quelques erreurs de procédure qui devaient être identifiées par Rome, et il repoussa comme trompeuses les affirmations selon lesquelles Rome envisageait d’atténuer la loi sur le célibat. Selon le pape, il était superflu de préciser à quel point ce point était éloigné de la vérité. En revanche, il affirmait sa certitude que la vitalité et la splendeur de l’Église catholique devaient une grande partie de leur force et de leur gloire au célibat des prêtres, qui devait donc être conservé intact. Cela n’avait jamais été aussi nécessaire qu’en ces temps de corruption morale et de convoitises effrénées où les gens avaient un besoin urgent du bon exemple de prêtres modèles.
Et Benoît XV de poursuivre : "Nous réaffirmons maintenant solennellement et formellement ce que nous avons déjà eu l’occasion de déclarer à plusieurs reprises, à savoir que jamais ce Siège Apostolique ne sera amené non seulement à abolir, mais même à adoucir, en l’atténuant en partie, la sacro-sainte et extrêmement salutaire loi du célibat ecclésiastique".
Il en allait de même en ce qui concernait les modifications à la constitution de l’Église. Et avec cela le Saint-Siège avait dit son dernier mot.
Le fait que le jeune et prometteur Mgr Clemente Micara ait été envoyé à Prague, au mois d’octobre 1919, avant même d’y être nommé nonce au mois de juin 1920, montre également à quel point le Saint-Siège considérait la situation comme sérieuse.
Comme Valfrè di Bonzo avant lui, il avait compris depuis longtemps que les demandes formulées par les réformateurs avaient des racines plus profondes que la simple insatisfaction que leur inspirait la situation de l’Église. Ces demandes étaient plutôt l’expression d’une crise de la foi qui se répandait de plus en plus et même d’un mouvement de séparation.
À Rome, on en était arrivé à la même conclusion, comme le démontrent la clarté et la fermeté avec lesquelles le Saint-Office aussi bien que le pape lui-même répondirent aux réformateurs tchèques. On avait compris que ceux-ci ne pouvaient plus être reconquis au moyen de négociations. Les réformateurs avaient abandonné les fondements de la foi catholique et jusqu’à ceux du christianisme même.
Que ce comportement du Saint-Siège, déterminé non pas par des réflexions politiques et pragmatiques mais uniquement par la vérité de la foi, ait été le seul bon, c’est ce qui est démontré non seulement par les recensements cités plus haut, mais également par la manifestation de masse qui réunit des centaines de milliers de personnes lors de la consécration, le 3 avril 1921, du nouvel archevêque d’Olomouc, Antonín Cyril Stojan, transformée en une impressionnante démonstration de fidélité au pape et à l’Église.
Le journal du Saint-Siège dans lequel l'article a été publié le 11 mars 2012 :
> L'Osservatore Romano
Le site du mouvement de désobéissance actuellement actif en Autriche au sein du clergé :
> Pfarrer-Initiative
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> Focus VATICAN
Traduction française par Charles de Pechpeyrou.