Les brebis sont rétives. Car lorsqu'on cherche celles qui sont égarées, elles disent (...): "Pourquoi nous appelez-vous? Pourquoi nous cherchez-vous?" (...) C'est parce que tu t'es égarée que je veux te rappeler; parce que tu vas à ta perte, que je veux te trouver. (...) Oui, j'ose le dire: je suis importun. J'entends l'Apôtre me dire: Annonce la parole, insiste à temps et à contretemps. A temps envers qui? A contretemps envers qui? A temps envers ceux qui veulent, à contretemps envers ceux qui ne veulent pas. Oui, je suis importun, j'ose dire: "Tu veux t'égarer, tu veux périr; moi, je ne veux pas". Et finalement, celui qui ne veut pas, c'est celui qui me fait peur. Si je voulais, voici ce qu'il me dirait, voici ce qu'il me reprocherait: Vous n'avez pas ramené la brebis égarée; vous n'avez pas cherché celle qui était perdue. Est-ce que je te craindrais davantage que lui? Nous sommes tous à comparaître devant le tribunal du Christ.
Redressons-nous pour le combat au jour du Seigneur, car voici venir un temps d'épreuves et d'angoisses. Mourons, si Dieu le veut, pour les saintes lois de nos Pères, afin de mériter de partager avec eux l'héritage éternel. Ne soyons pas des chiens muets, des sentinelles silencieuses, des mercenaires fuyant les loups, mais soyons des bergers aux aguets, veillant sur le troupeau du Chirst, proclamant la volonté de Dieu au petit et au grand, au riche et au pauvre, aux hommes de toutes conditions et de tous âges, à temps et à contretemps, dans la mesure où Dieu nous en donnera la force.
Forcez-les d'entrer (Lc 14, 23). S'il n'y avait pas dans la grâce une espèce de violence, Jésus Christ ne dirait pas: Personne ne vient à moi que mon Père ne le tire. Et encore: Quand j'aurai été élevé de terre, je tirerai tout à moi (Jn 6, 44; 12, 32).
Les prédicateurs de l'Evangile doivent user au dehors d'une espèce de force: Pressez, priez, reprenez, corrigez, non seulement avec toute patience et toute doctrine, mais encore avec tout empire: parlez à propos et hors de propos; ne souffrez pas qu'on vous méprise (2 Tm 4, 2); Tt 2, 15). Cette force est salutaire, et la faiblesse humaine en a besoin.
Les fidèles, grands et petits, se doivent servir du pouvoir qu'il ont, avec prudence toutefois et modération, pour réprimer les scandales et abattre le règne de l'iniquité. Les hommes veulent quelquefois être forcés, et une douce violence prépare les esprits à écouter.
L'histoire de l'Eglise est l'histoire de la parole de Dieu, de cette parole qui, de même qu'elle a créé la lumière et l'univers et couronné la création en formant l'homme, fait sortir les morts du tombeau, commande aux vents et aux tempêtes; et parce que, selon le mot de l'Apôtre, le monde n'a pas connu, par le moyen de la sagesse, Dieu dans la Sagesse de Dieu, il a plu à Dieu d'opérer par la folie de la prédication le salut des croyants (1 Co 1, 21). Cette parole retentit d'éternité en éternité, à travers les siècles; bienheureux ceux qui l'écoutent, car c'est une parole de vie éternelle! C'est une parole que le Verbe de Dieu incarné fit passer de ses lèvres sur celles des apôtres, comme une parole de réonciliation entre le ciel et la terre, lorsqu'il leur dit: Allez, prêchez l'Evangile à toute créature (Mc 16, 15). Cette parole a retenti dans le monde, elle a retenti à Rome, dans les chaînes des Pierre et de Paul, car la parole de Dieu n'est pas enchaînée par le fer des souverains de la terre. Et j'entends Paul, le grand prédicateur de la foi et de la vérité, placé dans le monde comme le Docteur des Gentils, transmettre cette parole, reçue du Christ, à Timothée, son disciple bien-aimé, et lui dire: Proclame la parole.
Mais la vision du grand prédicateur des Gentils suscite en notre esprit la vision d'autres prédicateurs de la parole de Dieu; à la tête d'une phalange héroïque et sprlendide nous admirons Dominique de Guzman. Dans la lumière de Paul, nous contemplons le patriarche des Prêcheurs qui, imitant Paul, nous cire: Devenez mes imitateurs, tout comme je le suis moi-même du Christ (1 Co 11, 1). Ainsi Dieu se montre admirable dans ses saints; l'un reçoit la lumière du Christ et la transmet à l'autre; et, s'éclairant l'un l'autre, tous croissent en une même lumière divine, de même que le soleil éclaire les planètes, dont les rayons sourient à ceux des étoiles pour embellir la sérénité de nos nuits. Comme Paul, Dominique, lui aussi, éprouve les poussées incessantes du zèle et de la sollicitude pour tous les fidèles de l'Eglise; il réunit autour de lui une troupe de compagnons de son apostolat, destinés à répandre à travers le monde, dans la consolation et dans la peine, en des temps joyeux ou tristes: Insiste à temps et à contretemps. Comme Paul, Dominique, lui aussi, enseigne avec autorité toute science et toute vertu, réfute les fausses doctrines, excite et exhorte au bien, reprend et corrige les mauvaises moeurs, toujours avec une patience inaltérable, avec une sagesse céleste: Réfute, menace, exhorte, avec une patience inlassable et le souci d'instruire (2 Tm 4, 2).
Des faits douloureux se produisent aujourd'hui: le processus de sécularisation actuellement toujours plus important en Europe a également franchi les portes de l'Autriche catholique. L'identification avec l'enseignement de l'Eglise diminue chez de nombreux fidèles, entraînant la perte de la certitude de la foi et faisant disparaître la crainte révérentielle pour la loi de Dieu. (...)
Que pouvons-nous donc faire? Existe-t-il un instrument saint que Dieu a préparé pour l'Eglise de notre temps, afin que vous puissiez affronter avec courage les défis que vous rencontrerez le long de votre chemin dans le troisième millénaire chrétien? Il est sans aucun doute nécessaire, d'une part, de professer de manière claire, courageuse et enthousiaste la foi en Jésus Christ qui vit ici et aujourd'hui dans son Eglise et en qui, selon son essence, l'âme humaine tournée vers Dieu peut trouver son bonheur. D'autre part, de nombreuses mesures missionnaires, petites et grandes, sont nécessaires et devront être prises pour apporter un "changement de cap".
Comme vous le savez bien, la confession de la foi est l'un des premiers devoirs de l'Evêque. "Je ne me suis pas soustrait - dit saint Paul à Milet aux pasteurs de l'Eglise d'Ephèse - à la tâche de vous annoncer toute la volonté de Dieu" (Ac 20, 27). Il est vrai que nous, Evêques, devons agir avec pondération. Toutefois, cette prudence ne doit pas nous empêcher de présenter la Parole de Dieu dans toute sa clarté, également ce que l'on écoute le moins volontiers ou qui suscite des réactions de protestation, voire de dérision.
Chers frères dans l'épiscopat, vous savez bien qu'il existe des thèmes relatifs à la vérité de la foi, et surtout à la doctrine morale qui, dans vos diocèses, ne sont pas assez présents dans la catéchèse et dans l'annonce. Parfois, par exemple dans la pastorale pour les jeunes dans les paroisses ou les groupes, ils ne sont pas du tout affrontés, ou pas de la façon claire voulue par l'Eglise. Grâce à Dieu, il n'en est pas ainsi partout. Les responsables de l'annonce craignent peut-être que les personnes puissent s'éloigner si l'on parle trop clairement. Toutefois, l'expérience révèle en général que c'est précisément le contraire qui se produit. Ne vous faites pas d'illusions! Un enseignement catholique qui est offert de manière incomplète, est une contradiction en soi et ne peut être fécond à long terme. L'annonce du Royaume de Dieu va de pair avec l'exigence de la conversion et avec l'amour qui encourage, qui connaît le chemin, qui enseigne à comprendre que même ce qui semble impossible devient possible par la grâce de Dieu.
Pensez à la façon dont, peu à peu, l'enseignement de la religion, la catéchèse aux divers niveaux et la prédication peuvent être améliorés, approfondis et pour ainsi dire complétés! Utilisez avec ardeur, je vous le demande, le Compendium et le Catéchisme de l'Eglise catholique! Faites en sorte que tous les prêtres et les catéchistes adoptent ces instruments, qu'ils soient présentés dans les paroisses, dans les groupes et dans les mouvements, et qu'ils soient utilisés dans les familles comme lecture importante! Face à l'incertitude de cette période historique et de cette société, offrez aux hommes la certitude de la foi intégrale de l'Eglise! La clarté et la beauté de la foi catholique rendent la vie de l'homme lumineuse aujourd'hui également! Et cela en particulier si elle est présentée par des témoins enthousiastes et enthousiasmants.
Benoît XVI aux évêques autrichiens, visite ad limina,
message du 5 novembre 2005
L'Église dans votre pays fait face à des défis liés à la situation culturelle et pastorale qui est en grande partie celle de toute l'Europe occidentale. Le progrès de la sécularisation et du relativisme entraîne non seulement une diminution de la fréquentation des sacrements, surtout de la participation à la Messe dominicale, mais aussi une mise en question des valeurs morales proposées par l'Église. Je pense en particulier à la crise profonde de l'institution du mariage et de la famille, et au nombre croissant de divorces, aux nombreux avortements, à la possibilité d'unions entre personnes de même sexe: tout cela constitue un signe évident de déchristianisation. Beaucoup de nos contemporains vivent comme si Dieu n'existait pas. Dans une telle société, on a plus que jamais besoin de votre voix d'évêques. Vous êtes appelés à faire entendre la Parole de Dieu et le message chrétien, qui aident à comprendre l'homme et le sens de son existence, prenant soin qu'il y ait entre vous, dans les prises de position nécessaires sur les questions théologiques et morales, unité et unanimité.
Même parmi les catholiques pratiquants, on note un affaiblissement de la foi. C'est pour vous une expérience douloureuse de voir des fidèles, et malheureusement dans certains cas des prêtres, mettre en question des points de la doctrine et de la discipline de l'Église. Certains s'arrogent même le droit de choisir, en matière de foi, les enseignements qui, selon eux, seraient admissibles et ceux qui peuvent être refusés. Le devoir fondamental de l'Évêque, Pasteur et Maître de la Foi, est d'inviter les fidèles à accepter pleinement l'enseignement de l'Église. Avec l'aide du Christ, je vous exhorte à annoncer l'Évangile avec courage et sérénité, "à temps et à contretemps" (2 Tm 4, 2).
message non prononcé, 7 novembre 2006
Enseigner, mon petit, ça n'est pas drôle! Je ne parle pas de ceux qui s'en tirent avec des boniments... La vérité, elle délivre d'abord, elle console après. D'ailleurs, on n'a pas le droit d'appeler cela une consolation. Pourquoi pas des condoléances? La parole de Dieu! C'est un fer rouge. Et toi qui l'enseignes, tu voudrais la prendre avec des pincettes, de peur de te brûler, tu ne l'empoignerais pas à pleines mains? Laisse-moi rire... Je prétends simplement que lorsque le Seigneur tire de moi, par hasard, une parole utile aux âmes, je la sens au mal qu'elle me fait.