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Praedicatho homélies à temps et à contretemps

Praedicatho homélies à temps et à contretemps

C'est par la folie de la prédication que Dieu a jugé bon de sauver ceux qui croient. Devant Dieu, et devant le Christ Jésus qui va juger les vivants et les morts, je t’en conjure, au nom de sa Manifestation et de son Règne : proclame la Parole, interviens à temps et à contretemps, dénonce le mal, fais des reproches, encourage, toujours avec patience et souci d’instruire. Crédit peintures: B. Lopez


Pierre Mourlon-Beernaert, L'obole d'une pauvre veuve

Publié par Walter Covens sur 9 Novembre 2012, 00:57am

Catégories : #la vache qui rumine (Années B - C)

32et.o.b.xl.jpg    Un (...) visage de femme, d'une discrétion exemplaire et d'une générosité étonnante, est présenté par Marc et par Luc, tandis que Matthieu regroupe de longues invectives contre les scribes et les pharisiens (Mt 23). En contraste avec la vanité de ceux-ci et une certaine hypocrisie de leur part, dont parlent également Marc et Luc, voici le récit d'une pauvre femme qui vient faire son offrande au Trésor du Temple, sans regarder autour d'elle; mais Jésus, lui, l'a remarquée.

    Jésus est assis et, selon Marc, il regardait autour de lui (v. 41 = etheôrei); selon Luc, "levant les yeux, il vit ... et il vit" (21, 1-2). Ses disciples ne sont pas loin, puisque Jésus les appelle peu après (Mc 12, 43); mais apparemment, ils n'avaient pas prêté attention à la modeste offrande d'une femme, parmi les dons des "riches". Cette femme, veuve de son état, est présentée comme "pauvre" (Mc vv. 42-43; Lc v. 3) ou même "indigente" (Lc v. 2 = penichra); mais nous verrons qu'elle est d'autant plus généreuse.

    Le bref épisode se situe avant le discours sur la ruine du Temple de Jérusalem, en face du Tronc ou du Trésor, là où les juifs apportaient leur offrandes, non sans notifier au prêtre de service la destination et le montant de leur don. Cette scène est le dernier enseignement de Jésus dans le Temple qu'il va définitivement quitter; cet adieu est un regard compréhensif et admiratif pour le don d'une femme veuve.

    Une fois de plus, la scène est bâtie sur un contraste. Un même verbe y revient sans cesse, indiquant le geste de jeter ou de mettre son offrande (Mc 7 fois; Lc 5 fois = ballein) dans le Tronc. C'est qu'il y a bien des façons de donner, comme l'expérience le montre tous les jours encore:

  • * d'un côté, de nombreux riches "mettaient beaucoup" comme le précise Marc; en réalité, Jésus fera remarquer qu'ils "mettaient tous en prenant sur leur superflu" (Mc v. 44; Lc v. 4).
  • * de l'autre, cette veuve pauvre mit exactement "deux leptes" (Mc v. 42; Lc v. 2), soit deux piécettes, les plus petites en usage à l'époque. Et Marc prend la peine de traduire un quadrant ou un quart d'as pour ses lecteurs romains. Il s'agit de très peu de chose, de quelques sous: on a calculé que c'était l'équivalent d'un huitième de la ration quotidienne de pain distribuée aux pauvres. Mais Jésus a compris qu'elle avait pris cette modeste somme "sur sa misère" ou "de sa pénurie" et qu'elle avait mis "tout ce qu'elle avait pour vivre": sa subsistance entière (Mc v. 44: holon ton bion) ou toute sa subsistance (Lc v. 4: panta ton bion).


    Telle est la scène dans sa simplicité; elle invite à réfléchir: qui donc a donné le plus? (Mc v. 43; Lc v. 3 = pleion). Une fois encore, Jésus va inverser les pespectives: c'est celui qui donné le plus qui a donné le moins; c'est le premier qui est dernier; c'est le grand qui est petit... Parmi tous ceux qui jetaient leurs offrandes dans le Tronc, c'est cette pauvre veuve que Jésus a vue; et il a été ébloui par son geste. De suite il en parle à ses disciples et leur dit son admiration pour cette femme.

    En somme, ce qui importe vraiment, ce n'est pas de donner beaucoup ou peu, mais c'est de donner tout ou encore l'entièreté de ce qu'on a pour vivre. Car c'est alors qu'on peut paraître devant Dieu "les mains vides", prêts à tout recevoir du Père, retrouvant la disponibilité des enfants et celle de cette veuve. Sans doute peut-on aller jusqu'à suggérer, dans un second temps de lecture après Pâques, que ce qui a touché et ébloui Jésus dans une telle générosité, c'est que lui-même allait bientôt être amené à tout donner, à livrer toute sa vie; il est vrai que le croyant ajoute alors, avec respect, que son Père en sera ébloui! Une telle relecture n'est bien entendu ouverte que par la résurrection...

    En contraste avec l'univers de l'apparence et du calcul, présenté sous les traits des scries en grandes robes, qui peuvent aller jusqu'à dévorer les biens des veuves, l'univers qui plaît à Jésus et rend un son vraiment évangélique est celui de la gratuité et de la totalité, sans calcul et en toute discrétion. Cette femme, veuve et pauvre, aime son Dieu et aime tous les pauvres, en risquant la faim: elle prend et donne deux piécettes de son nécessaire. Don gratuit et un peu fou, mais don véritable: nous voici dans l'ordre de l'amour, qui ne doute de rien et obtient tout. La transparence de cette veuve dans son geste discret peut faire percevoir de quel côté se trouve la vraie vie. En donnant ce qui lui est nécessaire pour vivre, en donnant de sa vie même, elle indique déjà vraiment le chemin que Jésus va prendre lui-même dans sa passion. Cette femme continue à montrer sans cesse à l'Église le chemin que Jésus aime, celui qui a vraiment la saveur de l'Évangile.

Marthe, Marie et les autres, Les visages féninins de l'Évangile, Éd. Lumen Vitae 1992, p. 119-121
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A
Admirable
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J
Mon  Père,<br /> Je connais un prêtre qui supprIme l'offertoire pratiquement chaque fois qu'il célèbre la Messe.<br /> Que pensez-vous de cela? A t'il le droit de faire cela?<br /> Que Dieu vous bénisse.<br /> De Guadeloupe
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W
Le prêtre n'est pas le propriétaire de la liturgie. Il ne peut donc pas en faire ce qu'il veut.

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