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Publié par dominicanus

3 TOA 1ev
 
 
    Nous retrouvons à partir de ce dimanche la lecture de l'Évangile de saint Matthieu. Arrêtons-nous donc un instant pour nous rappeler des choses fondamentales qu'il est indispensable d'avoir en mémoire pour bien comprendre cet évangile. Écoutons ce que nous en dit un exégète averti, le cardinal Martini (Bible et vocation, p. 109 ss.) :
L'Église a toujours considéré la vocation chrétienne comme une suite d'initiations au mystère chrétien : initiations qui s'étendent depuis un point de départ jusqu'à un point d'arrivée, en franchissant des étapes intermédiaires. À mon avis, tout cela est très bien exprimé dans les quatre évangiles considérés comme "manuels" pour ces différents moments ou étapes de l'initiation chrétienne.

 


    Jésus dit que "le sabbat a été fait pour l'homme, et non pas l'homme pour le sabbat" (Mc 2, 27). Nous pourrions dire la même chose des évangiles : les évangiles ont été faits pour l'homme et non pas l'homme pour les évangiles ! Et c'est pour cela qu'il y en a quatre, parce que cela correspond à un besoin humain. Écoutons encore le cardinal Martini :

 

Nous pouvons retrouver dans le mystère chrétien quatre étapes d'une ascèse, étapes qui se rattachent facilement aux quatre évangiles. La première étape est celle du catéchuménat qu'on peut mettre en relation avec l'évangile de Marc, ou évangile de l' "initiation catéchuménale". La deuxième étape est celle de l' "illumination" (retenez bien ce mot !) ou du baptême, en relation avec l'évangile de Matthieu ou "évangile de l'Église", parce qu'il contient tout ce qui est nécessaire pour insérer le nouveau baptisé dans la communauté. La troisième étape est celle de l' "évangélisation" ou du témoignage, en relation à l'évangile de Luc et aux Actes des Apôtres, dans lesquels est contenu tout ce qui contribue à la formation de l'évangélisateur. La quatrième étape est celle du "sacerdoce" ou du "christianisme adulte", en relation à l'évangile de Jean parce que celui-ci contient ce qui peut éduquer à la maturité de la foi, au "sacerdoce" chrétien. (pour l'Évangile de Jean cf. Cardinal Martini, Voici votre roi.)

 


    L'Évangile de saint Marc est probablement le plus ancien, et a été utilisé dès le début pour annoncer le Christ aux non-croyants, pour les acheminer vers la conversion et le baptême. Il fait comprendre aux catéchumènes quel chemin ils sont appelés à faire. C'est le manuel de la préparation au baptême. C'est aussi ce manuel que nous devons sans cesse reprendre pour ne pas tomber dans la routine, pour ne pas nous contenter d'une connaissance superficielle du mystère chrétien, pour une "nouvelle évangélisation", comme on dit aujourd'hui. L'évangélisation de ceux qui sont déjà baptisés, mais qui ne vivent pas leur baptême, parce qu'ils sont tombés dans la routine, est une tâche très importante pour l'Église aujourd'hui.



    Cette première étape est exigeante, mais la deuxième ne l'est certainement pas moins (cf. deuxième lect.), et toujours à remettre en chantier aussi. C'est pour nous aider à la parcourir que nous est donné l'évangile de saint Matthieu, qui est l'"Évangile de l'Église".

L'évangile de Matthieu aide le catéchiste à donner au nouveau baptisé une connaissance ordonnée, systématique et organique du mystère chrétien. Il offre au nouveau baptisé toute l'instruction nécessaire pour sa pleine insertion dans la communauté. (Martini)

 


    Pour comprendre, il suffit de lire la finale de cet évangile :

Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit ; et apprenez-leur à garder tous les commandements que je vous ai donnés. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde. (Mt 28, 19-20)

 


    Ce qui est demandé au catéchumène, c'est principalement de reconnaître Dieu dans la personne de Jésus. Ce qui est demandé au néophyte, c'est de reconnaître la personne de Jésus dans l'Église. Combien y a-t-il de baptisés qui n'ont jamais fait ce pas, ou qui ne le font que timidement, avec bien des hésitations. Voilà donc "la sauce" à laquelle nous allons être mangés durant cette année A du cycle liturgique, qui revient tous les trois ans. Et nous en avons bien besoin !

Le Christ est la Lumière des nations ; aussi, en annonçant l'Évangile à toute créature (cf. Mc 16, 15), le saint Concile réuni dans l'Esprit-Saint désire-t-il ardemment illuminer tous les hommes de la lumière du Christ qui resplendit sur le visage de l'Église.

 


    Vous avez reconnu là une affirmation que j'ai déjà citée et que vous avez donc pu reconnaître assez facilement : c'est le début de la constitution dogmatique sur l'Église du Concile Vatican II (Lumen gentium). Ce désir de l'Esprit, c'est un ordre pour l'Église :

Ce devoir, les conditions actuelles l'imposent à l'Église avec une urgence accrue : il importe en effet que la communauté humaine, toujours plus étroitement unifiée par de multiples liens sociaux, techniques, culturels, puisse atteindre également sa pleine unité dans le Christ.

 


    Il y a les États-Unis d'Amérique, les Nations Unies, l'Union Européenne. Et que dire de l'Internet (la toile mondiale) ? ...
 


    Un peu plus loin (n. 2) le Concile affirme :

Par une disposition tout à fait libre et mystérieuse de sa sagesse et de sa bonté, le Père éternel a créé l'univers. Il a voulu élever les hommes jusqu'au partage de la vie divine. Et une fois qu'ils eurent péché en Adam, il ne les abandonna pas ; sans cesse il leur offrit des secours pour leur salut en considération du Christ rédempteur, "qui est l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute créature" (Col. 1, 15).

 


    Voilà, si l'on suit l'analyse du Cardinal Martini, le propos de l'Évangile de saint Marc. Voici celui de saint Matthieu (c'est la suite de la constitution conciliaire) :

D'autre part, ceux qu'il a choisis, le Père avant tous les siècles les "a d'avance connus et prédestinés à reproduire l'image de son Fils, pour que celui-ci soit le premier-né d'un grand nombre de frères" (Rom. 8, 29). Et ceux qui ont foi dans le Christ, il a voulu les rassembler en la sainte Église qui, préfigurée dès l'origine du monde, admirablement préparée dans l'histoire du peuple d'Israël et l'ancienne Alliance, établie en ces temps qui sont les derniers, a été manifestée par l'effusion de l'Esprit et sera glorieusement achevée à la fin des siècles. Alors seulement, comme on peut le lire dans les saints Pères, tous les justes depuis Adam, "depuis le juste Abel jusqu'au dernier élu" seront rassemblés auprès du Père dans l'Église universelle.

 

    Ce passage du Concile est, me semble-t-il, un très beau commentaire de l'évangile que nous venons d'entendre, et notamment du verset qui est une citation du Livre d'Isaïe que nous avons entendu dans la première lecture :

Pays de Zabulon et pays de Nephtali, route de la mer et pays au-delà du Jourdain, Galilée, toi le carrefour des païens : le peuple qui habitait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière. Sur ceux qui habitaient dans le pays de l'ombre et de la mort, une lumière s'est levée.

 


    Cette lumière, dit le Concile, c'est "la lumière du Christ", mais elle "resplendit sur le visage de l'Église", dont l'Esprit Saint désire "illuminer tous les hommes" (le "pays de Zabulon et de Nephtali ... le carrefour des païens).
 


    Un soir, ou plutôt une nuit, j'avais laissé un commentaire sur un blog français, dont l'auteur était en train de dormir (décalage horaire !), mais qui, avant de s'endormir, avait souhaité une bonne nuit à tous ces lecteurs. Dans mon commentaire j'écrivais que je lui envoyais mon ange pour aider le sien à la garder sur tous ses chemins. Ce matin, en me réveillant, je me suis aperçu que la personne avait posté une réponse sur l'un de mes blogs :

Je voulais juste vous dire pour qu'il n'y ait pas de rejet ou méprise de votre part que je suis athée et de façon irrévocable ce qui ne m'empêche nullement de vous lire et d'avoir un profond respect pour la religion et ceux ou celles qui ont la foi.

 


    "Athée" ... "de façon irrévocable" ... Nous nous trouvons bien au carrefour des païens d'aujourd'hui...
 


    Eh bien, que voyons-nous dans la suite du passage de l'évangile ? Saint Matthieu nous y résume non seulement l'activité missionnaire de Jésus, mais il nous montre Jésus appelant à lui ses premiers disciples. En fait, ils ne sont pas encore appelés "disciples". Jésus leur demande seulement de venir derrière lui, mais en ajoutant qu'il fera d'eux des pêcheurs d'hommes, des pêcheurs de païens. D'emblée, Jésus les associe à sa mission.
 


    La façon dont saint Matthieu nous présente la scène est une façon d'affirmer que la communauté chrétienne pour laquelle il écrit, aux confins de la Syrie et de la Palestine, s'origine dans la prédication de Jésus, et dans nulle autre, et qu'écouter cette prédication engage à faire du Royaume la préoccupation essentielle. Le Royaume, c'est Jésus qui nous libère, qui nous invite à quitter le tout de notre vie quotidienne pour qu'il puisse la transfigurer.

 

Commencer à le suivre, c'est venir lui présenter nos maladies, nos tourments, nos aliénations, nos paralysies, afin qu'il les guérisse. N'est-ce pas dans cette situation concrète que la célébration eucharistique, chaque dimanche, nous rassemble ? Savons-nous discerner l'absolu du Royaume et nous laisser conduire de nos ténèbres à la lumière ? (Jean Radermakers)
 
Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.
Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.

Aussitôt, laissant la barque et leur père, ils le suivirent.

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M
<br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> «discerner l'absolu du Royaume et nous laisser conduire de nos ténèbres à la lumière ». Pour y parvenir, cela ne nécessite-t-il pas<br /> aussi, concernant cet Evangile de voir, dans la même réponse que font Pierre et André, puis Jacques et Jean à l’appel de Jésus, une manière différente que chacun de ces apôtres a de procéder à<br /> cet appel, selon à quel partenaire de pêche il est associé ou non. Un approfondissement dans ce sens ne permettrait-il pas de répondre à un autre appel que Jésus ferait aujourd’hui à chacun de<br /> nous, de sorte qu’en nous donnant la possibilité de nous reconnaître séparément dans ces quatre apôtres que nous sommes tous et chacun quelque part, nous puissions faire un à un, les pas<br /> nécessaires grâce auxquels nous serions assurés pleinement de nous retrouver comme Pierre, André, Jacques et Jean avec Jésus, dans la même « barque » que Lui.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> En gros, je trouve d’abord que Pierre et André (différemment de Jacques et de Jean) sont associés plus particulièrement aux hommes croyants et incroyants de l’ancienne Alliance et que leur<br /> réponse favorable à l’appel de Jésus correspond à un changement de leur part de la nature du « but » plus que de celle des « moyens » : de pêcheurs de poissons, ils deviennent pêcheurs d’hommes, de croyants et d’incroyants passifs ou inactifs ils<br /> deviennent ce que j’appellerais des « juifs actifs dans l'esprit ».<br /> Tandis que Jacques et Jean dans cet Evangile seraient plutôt associés à des « chrétiens dans la chair », le niveau immédiatement supérieur au juif dans l'esprit, parce que, eux sont plus « jeunes » donc, moins enracinés probablement que Pierre et André l’étaient dans la chair aux pratiques anciennes (j’en<br /> veux pour preuve, le mal que Paul a pour faire accepter à Pierre le passage de la circoncision dans la chair, à la circoncision dans l’Esprit. Je ne vois pas qu‘il aurait eu ces difficultés avec<br /> Jacques et Jean, ni même avec André dès lors que Pierre avait cédé sur ce point à Paul).<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> A mon avis, associés davantage à des chrétiens dans la chair que Pierre et André à ce moment de leur histoire à eux quatre, leur réponse favorable à l’appel de Jésus correspond quant à eux deux<br /> (Jacques et Jean), à un changement de leur part plutôt de de la nature des «moyens» plus que de celle du « but ». D’ailleurs, on comprend qu’ils ne sont plus avec leur père Zébédée que de ce qu’ils proviennent de lui, sa barque n’étant plus qu’un moyen de<br /> passage à un autre stade de cheminement vers Dieu. Et ce qui différencie maintenant Jacques de Jean, comparé à ce qui différencie Pierre et André, bien que demeure entre eux quatre aussi la<br /> dimension de l’action, mais dans un autre niveau de complémentarité entre Jacques et Jean que celui qui existe entre Pierre et André, il me semble qu’il y a un niveau de profondeur plus grand qui<br /> nécessiterait plus de précisions. Mais dans l‘immédiat, je pense que ce qui distingue surtout Jacques de Jean, ce serait qu’avec l’un, il serait question surtout d’action dans la vérité pendant<br /> qu’avec l’autre, il s’agirait à sens inverse, plutôt de vérité dans l’action.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Et à ce propos, je crois que ce n’est pas du tout un hasard que notre nouveau pape est voulu s’appeler François car, si Saint François d’Assise aura été celui qui aura concrétisé le plus la<br /> notion d’action dans la vérité, je pense qu’il serait celui qui aujourd’hui concrétiserait le plus aussi la notion de vérité dans l’action. Je trouve d’ailleurs que François œuvre dans cette<br /> direction. Quand il a lancé dans son exhortation sur la joie de l’Evangile, son idée de mystique de vivre ensemble, n’y a-t-il pas là un effort de vérité dans l’action que François demande à tous<br /> les hommes pour qu’ils acceptent de comprendre que chacun doit apporter à la vérité ce qui lui manque, dans notre esprit.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> A ce propos encore, il y a une phrase de Gandhi qui me vient et à laquelle on peut n’attacher aucune importance étant donné qu’il était hindouiste. Mais - paraît-il - il connaissait fort bien les<br /> Evangiles et s’il n’était pas chrétien dans la chair parce que, il n’avait pas été catéchisé dans notre foi, je pense qu’il l’était dans l’esprit. Toujours est-il qu’il disait que « les buts ne sont pas supérieurs aux moyens qui ont permis de les atteindre ». Et<br /> bien, il me semble qu’il avait mis ici le doigt sur quelque chose d’essentiel sur lequel les chrétiens feraient peut-être bien de méditer. Maintenant tout cela n’est là que mon impression sur<br /> quelque chose qui dépassait mas compréhension, mais je voulais quand même vous en faire part, car je crois qu‘on ne doit pas garder pour soi ce qu‘on ressent même au risque de taper à côté du<br /> sujet éventuellement. Sinon, je trouve excellent cette « idée » d’Homélie<br /> à temps et à contretemps. Merci pour tout!<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br />
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