Face à ce que le Pape appelle "l'ambiguïté du progrès", il est alors nécessaire que la raison - "grand don de Dieu à l'homme", au point que "la victoire de la raison sur l'irrationalité est aussi un but de la foi chrétienne" - s'ouvre à la foi, selon une préoccupation caractéristique de la pensée de Joseph Ratzinger et à présent de sa prédication comme Évêque de Rome. Face au risque individualiste, Benoît XVI répète avec les Pères de l'Église, son maître saint Augustin et Henri de Lubac que le salut "a toujours été considéré comme une réalité communautaire".
Sauvés dans l'espérance, chaque jour de la vie de ce monde les chrétiens ont attendu et continuent d'attendre les réalités ultimes, dites jadis novissimi - la mort, le jugement, l'enfer, le paradis - et sur leur signification, toujours radicalement actuelle, le Pape réfléchit également de manière laïque, citant Dostoïevski et Platon. Mais les images de l'espérance les plus chères à la tradition chrétienne sont les images évangéliques, surtout selon le récit de saint Luc. De l'attente humble et silencieuse d'Israël avec le vieux Siméon et la prophétesse Anne à celle de Marie, en voyage pour se rendre auprès d'Élisabeth et qui se presse sur les monts de la Judée : "A l'image de l'Église à venir qui, dans son sein, porte l'espérance du monde à travers les monts de l'histoire". C'est à elle que Benoît XVI se confie lui-même et confie toute l'Église, en se souvenant assurément de ce qu'il disait dans sa dernière homélie avant d'être élu au Conclave. Que toute chose passe, l'argent, les édifices, jusqu'aux livres, et que seul demeure l'homme créé pour l'éternité :
"Le fruit qui demeure est donc ce que nous avons semé dans les âmes humaines - l'amour, la connaissance; le geste capable de toucher le coeur; la parole qui ouvre l'âme à la joie du Seigneur. Alors allons et prions le Seigneur, pour qu'il nous aide à porter du fruit, un fruit qui demeure".Comme demeureront les fruits de l'Encyclique chez qui voudra la lire et méditer sur l'espérance.