Je dis que quatre choses font partie de la prophétie.
La première est la révélation divine ; ainsi, en Amos (3, 7) : Le Seigneur Dieu ne parle pas, si ce n’est pour révéler son secret à ses prophètes.
Parfois, certaines choses sont divinement révélées à une personne, mais celle-ci ne comprend pas, comme lorsque Nabuchodonosor vit une statue (Daniel 2, 31) et lorsque quelque chose fut révélé à Pharaon, quand il vit des épis et du bétail, mais il n’a pas compris (Genèse 41, 5). Voilà pourquoi, en deuxième lieu, l’intelligence est nécessaire. Ainsi, en Daniel (10, 1) : La parole fut révélée à Daniel et il en comprit le sens. L’intelligence est donc nécessaire au milieu des visions.
Si un homme avait une révélation venant de Dieu et, alors qu’il la comprendrait, la gardait pour lui-même, elle ne serait alors d’aucune utilité. Pour cette raison, en troisième lieu, il est nécessaire que ce qui est ainsi révélé et qu’on comprend soit annoncé à un autre. Isaïe (21, 10) : Ce que j’ai appris du Dieu des armées d’Israël, je vous l’ai annoncé.
Certaines choses qui dépassent l’entendement humain sont divinement révélées et annoncées, mais les hommes ne (les) croiraient pas si elles n'étaient pas prouvées. La preuve en est l’accomplissement de miracles. C’est ce qui est signifié dans les Rois (II [IV],5, 8), où il est raconté que, alors que Naaman le Syrien était venu pour être guéri de sa lèpre chez le roi d’Israël, Élisée dit : Envoie-le moi, afin qu’il sache qu’il y a un prophète en Israël.
Mais, selon ce qui a déjà été dit, le nom de prophète s’entend de quatre façons.
Parfois, on appelle prophète celui à qui la révélation divine est faite. Ainsi, dans les Nombres (12, 6) : S’il y a parmi vous un prophète du Seigneur, je lui parlerai en songe pendant son sommeil.
Mais parfois on appelle prophète celui à qui n’a pas été faite une révélation divine, mais à qui il est donné de comprendre les choses révélées. Ainsi, dans la Première aux Corinthiens (14, 29) : Qu’il y ait deux ou trois prophètes qui parlent et que les autres discernent. Il appelle prophètes les docteurs et les prédicateurs, selon ce passage du Siracide (24, 33) : Les docteurs répandront mon enseignement comme une prophétie.
D’autres sont appelés prophètes parce qu’ils racontent les choses révélées ; ainsi dans les Chroniques (I, 25, 1) : Les fils d’Asaph et Idithun prophétisaient.
D’autres sont appelés prophètes parce qu’ils font des miracles. Ainsi, il est dit dans le Siracide (48, 14) que le corps défunt d’Élisée prophétisa, c’est-à-dire qu’il accomplit un miracle prophétique. Dans le livre des Rois (II [IV], 13, 21), il est dit que des bandits effrayés jetèrent le cadavre de quelqu’un qui avait été tué, dans le tombeau où reposait Élisée, et que [le corps] revint à la vie. Et, comme il est dit dans l’évangile, lorsque le Christ fit des miracles, les Juifs dirent : Un grand prophète s’est levé parmi nous ! (Luc 7, 16).