Écrit par fr Alexis Bugnolo (01/02/2023) - Traduction française autorisée : père Walter Covens
Dans l'Église catholique, l'autorité de juger vient de Dieu seul. Les catholiques ne peuvent pas conserver longtemps leur statut de catholique tant qu'ils n'acceptent pas ce principe.
Ainsi, par la foi qui vient de Dieu, nous pouvons, si nous la comprenons bien, discerner qui enseigne à tort ou à travers. Et nous pouvons alors discerner si un homme enseigne contrairement ou en dehors du Christ, de ses Apôtres ou de ses Prophètes.
Et ce discernement personnel est une capacité, mais tous ne l'ont pas. Car si nous recevons tous la foi au baptême, tous n'ont pas la foi, et tous ne comprennent pas la Foi. La foi est la vertu, la Foi est la somme des doctrines de notre sainte religion. Les deux viennent de Dieu. Mais avoir la connaissance de l'une NE GARANTIT PAS l'autre.
Or, dans l'Église, puisque l'autorité de juger pour la communauté vient de Dieu, Dieu l'a donnée aux seuls évêques, et à l'évêque de Rome dans son degré le plus élevé ici-bas. Eux seuls peuvent retirer les droits canoniques d'un individu ou d'une communauté.
La reconnaissance de ce fait est ce qui sépare et distingue les catholiques des protestants et des schismatiques orthodoxes. Ces deux derniers refusent d'accepter le pape comme juge suprême en matière de foi et de discipline. Et les protestants refusent également d'accepter les évêques comme juges en matière de discipline dans leurs propres diocèses.
Et voici l'écueil de tous ces catholiques qui font le premier pas sur la route du sédévacantisme : ils refusent d'admettre que s'ils ont la capacité par la foi de discerner qui est hérétique, ils n'ont aucune autorité juridique pour déclarer quelqu'un comme tel, au point de priver cet accusé de ses droits canoniques.
Ceci est affirmé dans le passage très important de Universi Dominici Gregis, n. 35. Cette règle fait écho au débat de longue date entre les canonistes, dont le pape Paul IV a parlé en 1559, sur ce qu'il convient de faire avec un cardinal qui a dévié publiquement de la foi avant son élection au pontificat. Paul IV voulait dans sa Constitution, Cum ex apostolatu officio, que son élection soit déclarée nulle et non avenue. Sa constitution fut cependant annulée par son successeur. Et le précédent de son opinion a été réfuté de la manière susmentionnée dans chaque loi papale ultérieure sur les élections.
La raison en est que, si une personne non déclarée pouvait se voir refuser le droit canonique de voter (voix active) ou d'être élue (voix passive), cela introduirait dans l'élection un doute qui pourrait éventuellement rendre de nombreuses ou la plupart des élections douteuses et donc invalides.
Et la justification théologique pour lever ce doute, est la Foi de l'Eglise dans la promesse de Jésus-Christ et Son pouvoir d'impétration toujours efficace, lorsqu'Il déclara :
"Simon, Simon, Satan a voulu vous cribler tous comme du blé, mais J'ai prié pour TOI, afin que ta foi ne défaille pas, et que, lorsque tu seras converti, tu confirmes tes frères."
Notez que notre Seigneur dit "quand" et non "si", car il est toujours efficace dans sa prière au Père et obtient tout ce qu'il demande.
Et puisque l'homme élu pape devient la cible de la prière du Christ, ainsi promise, il importe peu qu'il ait dévié de la foi auparavant, tant qu'il n'a pas été déclaré par l'Église comme l'ayant fait. Car s'il était déclaré par l'Église, alors la parole, du Christ s'appliquerait : "Celui qui vous écoute m'écoute".
Ceux qui deviennent sédévacantistes s'écartent de ces paroles de Jésus-Christ, et une fois qu'ils s'engagent dans cette voie, par orgueil, ils refusent de les accepter, afin de justifier le chemin déjà entrepris. Et ainsi ils tombent dans l'hérésie et le schisme, et vont à la perdition, parce que si vous ne croyez pas à chaque parole de Jésus-Christ, vous ne pouvez pas être sauvé.
Et maintenant, c'est la tentation de ceux qui refusent l'élection juridiquement valide de Bergoglio lundi, et qui tentent d'argumenter ainsi : cette élection ne peut être valide, parce qu'elle a élu un homme que je considère comme un hérétique.
A ceux-là je dis : VOUS n'êtes pas l'Église. VOUS n'avez pas l'autorité juridique pour déclarer quelqu'un hérétique. Oui, vous avez par la foi la capacité de discerner l'hérésie, si vous connaissez votre foi. Mais ce n'est pas la même chose. Présumer que votre jugement de l'hérésie est équivalent à une déclaration juridique, c'est s'arroger un droit que Dieu ne vous a pas donné. Même les cardinaux au Conclave n'ont pas ce droit. Combien plus un évêque, un prêtre ou un laïc n'importe où ailleurs et à n'importe quel moment, lorsque la personne à juger n'est même pas sous leur juridiction.
Peut-être que les ignorants confondent la possibilité qu'un tribunal ou un futur pape soit d'accord avec leur jugement comme une autorisation suffisante, mais ils confondent la capacité de discernement de l'autorité d'émettre un jugement contraignant pour la communauté.
Ayez un peu d'humilité.
Ayez la foi en Christ.
Seuls ceux qui ont les deux, peuvent être sauvés.
ADDENDUM
Ce n'est que dans certains cas, lorsque l'Eglise elle-même ou la nature même de l'acte prescrivent la nécessité d'un jugement public, que les catholiques peuvent agir sur la base d'un discernement personnel. Tel est le cas des renonciations papales, qui doivent être manifestes en elles-mêmes, et lorsqu'elles sont douteuses, peuvent être considérées comme invalides par tous les catholiques qui les discernent ainsi. En effet, une renonciation à la fonction papale ne peut être jugée ou interprétée par personne, puisqu'il n'y a personne qui puisse la juger. Car si elle était invalide, le pape resterait le pape tout en la tenant pour valide. Et si elle était valide, l'homme qui était le pape ne pourrait plus la juger. C'est pourquoi, dans de tels cas, les catholiques ne s'arrogent pas un droit qui appartient à d'autres, comme le font les sédévacantistes qui refusent la validité de telle ou telle élection papale.