Bien chers lecteurs de Praedicatho,
À l'heure où ce blog, après 15 ans d'existence, approche allègrement le 1.000.000 de visiteurs uniques et les 2.500.000 pages vues, j'ai l'honneur de vous présenter un article que Marco Tosatti, un vaticaniste italien parmi les plus renommés, a publié hier sur son blog STILVM CVRIÆ, article écrit par Andrea Cionci, que je n'ai plus besoin de vous présenter, et qui m'a demandé de traduire en français.
En même temps que notre pape Benoît XVI et que ces deux auteurs, je vous demande de prier pour moi-même, puisque c'est en ce 28 août le 28ème anniversaire de mon ordination presbytérale.
Soyez, vous aussi, assurés de ma prière et de ma bénédiction quotidiennes.
Père Walter Covens
28 août 2021 Posté par Marco Tosatti
Traduction française autorisée : père Walter Covens
Marco Tosatti
Chers Stilumcurialiens, l'article publié ce matin et signé par Sodalitium Equitum a provoqué une réponse et un approfondissement de la question par Andrea Cionci qui travaille depuis un certain temps avec détermination sur le problème de la validité ou non de la "renonciation" de Benoît XVI. Bonne lecture.
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Sous la chape de plomb des médias généralistes, une véritable "guerre anti-papale" est en cours, menée par des canonistes, des théologiens et des juristes de différents pays, fidèles au seul Benoît XVI.
"Ratzinger répète depuis huit ans qu'il n'y a qu'un seul pape, sans jamais expliquer lequel, comme l'a récemment confirmé (involontairement) l'archevêque Gänswein. La thèse de l'avocate Acosta, publiée en mars dans le livre "Benoît XVI : pape émérite ?", n'a pas été démentie : le canon 332,2 exige pour l'abdication du pape la renonciation au munus (titre divin) alors que Ratzinger, dans sa Declaratio du 11 février 2013, a déclaré qu'il ne renonçait qu'au ministerium, l'exercice actif.
"Benoît XVI, disent Acosta et le juriste Sànchez (Université de Séville), n'a jamais abdiqué, il est resté le seul pape. François est un antipape, les cardinaux nommés par lui, invalides, éliront un autre antipape".
Mais aujourd'hui, l'affrontement final se déroule entre latinistes, autour d'un seul verbe : "vacet". Le Vatican, qui déjà dans les traductions de la Declaratio avait éliminé la dichotomie munus/ministerium, les restituant seulement avec "ministère", a traduit "vacet" par "sede vacante". Légitime, mais le latiniste Gianluca Arca explique que, dans un sens littéral, cela signifie "le siège reste vacant". Confirmé par deux latinistes ("neutres") de La Sapienza, les professeurs Ursini et Piras, à tel point que Cicéron écrit : "Ego filosophiae semper vaco" - "J'ai toujours du temps libre pour la philosophie".
Ainsi, trois concepts clés de la Declaratio de Benoît XVI demeurent : 1) Puisque je n'ai plus la force d'exercer le pouvoir pratique (ministerium), je déclare que j'y renonce, 2) de sorte que le Siège de Saint-Pierre reste LIBRE (et non "vacant" au sens canonique) à partir du 28 février à 20 heures. 3) Et je déclare que le prochain nouveau Pontife doit être élu par un conclave convoqué "par ceux à qui il appartient de le faire".
Lue de cette façon, la Declaratio, d'une "renonciation" canoniquement problématique, se transforme en une déclaration - non pas juridique - mais cohérente, de "siège empêché", selon le canon 412, lorsque "Le siège épiscopal est dit empêché quand, par suite de captivité, de relégation, d'exil ou d'incapacité, l'Évêque diocésain est dans l'impossibilité totale d'exercer sa fonction pastorale dans le diocèse de sorte qu'il ne peut pas communiquer même par lettre avec ses diocésains.".
Plausible ? Vatileaks et le licenciement sommaire de Gotti Tedeschi racontent comment, à la fin de son pontificat, Benoît XVI avait beaucoup de mal à se faire obéir et ne pouvait plus communiquer par lettre, son courrier privé ayant été volé et divulgué.
De fait, le 28 février 2013, il prend l’hélicoptère, laissant physiquement libre, vide, le siège de San Pietro, pour Castel Gandolfo.. De là, il a fait ses adieux au monde à 17h30, mais sur le coup de 20h, il n'a pas signé de renonciation au ministerium, comme l'explique le théologien Pace : peut-être parce que cela aurait été un acte juridique invalide ? A partir de ce moment-là, le Siège empêché aurait commencé et les ennemis de Ratzinger auraient pu faire ce qu'ils voulaient avec le Siège de Saint Pierre.
Arca et Sànchez sont d'accord : "Cela explique l'étrange phrase 'le conclave devra être convoqué par ceux à qui il appartient de le faire'. Pourquoi n'a-t-il pas simplement dit "par les cardinaux" ? Conscient du fait que le Siège serait usurpé, Ratzinger précise que, de toute façon, le prochain vrai pape doit être élu uniquement par les vrais cardinaux, c'est-à-dire ceux nommés par les vrais papes, lui et Jean-Paul II, et non par d'éventuels usurpateurs".
Il n'y a toujours pas eu de réponse du Vatican qui, depuis deux ans, a choisi de ne pas commenter la question, se limitant à excommunier les prêtres fidèles à Benoît sans procès canonique.
Le "Siège empêché" explique toutefois un certain nombre de bizarreries, comme lorsque Ratzinger a écrit dans "Dernières conversations" : "Aucun pape n'a démissionné depuis mille ans, et même au cours du premier millénaire, c'était une exception". Étant donné que six papes ont abdiqué au cours du premier millénaire et quatre au cours du second, il se compare, comme le confirme l'historien Mores (Université de Milan), à l'"exception" du pape médiéval Benoît VIII qui, au cours du premier millénaire, a été envoyé en exil par un antipape et a donc eu - comme par hasard - le siège empêché. Il est également significatif que l'institution du pape émérite soit désormais considérée comme inexistante, à tel point que - rapporte IlGiornale.it - le Vatican s'efforce (actuellement) de lui trouver une jurisprudence. Qu'a donc fait Ratzinger pendant huit ans ? Cela expliquerait sa robe blanche, les autres prérogatives papales dont il continue à jouir et l'étrange ambiguïté qui persiste dans ses déclarations et interviews, suggérant une incapacité à communiquer clairement, due précisément au siège empêché.
Le soupçon - très sérieux - est qu'en fait le pape Ratzinger a communiqué subtilement par le biais de livres et d'interviews pendant huit ans, sans que personne ne décèle ses messages logiques cachés sous d'apparentes incohérences. Est-il possible que le théologien rigoureux et très cultivé, après 2013, ait oublié le latin, le droit canonique, l'histoire de l'Église, tout en continuant à écrire des livres et à donner des interviews pénétrantes ? Et que toutes ces distractions mènent toujours au même scénario du siège empêché ?
La dernière découverte a été faite par un journaliste de RomaIT, Mirko Ciminiello. Encore une fois, dans les "Dernières conversations", Ratzinger admet qu'il pourrait vraiment être le dernier pape de la liste des pontifes de Saint Malachie : il ne considère pratiquement pas François comme son successeur légitime.
Si Benoît XVI n'a pas abdiqué, en effet, les lignes de succession sont séparées à jamais : une ligne papale et une ligne anti-papale, et si les cardinaux ne règlent pas la question canonique à propos de sa Declaratio, la véritable Église continuera à se cacher, avec un prochain chef spirituel qui sera le véritable successeur de Benoît XVI, tandis que le Siège officiel sera perdu, laissé entre les mains d'une nouvelle église éco-maçonnique-mondialiste qui n'aura rien à voir avec le catholicisme romain. Au contraire.
Andrea Cionci
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