Le baptême de Jésus dans le Jourdain révèle deux vérités fondamentales de notre foi chrétienne. La première est sans doute assez souvent présente à notre esprit, mais il est fort à craindre que ce n’est pas le cas pour la seconde.
La vérité qui nous paraît évidente, c’est le fait que le Christ est le Sauveur promis, le Messie, celui dont il est question dans la 1e lecture, à savoir le Dieu unique envoyé pour enlever le péché du monde et pour inaugurer un royaume nouveau et éternel de justice et d’amour. Son baptême nous le révèle par la descente du Saint Esprit et par la voix qui vient du ciel.
La vérité de la foi chrétienne à laquelle nous revenons moins spontanément est celle de la Très Sainte Trinité. Nous prions toujours au nom du Père, et du Fils, et du Saint Esprit. Et nous professons notre foi chaque dimanche, dans le Credo, dans le vrai Dieu qui est un en trois personnes : une nature divine, et trois personnes.
Le Père est pleinement Dieu, le Fils est pleinement Dieu (avant son Incarnation, il était), et le Saint Esprit est pleinement Dieu. Les trois sont éternels, incréés et divins – des personnes distinctes, mais un seul Dieu. Nous ne croyons pas en trois dieux, mais en un seul. Ce Dieu unique est trois Personnes. Et ces trois Personnes sont présentes au baptême de Jésus. Le Fils est Jésus ; le Saint Esprit, c’est Dieu qui descend sur Jésus sous les apparences d’une colombe ; et le Père, c’est la voix du ciel qui dit : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ».
La raison pour laquelle nous ne pensons pas souvent à la Trinité est que c’est vraiment difficile pour nous à comprendre. Nous devrions pourtant y réfléchir, puisqu’après tout, c’est pour cela que Dieu nous le révèle.
Des musulmans croyants et cultivés sont scandalisés par la doctrine de la Trinité. Ils pensent que cela relève du polythéisme. Ce n’est pas vrai. Dieu est un, et Dieu est trois: trois personnes, une nature divine. Il est normal que ce soit difficile à comprendre – après tout, c’est de Dieu dont il est question !
Essayer de comprendre Dieu pleinement, c’est comme un enfant qui essaie de pleinement comprendre la physique nucléaire. C’est comme un singe qui essaie de jouer un concerto pour piano de Mozart.
En fait, c’est l’existence même du concept de la Trinité qui est une indication de sa vérité. Aucun esprit humain n’aurait pu l’inventer ; Dieu seul pouvait nous le révéler.
Un jour, saint Augustin, le grand évêque d’Afrique du Nord au 4ème siècle, se promenait au bord de la mer en contemplant la Trinité. Il était frustré parce que, tout génial qu’il était, il n’arrivait pas à comprendre. En marchant, il aperçoit un petit garçon qui fait un trou dans le sable. Il avait un petit récipient en terre cuite, et il faisait sans cesse le va et vient de l’océan vers sont trou, et du trou vers l’océan. Il remplissait son récipient d’eau, puis allait vers le trou pour le verser. Après l’avoir observé faire cela une douzaine de fois, saint Augustin lui dit : "Mon enfant, que fais-tu là ?" Le garçon répond : "Je veux mettre l’océan dans ce trou dans le sable." Augustin se met à rire, et dit : "Mon enfant, c’est impossible ! Ton petit trou dans le sable ne pourra jamais contenir toute l’eau de l’océan." Alors l’enfant regarde saint Augustin droit dans les yeux, et répond : "Et ta petite intelligence humaine ne pourra jamais contenir la Très Sainte Trinité." C’était une leçon d’humilité. Si l’idée que nous nous faisons de Dieu était à la mesure de notre intelligence humaine limitée, ce ne serait pas vraiment Dieu !
Et pourtant, il nous est bon de méditer ce mystère. D’abord parce qu’il est vrai : c’est Dieu qui nous l’a révélé pour nous aider à mieux le connaître.
Vers la fin de sa vie, saint Ignace de Loyola, le fondateur des Jésuites, s’appliquait à méditer ce mystère tous les jours. Rien que d’y penser, cela le mettait en extase. C’était la nourriture substantielle de son âme. Nous aussi, nous devrions méditer ce mystère plus souvent, parce que ce mystère est de la plus haute importance pour la manière dont nous devons conduire notre vie. Nous sommes créés à l’image de la Trinité, et c’est pour cela que nous pouvons faire le bien ou le mal.
Le mariage et la famille, par exemple, sont deux réalités humaines auxquelles le mystère de la Trinité donne consistance. L’amour conjugal, l’amour d’un mari et d’une femme, est total et il est fécond. C’est une image de la Trinité, l’amour total et fécond des trois Personnes divines. Le mariage et la famille ne sont pas des inventions humaines, comme le football ou la course des yoles, et donc nous ne pouvons pas en changer les règles comme bon nous semble. Si nous le faisons, par exemple en ayant des relations sexuelles avant ou en dehors du mariage, ou en ayant recours à la contraception pour les rendre infécondes, en faisant la promotion des unions homosexuelles comme si c’étaient des mariages, ou en négligeant à venir en aide à son conjoint dans le besoin, ou encore en ayant recours à la reproduction artificielle pour concevoir des enfants comme des produits…, si nous faisons ces choses, nous allons à l’encontre de la loi de la nature humaine, et notre intégrité spirituelle sera détruite.
Dieu nous aime tant qu’il nous crée à son image, et il nous envoie Jésus pour restaurer cette image après qu’elle ait été abîmée par le péché originel. Aujourd’hui, en célébrant le baptême de Jésus et en le recevant dans la Sainte Communion, rendons grâce à Dieu pour le don qu’il nous fait ; faisons le signe de la croix, le signe de la Trinité, non seulement avec notre main, mais de tout notre cœur.