Au début du grand chemin de conversion du carême, l'Église nous remet les « armes de la pénitence » - le jeûne, la prière et l'aumône - à entendre non pas simplement comme un propos extérieur, mais comme le reflet dans les œuvres de la conversion intérieure, du fait de se confier radicalement à la miséricorde, à la bonté et à la providence de Dieu. Nous sommes menés comme par la main, et la succession chronologique des lectures elle-même semble soutenir le pas vers le chemin de notre libération authentique.
Dans la première Lecture, avec le récit du « péché des origines », nous est indiqué le point dont nous partons tous. Nous savons bien que l'expression « péché originel » indique la désobéissance des premiers hommes envers Dieu, et que c’est d’elle que dérive, d’une façon qu’il ne nous est pas donné de comprendre pleinement, tant la situation initiale de « non-salut » dans lequel chaque homme naît, que la tendance au mal dont chacun fait l’expérience en son intérieur.
Outre cette première signification, l’expression désigne aussi le péché qui est à l’origine de tous les autres péchés : l'orgueil, le fait de se considérer comme autosuffisants, indépendants de tout lien, le fait de vivre dans le subjectivisme, et de retenir sa vie pour soi-même, sans l'ouvrir, l'ouvrir toute grande à l'oeuvre de Celui qui l'a créée et qui nous l’a ensuite confiée. Et après la renaissance du Saint Baptême cette inclination reste comme une blessure.
Dans le Psaume 50, il y a une prière que l'homme adresse à Dieu : « Contre Toi, contre Toi seul j'ai péché, ce qui est mal à Tes yeux, je l'ai fait » ; elle est le premier pas – d’importance fondamentale - que la grâce divine rend capable d’accomplir : la reconnaissance de son péché.
Humblement, c'est-à-dire sans chercher des justifications, ce pas représente le début de la libération, puisque c'est faire œuvre de vérité - et la vérité est objective ; par suite, c’est ne plus appartenir au péché, mais à la Vérité : « Vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libres » (Jn 8.32).
Demandons une conscience lucide de nos limites et de nos péchés, l’humilité de savoir que toujours le tentateur, qui n'a pas épargné le Seigneur Jésus, nous guette avec son mensonge, qui est toujours le même du jardin d'Éden jusqu’à la fin des temps : « vous serez comme Dieu » ! À la racine de chaque péché il y a toujours un mensonge, comme à la racine de chaque authentique libération il y a toujours la vérité.
Que ce temps fort de l'Année liturgique marque le triomphe de la vérité. Ainsi, il marquera aussi le triomphe de la liberté et de la victoire sur la mort que nous célébrerons à Pâques.