Le Sauveur montre par là que ces malédictions qu'il prononce sont des revers de son amour pour eux. Il a tellement voulu les sauver, et puis ils ne veulent pas, alors voilà ce qui va arriver: "Malheur à vous, Pharisiens hypocrites!..." (Mt 23, 13ss). Et tout de suite après, il y a cette grande invocation - c'est un des passages les plus beaux de l'Évangile -: "Jérusalem, Jérusalem, combien de fois j'ai voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins à côté d'elle, et tu ne l'as pas voulu!" (Mt 23, 37). Un tel amour a été refusé. Que voulez-vous? Quand on saccage des pièces essentielles d'un ensemble, tout va s'écrouler. alors viendront des événements qui vont être terribles, et cela va être la ruine de Jérusalem. Et je vous le disais, la ruine de Jérusalem va être un événement précis, mais qui va être lui-même un signe d'un autre événement qui se passera à la fin des temps: la fin du monde. La ruine de Jérusalem, c'est la ruine de l'Ancienne Alliance, qui avait commencé avec Abraham, continué avec les Patriarches, Moïse et les Prophètes, Dieu faisant un pacte avec son peuple pour le disposer à être missionnaire du salut qu'il devait répandre à travers le monde.
Dieu s'est adressé d'abord, bien sûr, aux Gentils, en leur adressant ces révélations intérieures: c'est ce qu'on appelle le régime de la loi de nature, et puis il avait discerné, au milieu d'eux, un petit peuple: Abraham et sa descendance, auxquel il envoyait des grâces particulières, leur demandant plus et leur donnant plus. C'est toujours la loi: plus on reçoit, plus il est demandé; plus on demande, plus on reçoit. C'est toujours ce cercle, qui fait monter les âmes à la rencontre de Dieu. Dans la vie de chacun, c'est la même chose. Plus vous demanderez, plus vous recevrez; et plus vous recevrez, plus il vous sera demandé. Cela fait comme une sorte d'ascension, en spirale. Et ceux qui ont tout demandé, il leur est tout donné, et ceux-là, il les appellera ses disciples.
À un moment donné, Jésus est suivi par la foule, et puis il se retourne vers eux et il commence à leur dire ces paroles qui sont terribles: "Si quelqu'un ne quitte pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, sa maison et ses champs, il ne peut pas être mon disciple." (cf. Lc 14, 26; Mt 19, 29). Alors ici, le mot disciple prend une intensité de sens qui définit ceux qui sont les plus grands saints, qui sont vraiment les disciples, totalement. Encore ces paroles, au même endroit dans saint Luc: "Quiconque parmi vous ne renonce pas à tous ses biens ne peut être mon disciple" (Lc 14, 33). Vous voyez, il y a des étapes dans le renoncement. Tout n'est pas demandé avec la même intensité à tous, mais jamais il n'y a un plafond; jamais, dans la vie intérieure, il n'y a un moment qui sera considéré par le ciel comme un point d'arrêt. Tant que nous aurons encore un peu de vie, un peu d'intelligence pour penser à ces choses-là, un peu d'infini dans le coeur pour les désirer, il y aura toujours une perspective ascendante qui s'ouvrira devant nous, et c'est ce qui rend précieuse cette vie, ce temps qui passe d'une manière si rapide. Le Livre de Job parle de cela: cette aventure pleine de souffrances, d'épreuves, d'amerumes, et qui, cependant, est si précieuse. Tant que nous sommes encore ici, dans ce temps-là de pèlerinage, l'amour peut grandir en nous. Et au moment de mourir, la grande souffrance ce sera la pensée du temps que nous aurons perdu par rapport aux choses éternelles. - Toutes les choses pratiques que j'ai faites, j'aurais pu les faire avec un esprit différent, un désir des choses divines, alors elles auraient été colorées différemment. Maintenant, c'est trop tard! Il reste encore le temps qui me sépare de la mort, et un acte d'amour comme celui du bon larron, au tout dernier moment: "Souviens-toi de moi quand tu seras dans le Royaume de ton Père" (cf. Lc 23, 42), quand il est fait avec un intense amour, peut faire un immense saint, dans la durée de l'éclair.
Alors, Il avait choisi parmi eux un petit peuple, c'est le peule juif, pour le former d'une manière plus immédiate, comme, plus tard, Jésus formera autour de lui les apôtres. Dieu avait rassemblé le peuple juif pour qu'il soit comme un peuple missionnaire, sen allant à traves le monde, et puis voilà que quand Jésus vient, il les trouve résistants à son message; c'est un message du plus grand amour. C'est toujours une tragédie quand un peuple ou une personne humaine nie Dieu; mais depuis que Dieu s'est révélé comme le Dieu du grand amour, la tragédie est deux fois pire. Renier un Dieu qui nous a donné les toutes grandes preuves de son amour, celles qui sont bouleversantes, qu'on n'aurait jamais soi-même prévues! Un Dieu qui se fait homme pour mourir, sur la croix crucifié par amour, pour l'amour de nous! Que voulez-vous qu'il fasse de plus, Jésus? Jésus pouvait reprendre la plainte de Dieu dans l'Ancien Testament: "Que pouvais-je encore faire pour ma vigne que je n'aie pas fait?" (la vigne, c'est Israël). - Je l'ai entourée de murs, je l'ai bêchée, je l'ai protégée contre les ravages des bêtes sauvages; et au lieu de me donner du raisin, voilà qu'elle me donne du verjus (cf. Is 5, 2-4). Cette souffrance de Dieu de voir son amour repoussé, quand Il a donné ces grandes preuves de son amour, de la folie de son amour, dans l'Incarnation rédemptrice! réconciliant toutes choses dans le sang de sa croix; et puis, que les hommes se détournent, alors le drame est terrible. Dieu prépare ce peuple, non par avec l'intention de le favoriser, lui seul, mais avec l'intention de l'envoyer comme missionnaire à travers le monde, et qu'à travers lui, le monde entier puisse accéder à la lumière. Le peuple juif était visité par Dieu, qui le châtiait au moment de ses infidélités. Il disait lors qu'Il ne voulait plus rien avoir affaire avec lui, et puis toujours Il revenait. C'est toujours cela. Dieu, toujours, revient. - Si vous m'abandonnez, je vous abandonnerai; il y aura des choses terribles qui surviendront. Je ne m'occuperai de vous, je vous abandonnerai à vous-mêmes! Et puis, Il revient toujours. Et dès qu'Il voit un signe de pénitence, comme un appel, dans ce peuple, Il est tout prêt à recommencer le premier amour. C'est bouleversant! C'est dans Osée surtout.
Alors le peuple juif imaginait que Dieu les conduirait à un dernier jour, le Jour de Yahvé, le grand Jour, qui serait la fin du monde, et qu'alors, à ce moment-là, il y aurait le discernement final entre ceux qui refusent l'amour, et ceux qui accèdent à l'amour. Donc, la perspective était une histoire montante, qui se terminerait par l'avènement de Dieu séparant les ténèbres de la lumière, pour toujours. À ce moment-là, pour préparer ces derniers temps, devait paraître, dans certaines perspectives juives, le Messie. Le Messie devait paraître pour être comme l'instrument envoyé par Dieu pour annoncer le jugement définitif, la séparation qui allait se faire, et pour préparer une dernière fois à l'attente de la venue de Dieu.
Et quelque chose s'est produit, à laquelle ils ne songeaient pas: c'est Jésus qui va être la cause de cette révélation. Dieu va envoyer Son Fils, son Messie, deux fois: une première fois, pour pardonner le monde. "Je ne suis pas venu pour juger le monde" (Jn 4, 16). Il n'est pas venu pour juger le monde, mais pour sauver le monde. Une première venue du Messie va annoncer la fin de l'Ancienne Alliance, fonder une Alliance nouvelle qui durera jusqu'à la fin des temps. Et à ce moment-là le Messie viendra, mais cette fois-ci, en juge, pour juger, discerner, séparer les ténèbres de la lumière. Donc, ce qu'on attendait comme événement final, et qui devait se faire en une seule fois, doit se faire en deux fois: une première fois avec la descente du Sauveur pour sauver le monde, et une seconde fois, pour juger le monde.
Juger le monde, voudra dire simplement: venir avec la lumière, la lumière de la sainteté de Dieu, à la rencontre du monde. Et tous ceux qui, dans leur âme et dans leur coeur, auront désiré un peu d'amour, un peu de cette sainteté de Dieu, cette lumière de Dieu, seront comme aimantés, attirés, absorbés par cette grande lumière qui viendra à leur encontre, et ils partiront dans le ciel avec le Sauveur. Et puis, ceux qui se sont érigés contre l'amour, qui l'ont refusé, ils continueront d'être dans ce même refus, ils seront rejetés pour toujours.
Mais au début, un premier drame va se produire: la fin de l'ancienne Alliance, l'inauguration de la nouvelle Alliance qui va être les derniers temps. Les derniers temps dureront x siècles. Il y a déjà deux mille ans que cela dure. Combien de temps cela durera-t-il? Nous ne le savons pas. Il y aura toujours des alternances des mêmes phénomènes, de catastrophes qui iront en s'amplifiant à mesure que s'approche l'ulime séparation. Et, précédant ce temps où se prépare son Église, qu'il va remettre à l'Esprit Saint, il y aura Israël qui s'est endurci, a pris une voie d'égarement, une voix sans ssue, mais qui est toujours attendu, un peu comme un père de famille attend son fils qui a dévié, qui s'est égaré. Dans la parabole de l'enfant prodigue, il l'attend toujours. Un jour, Israël, dans son ensemble, dans sa partie principale, reviendra; c'est saint Paul qui nous dira cela. (à suivre)
du 16 octobre 1971 au 18 mars 1972 sur l'Apocalypse de saint Jean