Benoît XVI, Agir et souffrir comme lieux d'apprentissage de l'espérance (1)
35. Tout agir sérieux et droit
de l'homme est espérance en acte. Il l'est avant tout dans le sens où nous cherchons, de ce fait, à poursuivre nos espérances, les plus petites ou les plus grandes : régler telle ou telle tâche
qui pour la suite du chemin de notre vie est importante ; par notre engagement, apporter notre contribution afin que le monde devienne un peu plus lumineux et un peu plus humain, et qu'ainsi les
portes s'ouvrent sur l'avenir. Mais l'engagement quotidien pour la continuation de notre vie et pour l'avenir de l'ensemble nous épuise ou se change en fanatisme si nous ne sommes pas éclairés
par la lumière d'une espérance plus grande, qui ne peut être détruite ni par des échecs dans les petites choses ni par l'effondrement dans des affaires de portée historique. Si nous ne pouvons
espérer plus que ce qui est effectivement accessible d'une fois sur l'autre ni plus que ce qu'on peut espérer des autorités politiques et économiques, notre vie se réduit bien vite à être privée
d'espérance. Il est important de savoir ceci : je peux toujours encore espérer, même si apparemment pour ma vie ou pour le moment historique que je suis en train de vivre, je n'ai plus rien à
espérer. Seule la grande espérance-certitude que, malgré tous les échecs, ma vie personnelle et l'histoire dans son ensemble sont gardées dans le pouvoir indestructible de l'Amour et qui, grâce à
lui, ont pour lui un sens et une importance, seule une telle espérance peut dans ce cas donner encore le courage d'agir et de poursuivre. Assurément, nous ne pouvons pas « construire » le règne
de Dieu de nos propres forces – ce que nous construisons demeure toujours le règne de l'homme avec toutes les limites qui sont propres à la nature humaine. Le règne de Dieu est un don, et c’est
pourquoi justement il est grand et beau, et il constitue la réponse à l'espérance. Et nous ne pouvons pas – pour utiliser la terminologie classique – "mériter" le ciel grâce à « nos propres
œuvres ». Il est toujours plus que ce que nous méritons ; il en va de même pour le fait d'être aimé qui n'est jamais une chose « méritée », mais toujours un don. Cependant, avec toute notre
conscience de la « plus-value » du "ciel", il n'en reste pas moins toujours vrai que notre agir n'est pas indifférent devant Dieu et qu'il n'est donc pas non plus indifférent pour le déroulement
de l'histoire. Nous pouvons nous ouvrir nous-mêmes, ainsi que le monde, à l'entrée de Dieu: de la vérité, de l'amour, du bien. C'est ce qu'ont fait les saints, qui, comme « collaborateurs de Dieu
», ont contribué au salut du monde (cf. 1 Co 3, 9; 1 Th 3, 2). Nous pouvons libérer notre vie et le monde des empoisonnements et des pollutions qui pourraient détruire le présent et l'avenir.
Nous pouvons découvrir et tenir propres les sources de la création et ainsi, avec la création qui nous précède comme don, faire ce qui est juste selon ses exigences intrinsèques et sa finalité.
Cela garde aussi un sens si, à ce qu'il semble, nous ne réussissons pas ou nous paraissons désarmés face à la puissance de forces hostiles. Ainsi, d'un côté, une espérance pour nous et pour les
autres jaillit de notre agir ; de l'autre, cependant, c'est la grande espérance appuyée sur les promesses de Dieu qui, dans les bons moments comme dans les mauvais, nous donne courage et oriente
notre agir.
(Spes salvi)
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