Changement de directeur pour la revue des jésuites de Rome, qui est contrôlée par le Vatican avant d'être imprimée. Le nommé et le battu. Un article qui a fortement irrité les évêques des États-Unis. Suivi par une correction
CITÉ DU VATICAN, le 15 septembre 2011 – Le jésuite Antonio Spadaro, 45 ans, expert en
littérature et écrivain, est depuis une semaine le nouveau directeur de "La Civiltà Cattolica". Il a battu sur le fil un candidat apparemment mieux placé que lui, le père Michele Simone, déjà
directeur-adjoint et commentateur politique de la revue, mais considéré par les autorités vaticanes comme plus proche, peut-être trop, de la tendance de centre-gauche du monde politique
italien.
Le père Spadaro succède au père GianPaolo Salvini, 75 ans, directeur de "La Civiltà Cattolica" depuis 1985, date à laquelle il avait remplacé le père Bartolomeo
Sorge qui l’avait lui-même dirigée pendant douze ans.
C’est aussi en 1985 – il faut le noter – qu’avait eu lieu la rencontre ecclésiale de Loreto qui marqua un changement radical, voulu par Jean-Paul II, dans
l’orientation des dirigeants de la conférence des évêques d’Italie.
Si "La Civiltà Cattolica" fait particulièrement autorité, c’est parce que ses projets d’articles sont revus, avant impression, au Palais Apostolique du Vatican.
Jusqu’à Paul VI, c’est le pape lui-même qui s’en chargeait mais, depuis une vingtaine d’années, cette mission est confiée à des hauts fonctionnaires de la secrétairerie d’État.
De temps en temps, un incident se produit, parce que les vigilants réviseurs du Vatican eux-mêmes ont parfois des distractions. Comme le disait Horace à propos des
contradictions de l'Iliade et de l'Odyssée, "quandoque bonus dormitat Homerus", même le grand Homère sommeille quelquefois.
La revue bimensuelle des jésuites de Rome a connu récemment un tel incident à propos d’un article consacré à la réforme du système de santé aux États-Unis, paru
dans le numéro du 5 juin 2010 sous la signature du jésuite Andrea Vicini, enseignant au Boston College et à la faculté de théologie de l’Italie Méridionale, à Naples.
Cet article, qui citait largement les opinions de sœur Carol Keehan de la Catholic Health Association et celles d’autres organismes ecclésiaux des États-Unis,
portait un jugement globalement positif sur la réforme fortement voulue par Barack Obama, réforme qui avait pourtant suscité des réactions négatives de la part des dirigeants de l’épiscopat
américain en ce qui concerne le traitement de l’avortement et les droits à l’objection de conscience.
Ces dirigeants de l’épiscopat n’ont pas manqué de faire connaître au Vatican leurs protestations à propos de l’article en question.
À tel point que, dans un numéro ultérieur, celui du 19 mars 2011, le sujet de l’éditorial de "La Civiltà Cattolica" a justement été : “Les évêques des USA et
la réforme du système de santé”.
Cet éditorial soulignait que "l’approbation" de la réforme du système de santé exprimée par sœur Keehan, par "d’autres congrégations religieuses" et par "quelques
organismes religieux", était "malheureusement" le résultat "d’évaluations hâtives et partielles, en désaccord avec les opinions des évêques des USA, dont le jugement a été exprimé sur la base des
enseignements moraux de l’Église, en tenant compte de tous les aspects de cette réforme".
En note, l'éditorial ajoutait que "l’article consacré à cette réforme que notre revue a publié en juin dernier exprimait également des jugements
analogues".
Sandro Magister
www.chiesa
La revue des jésuites de Rome, publiée sous le contrôle de la secrétairerie d’état du Vatican :
> La Civiltà Cattolica
Et pour en savoir plus sur ses relations avec le Saint-Siège :
> "La Civiltà Cattolica" a un directeur supplémentaire. Au Vatican
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Traduction française par Charles de Pechpeyrou.