ROME, le 7 novembre 2011 – Parmi les leaders religieux qui écoutent le pape à Assise, sur la photo ci-dessus, le premier
à gauche, coiffé d’un solennel couvre-chef blanc, est le métropolite Aleksandr d’Astana et du Kazakhstan.
Que le patriarcat orthodoxe de Moscou et de toutes les Russies l’ait envoyé à Assise comme chef de sa délégation a fait
penser à un déclassement et à un coup d’arrêt dans le dialogue avec l’Église de Rome.
Rien de plus faux.
Aleksandr n’est pas du tout un personnage de second plan. C’est le nouvel astre de l'orthodoxie russe.
Né il y a 51 ans à Kirov, au nord-est de Moscou, Aleksandr a été étudiant au séminaire de Saint-Pétersbourg, qui
s’appelait alors Leningrad, à l'époque où l'actuel patriarche de Moscou, Kirill, en était recteur. En tant qu’archevêque, il a dirigé pendant dix ans le service synodal pour la jeunesse. Au mois
de mars 2010, il a été nommé archevêque d’Astana, la capitale du Kazakhstan. Quatre mois plus tard, il était élevé au rang de métropolite. Et, au début de cet automne, il a été nommé membre
permanent du Saint-Synode.
Le Saint-Synode est l’autorité suprême de l’Église orthodoxe russe. Il était composé, il y a encore quelques semaines, de
douze membres : sept permanents et cinq temporaires, ces derniers ne restant pas plus d’un an en charge.
Avec l’arrivée d’Aleksandr, le nombre de membres permanents du Saint-Synode a été porté à huit. C’est le signe que sa
nomination a été si fortement voulue qu’elle a nécessité une modification des canons, qui sera bientôt ratifiée.
A Assise, le 27 octobre, il y avait trois évêques parmi les dix délégués du patriarcat de Moscou. L’un d’eux était un
autre membre permanent du Saint-Synode, le métropolite et exarque patriarcal Philarète de Minsk et de la Biélorussie. C’est un grand partisan du dialogue avec l’Église catholique et il
accueillera prochainement dans sa ville, du 13 au 15 novembre, une conférence sur les relations entre l’orthodoxie et le catholicisme.
Mais à Assise, en dépit de l'autorité et du prestige de Philarète, le rôle de chef de la délégation des orthodoxes russes
a été effectivement tenu par Aleksandr, qui est bien plus jeune que lui.
Lors de la cérémonie de l’après-midi, devant la basilique où est enterré saint François, c’est Aleksandr qui a pris la
parole. Et avant cela, au cours du repas "frugal", c’est lui qui s’est assis à la même table que Benoît XVI.
Le lendemain, 28 octobre, au Vatican, au déjeuner de gala offert par le cardinal secrétaire d’état Tarcisio Bertone aux
trois cents personnes invitées à la rencontre d’Assise, c’est encore Aleksandr qui s’est assis à une place d’honneur, à droite de Bertone et du patriarche œcuménique de Constantinople,
Bartholomée Ier.
Au Saint-Synode de l’Église orthodoxe russe, le métropolite Aleksandr marque un passage de génération. D’autres membres
permanents, comme le patriarche de Moscou Kirill, les métropolites Vladimir de Kiev, Vladimir de Saint-Pétersbourg, Philarète de Minsk, Juvénal de Krutitsy et Kolomna, ont tous dépassé les 75
ans.
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L’autre étoile montante de l’orthodoxie russe, le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du département des
relations extérieures du patriarcat, appartient lui aussi à la génération d’Aleksandr.
Le 27 octobre, Hilarion n’était pas à Assise, mais en Suisse, à l'université catholique de Fribourg, à la faculté de
théologie où il a été étudiant, où il est professeur honoraire et où il a envoyé son plus proche collaborateur, l'archidiacre Ioann Kopeikin, pour un doctorat.
L'université de Fribourg a formé des théologiens et des leaders de premier plan de la hiérarchie catholique, très proches
du pape Joseph Ratzinger, depuis l'actuel archevêque de Milan, le cardinal Angelo Scola, jusqu’au nouvel évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, Charles Morerod, nommé à ce poste le 3 novembre
dernier.
Au début du mois d’octobre, lors de la première assemblée de la session d’hiver du synode de l’Église orthodoxe russe, le
métropolite Hilarion a également été mis à la tête de la commission synodale biblique et théologique, à la place de Philarète de Minsk : un rôle analogue à celui de Ratzinger pendant le
pontificat de Jean-Paul II.
Peu de temps avant cette nomination, le 29 septembre, Hilarion a eu un entretien avec Benoît XVI à Castel Gandolfo : ce
n’est ni le premier ni le dernier d’une relation qui se fait de plus en plus intense entre eux et dans laquelle il y a aussi de l’amitié. La veille et le lendemain, Hilarion a également rencontré
les cardinaux Kurt Koch, Tarcisio Bertone, Gianfranco Ravasi et Angelo Scola.
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Enfin, nouvelle preuve du rapprochement croissant entre les deux Églises, le patriarche Kirill a rencontré, le 1er
novembre dernier, l'archevêque catholique de Moscou, Paolo Pezzi.
Commentant cette rencontre, la première entre les deux hommes, Pezzi a reconnu à Kirill le mérite d’avoir fait accepter
"positivement" par les évêques orthodoxes des différentes régions de Russie la présence des catholiques, "qui ne sont plus considérés comme des étrangers".
Et le patriarche de Moscou a déclaré qu’il considérait comme "dépassées" les tensions des années 90, lorsque la présence
catholique était perçue en Russie comme agressive : "Aujourd’hui les orthodoxes et les catholiques travaillent ensemble et ils ont formé un front commun pour la défense des valeurs chrétiennes
dans la société moderne".
Sandro Magister
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Traduction française par Charles de Pechpeyrou.