16. "Et quand elle eut dit cela, elle s'en alla, et appela Marie, sa soeur, en silence, disant: Le Maître est ici et il t'appelle". Il faut remarquer comment l'Evangile, pour indiquer une parole dite à voix basse, se sert du mot "silence". Comment, en effet, a-t-elle gardé le silence, puisqu'elle a dit: "Le "Maître est ici, et il t'appelle?" Il faut aussi remarquer que l'Evangéliste ne dit ni où, ni quand, ni comment le Seigneur appela Marie; mais il nous le fait comprendre par les paroles de Marthe, afin d'abréger son récit.
17. "Dès que Marie eut entendu, elle se leva aussitôt et vint vers lui. Car Jésus n'était pas encore arrivé dans le bourg, mais il se tenait au lieu même où Marthe s'était présentée à lui. Les Juifs donc qui étaient avec Marie. dans la maison, et la consolaient, quand ils virent qu'elle s'était levée a si promptement et qu'elle était sortie, la suivirent en disant: Elle va au tombeau pour y pleurer". Pourquoi l'Evangéliste a-t-il voulu nous raconter tout cela? C'est pour nous faire voir par quelle occasion ils se trouvèrent présents en grand nombre, quand Lazare fut ressuscité. Les Juifs pensant qu'elle ne se précipitait au dehors que pour chercher dans les larmes un soulagement à sa. douleur, la suivirent, et cela se faisait pour qu'un miracle aussi grand que la résurrection d'un mort de quatre jours eût un grand nombre de témoins.
18. "Mais quand Marie fut venue où était Jésus, en le voyant elle tomba à ses pieds et lui dit: Seigneur, si vous aviez été ici, mon frère ne serait pas mort. Jésus donc, voyant qu'elle pleurait et que les Juifs qui étaient avec elle pleuraient aussi, frémit en son esprit et se troubla lui-même, et il dit: Où l'avez-vous déposé?" Je ne sais ce qu'il a voulu nous apprendre en frémissant dans son esprit, et en se troublant lui-même. Car d'où aurait pu venir son trouble, sinon de lui-même? C'est pourquoi, mes frères, remarquez d'abord sa puissance, et cherchez ensuite ce qu'il a voulu signifier. Tu te troubles même quand tu ne le veux pas: Jésus-Christ s'est troublé parce qu'il l'a voulu. Jésus a eu faim, c'est vrai; mais c'est qu'il l'a voulu. Jésus a dormi, c'est vrai; mais c'est qu'il l'a voulu. Jésus a été triste, c'est vrai; mais c'est qu'il l'a voulu. Jésus est mort, c'est vrai; mais c'est qu'il l'a voulu. Il était en son pouvoir d'éprouver ces affections ou de ne les pas éprouver. Le Verbe a pris une âme et un corps, s'appropriant ainsi la nature de l'homme tout entier, dans l'unité d'une seule personne. Car l'âme de l'Apôtre a été éclairée par le Verbe; l'âme de Pierre a été éclairée par le Verbe; l'âme de Paul, les âmes des autres Apôtres et des saints Prophètes ont été éclairées par le Verbe; mais d'aucune il n'a été dit: "Le Verbe s'est fait chair (Jn 1, 11)"; d'aucune il n'a été dit: "Mon Père et moi nous sommes un (Jn 10, 30)". L'âme et le corps de Jésus-Christ ne forment avec le Verbe de Dieu qu'une seule personne, un seul Christ; et par là, comme en lui réside la souveraine puissance, il dispose de la partie faible selon sa volonté; c'est pourquoi: "Il se troubla lui-même".