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Publié par Walter Covens

17 TOB evSi nous acceptons l'’hypothèse que le IVe évangile est l’'évangile du chrétien parfait, de celui qui est pleinement initié, pourquoi Jean n’'emploie-t-il jamais les mots grecs gnôsis et téléios? Comme nous l'’avons vu, ces mots servent justement, dans les lettres aux Corinthiens, Romains ou Hébreux, à définir cette situation chrétienne caractéristique. Il faut alors nous demander quels mots emploie Jean pour désigner l'’état du disciple qui est à l'’écoute, et le cheminement qu'’il doit faire. Je réclame donc votre attention sur trois mots essentiels. Un premier thème abordé par Jean reprend sa condition de disciple, et qui correspond au téléios et à la gnôsis de Paul, c’'est certainement le thème de la foi, le mot croire (…...) Jean finit son évangile en disant : Ces signes ont été mis par écrit pour que vous croyiez (20, 31). La scène dominante de la crucifixion est racontée pour que vous aussi vous croyiez (19, 35). Jésus prie pour ceux qui croiront (en lui) (17, 21). Donc tout le vocabulaire de la foi –- qui n'’est pas, selon moi, la foi initiale, mais une foi parfaite, approfondie, éprouvée - offre à Jean les mots capables d'’indiquer le cheminement et le point d’'arrivée du chrétien.

       Il est vrai aussi que le mot téléios (parfait) n’'apparaît pas sous la plume de Jean. Pourtant, comme il arrive en d'’autres endroits du Nouveau Testament, s'’il n'’y pas le substantif, il y a le verbe. Par exemple Jean use abondamment du verbe pisteuô (je crois) mais jamais du substantif pistis (foi). C'’est là un intéressant phénomène linguistique. Pareillement Jean n’'emploie jamais l'’adjectif téléios (parfait) mais en plusieurs passages essentiels, il parle de "porter à la perfection". Le but, par exemple, de toute action de Jésus est que "tous soient parfaits dans l’'unité" : tétéléioménoi (amenés à la perfection). Ainsi réapparaît le thème paulinien, mais d’'une autre manière: que tous soient menés à la perfection, de la même façon que Jésus doit "rendre parfaite", "mener à bonne fin" (4, 34; 5, 36) l’œ'oeuvre du Père. Le verbe ici est téléioun. Cette œoeuvre Jésus la déclare "achevée" sur la croix, tétélestai de nouveau du verbe téléioun (19, 28-30).

       Quant au mot gnôsis, la connaissance dont parle Paul, il est évident que ce mot est étranger à Jean, tout autant que le mot sophia (sagesse). On trouve pourtant chez lui le verbe ginoskein (d'’où vient gnôsis) utilisé dans un sens qui équivaut pratiquement à la gnôsis de Paul, c’'est-à-dire une connaissance d'’un niveau supérieur. Dans toute une série de passages, en se servant du simple verbe connaître, Jean nous montre le type de connaissance mûrie qui est le but de son enseignement. Nous pouvons citer en particulier: Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît et que je connais le Père (10, 14-15). C'’est cette connaissance intime, résultant d’'une longue familiarité, qui constitue le but de la prédication de Jean.
Voici votre roi, Cerf, 1981, p. 23-25
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