J. Ratzinger, 1985
Cardinal Ratzinger, La liturgie après le Concile - 2
Une première réflexion : notre thème porte sur la vie liturgique dans les communautés. La « communauté » est la nouvelle découverte de l'époque post-conciliaire.
Nous nous sommes resouvenus que, dans le langage de l'Église ancienne, l'Eucharistie avait pour nom, entre autres, celui de synaxe, « rassemblement ». Elle rassemble en effet les hommes, elle
les relie entre eux et les unit, elle édifie la communauté et, vice versa, la communauté expérimente l'Eucharistie comme un accomplissement d'elle-même, comme le centre de sa vie, et elle y
participe activement dans sa totalité. Tout cela est exact, mais il faut que nous songions que l'expression synaxe s'étend sur un rayon bien plus grand que celui de la communauté particulière.
Derrière cette expression il y a la parole de l'Évangile selon saint Jean : Jésus voulut mourir pour son peuple, et non seulement pour son peuple, mais pour ramener à l'unité les enfants de
Dieu dispersés (Jn 11,52). Le rassemblement que cherche Jésus-Christ est celui de tous les enfants de Dieu. Le Seigneur ne rassemble pas la communauté pour la refermer sur elle-même, mais pour
l'ouvrir. Celui qui se laisse rassembler par le Seigneur entre dans un fleuve qui ne cesse de forcer les limites de nos particularismes. On ne peut être auprès du Seigneur que si l'on veut être
auprès de Celui qui est à la recherche de tous les enfants de Dieu. L'Église est dans la communauté, ainsi s'exprime une pensée en vogue de nos jours, car « là où deux ou trois sont réunis en
mon nom, je suis au milieu d'eux », dit le Seigneur. Mais à l'inverse nous dirons aussi : la communauté n'est auprès du Seigneur et n'est réunie en son nom que si elle est tout entière dans
l'Église, que si elle est tout entière dans le tout. Voilà pourquoi la liturgie chrétienne, bien quelle ne soit pratiquée que hic et nunc, en un lieu donné, et qu'elle exige l'accord de la
communauté, est de par sa nature, catholique, issue du tout et conduisant au tout, dans l'unité avec le pape, les évêques, les fidèles de tous lieux et de tous temps. La réalité catholique
n'est pas une adjonction venue de l'extérieur, un carcan juridique qui réfrène les libres élans de la communauté, mais elle vient du Seigneur lui-même, qui est à la recherche de tous et les
conduit tous les uns vers les autres. La liturgie n'est pas « forgée » par la communauté, mais la communauté la reçoit du tout, et elle se reçoit elle-même du tout en tant que communauté. Elle
ne reste communauté que si elle ne cesse de retourner au tout. Il en découle deux choses tout à fait pratiques et d'importance. (à suivre)
La vie liturgique dans les communautés quinze ans après le Concile
J. Ratzinger, 1985
J. Ratzinger, 1985
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