Dans une lettre publiée ce vendredi 20 septembre, François demande au Collège des cardinaux «un effort supplémentaire» pour implanter la réforme économique du Saint-Siège lancée il y a dix ans. Visant le «déficit zéro», le Saint-Père estime que les institutions vaticanes qui enregistrent un excédent devraient «contribuer à la couverture du déficit général».
Le pape François commence-t-il à paniquer à propos des finances du Vatican ?
La lettre adressée cette semaine au collège suggère que le gouffre budgétaire qui ronge lentement le Vatican depuis des années est finalement devenu trop grand pour qu'il puisse l'ignorer. La question est désormais : pourra-t-il convaincre la curie de l'urgence de la situation ?
Même s’il le peut, il sera peut-être déjà trop tard.
Comme l'a déclaré un responsable du Secrétariat à l'économie à The Pillar en février :
« Les gens aiment imaginer que le Vatican est "trop gros pour faire faillite". Surtout les gens au Vatican. »
Ce n’est pas le cas, a-t-il prévenu...
Le Vatican ne publiant que le texte italien et anglais, voici une traduction française de travail :
Chers frères,
Il y a dix ans, nous avons commencé la réforme de la Curie romaine et, par la Constitution apostolique Praedicate Evangelium, nous avons établi la nouvelle organisation du Saint-Siège, en précisant ses principes directeurs et ses finalités. Ecclesia semper reformanda : tel est l’esprit qui a inspiré la réforme, afin que la Curie romaine assiste le Successeur de Pierre dans l’exercice de sa charge pastorale suprême pour le bien et le service de l’Église universelle et des Églises particulières.
Si cette mise à jour représente un témoignage de vitalité et de grâce, nous connaissons le dévouement et le travail des femmes et des hommes engagés à s’adapter à ce mouvement de renouveau. Il vous revient, frères cardinaux, dans votre fonction d’assister le Pontife romain dans le gouvernement de l’Église universelle, d’accompagner tous ceux qui sont engagés dans ce processus de transformation.
Malgré les difficultés et, parfois, la tentation de l’immobilité et de l’inflexibilité face aux changements, de nombreux résultats ont été obtenus au cours de ces années. Je vous remercie pour l’aide que vous avez apportée et que vous continuez à apporter. C’est sur ces bases que je voudrais à présent aborder de manière particulière un des thèmes qui a le plus caractérisé les Congrégations générales avant le Conclave : la réforme économique du Saint-Siège. Les années qui se sont écoulées ont montré que les demandes de réforme, formulées dans le passé par de nombreux cardinaux, ont été clairvoyantes et ont conduit à une plus grande conscience du fait que les ressources économiques au service de la mission sont limitées et doivent être gérées avec rigueur et sérieux, afin que les efforts de ceux qui ont contribué au patrimoine du Saint-Siège ne soient pas gaspillés.
Pour ces raisons, un effort supplémentaire est désormais demandé à tous pour que le « déficit zéro » ne soit pas seulement un objectif théorique, mais un objectif réellement réalisable. La réforme a posé les bases pour la mise en œuvre de politiques éthiques visant à améliorer la performance économique des actifs existants. A cela s’ajoute la nécessité pour chaque institution de s’efforcer de trouver des ressources externes pour sa mission, en donnant l’exemple d’une gestion transparente et responsable au service de l’Eglise.
En ce qui concerne la réduction des coûts, nous devons donner un exemple concret pour que notre service soit accompli dans un esprit d’essentialité, en évitant le superflu et en choisissant bien nos priorités, en privilégiant la collaboration et les synergies réciproques. Nous devons être conscients qu’aujourd’hui nous sommes face à des décisions stratégiques à prendre avec une grande responsabilité, car nous sommes appelés à garantir l’avenir de la Mission.
Les Institutions du Saint-Siège ont beaucoup à apprendre de la solidarité des bonnes familles. De même que, dans ces familles, ceux qui jouissent d’une bonne situation économique viennent en aide à ceux qui en ont le plus besoin, les Organismes qui ont un excédent doivent contribuer à couvrir le déficit général. Cela signifie prendre soin du bien de nos communautés, en agissant avec générosité, au sens évangélique du terme, comme condition indispensable pour demander également la générosité de l’extérieur.
En conclusion, je vous demande d'accueillir ce message avec courage, esprit de service, et de soutenir les réformes en cours avec conviction, loyauté et générosité, en contribuant activement avec votre connaissance et votre expérience au processus de réforme. Chacune des Institutions du Saint-Siège forme avec toutes les autres un seul corps : c'est pourquoi une collaboration et une coopération authentiques vers l'unique objectif, le bien de l'Église, représentent une condition essentielle de notre service.
Avec cet esprit et cette conscience, je vous demande d'accompagner notre travail avec fidélité et confiance.
Du Vatican, le 16 septembre 2024
FRANÇOIS